Question de M. LARCHER Serge (Martinique - SOC-A) publiée le 28/10/2010

M. Serge Larcher attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, sur la situation critique du système électrique en Martinique.

En effet, et cela est vrai pour l'ensemble des DOM, la construction des équipements et des réseaux d'électrification a été réalisée avec un très grand retard par rapport à celle effectuée en métropole. Ainsi, un écart entre le niveau d'équipement des DOM et celui de l'hexagone s'est progressivement creusé et n'a jamais été comblé.

Aujourd'hui, le réseau de transport d'électricité présente de telles faiblesses dans ses structures qu'elles mettent en cause la sécurité de l'alimentation électrique pour l'ensemble des usagers. Les moyens de production sont incontestablement inadéquats et pénalisent, par de nombreux dysfonctionnements, l'activité économique de la Martinique.

Cependant la politique actuelle d'investissement apparaît largement insuffisante pour combler les retards accumulés.
D'autant plus qu'elle se base sur des prévisions de croissance de la demande d'électricité pour les vingt prochaines années, déjà largement sous estimés par le passé, et qui apparaissent encore très en-dessous des besoins réels.

La loi de modernisation et de développement du service public de l'électricité de février 2000, qui énonce de grands principes du service public de l'électricité et propose les moyens d'améliorer la sécurité, la sûreté des réseaux et la qualité de l'électricité aurait dû permettre une remise à niveau des équipements.

Mais, outre que l'arrêté pris en application du décret relatif aux niveaux de qualité et aux prescriptions techniques prévu par la loi, n'a été pris qu'en 2007, il ne définit, pour les départements d'outre-mer, ni seuil ni critères d'évaluation des systèmes électriques. Ainsi, aucun outil de contrôle d'application de la loi n'a été mis en œuvre car la mention « réservée » figure dans l'arrêté pour tous les départements d'outre-mer.

Ces zones non interconnectées sont donc privées de toute référence en matière de niveau de qualité exigible contrairement aux zones métropolitaines. Il en résulte que, pour les quatre départements d'outre-mer, les dispositions prévues par la loi de février 2000 ne sont pas applicables en l'état. Pourtant le niveau de qualité et de sécurité de l'alimentation électrique exigé devrait représenter l'un des objectifs majeurs pour ces départements en « mal développement ».

Il apparaît aujourd'hui crucial de préciser pour l'outre-mer les critères d'analyse des systèmes de production, de transport et de distribution de l'électricité ainsi que les critères de contrôle de la qualité de la fourniture de l'électricité.

Il aimerait donc savoir précisément quand le Gouvernement compte combler le vide actuel et définir ces critères et ces niveaux de qualité pour l'outre-mer. Plus globalement il lui demande s'il n'y a pas lieu de prévoir en matière d'électricité, des moyens plus importants et plus adaptés aux impératifs de développement économique de nos régions d'outre-mer.

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Transmise au Ministère chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique


Réponse du Ministère chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique publiée le 01/12/2010

Réponse apportée en séance publique le 30/11/2010

M. Serge Larcher. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans mon département comme dans l'ensemble des départements d'outre-mer, la construction des équipements et des réseaux d'électricité a été réalisée avec un très grand retard par rapport à l'Hexagone.

L'écart du niveau d'équipement s'est progressivement creusé et n'a jamais été comblé.

Ainsi, le réseau de transport d'électricité présente aujourd'hui de telles faiblesses en Martinique que la sécurité de l'alimentation électrique pour l'ensemble des usagers n'est pas assurée.

Les moyens de production sont incontestablement insuffisants et la puissance installée cumulée de l'île ne respecte plus les standards usuels en production insulaire similaire.

Face à cette situation, la politique d'investissement apparaît aujourd'hui largement insuffisante. Elle repose, par ailleurs, sur des prévisions de croissance de la demande d'électricité pour les vingt prochaines années qui demeurent notoirement en deçà des besoins réels.

De nombreux dysfonctionnements pénalisent, de ce fait, l'activité économique de la Martinique.

Nombre d'entreprises se sont donc équipées de groupes électrogènes autonomes.

Pourtant, la loi relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité de février 2000 énonce les grands principes du service public de l'électricité et propose les moyens d'améliorer la sécurité des réseaux et la qualité de l'électricité. Elle aurait dû permettre une remise à niveau des équipements.

Cependant, l'arrêté pour l'application du décret relatif aux niveaux de qualité et aux prescriptions techniques prévus par cette loi n'a été pris qu'en 2007, et il ne définit, pour les départements d'outre-mer, ni seuils ni critères d'évaluation des systèmes électriques.

Pour tous les départements d'outre-mer, en effet, la mention « réservée » figure dans les champs à renseigner par l'arrêté.

En l'état, les dispositions prévues par la loi de février 2000 n'y sont donc pas applicables, alors que le niveau de qualité et de sécurité de l'alimentation électrique constitue un enjeu majeur pour ces territoires en mal de développement.

Ceux-ci sont privés de tout objectif en matière de niveau de qualité exigible.

Je souhaiterais donc, monsieur le ministre, connaître précisément les initiatives que le Gouvernement compte prendre afin de combler le vide actuel.

De plus, ne croyez-vous pas qu'il y a lieu de prévoir des moyens plus importants et mieux adaptés aux impératifs de développement économique de nos régions d'outre-mer ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.

M. Éric Besson, ministre auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé de l'industrie, de l'énergie et de l'économie numérique. Monsieur le sénateur, les réseaux électriques dans les départements d'outre-mer, contrairement aux réseaux en métropole, ne sont pas interconnectés à un réseau continental et n'ont donc pas l'avantage dont disposent les grands systèmes interconnectés pour faire face à d'éventuels aléas. En outre, les DOM connaissent une croissance importante de leur demande en électricité, entre 2,5 et 3 % par an en moyenne pour la Martinique.

Les contraintes qui pèsent sur les systèmes électriques dans les DOM sont fortement liées à ces deux spécificités.

L'augmentation croissante de la consommation est en effet à l'origine de fréquentes chutes de tension sur les réseaux, notamment pendant les heures de pointe. L'impact de ces chutes de tension sur la qualité de l'électricité est d'autant plus perceptible pour les usagers qu'il est accentué par le caractère isolé de ces réseaux insulaires.

La priorité pour la qualité de l'électricité dans les départements d'outre-mer réside donc dans un premier temps dans la réduction des chutes de tension. C'est pourquoi un arrêté spécifique a été pris le 24 décembre 2007 en application du décret de 2007 relatif aux niveaux de qualité, qui prévoit des dispositions à la fois pour les chutes de tension et les coupures d'alimentation sur les réseaux. Cet arrêté fixe des seuils précis concernant les niveaux de tension dans les DOM.

Dans un second temps, des seuils et des critères précis pour les coupures d'alimentation sur les réseaux devront également être arrêtés une fois la question des chutes de tension résolue.

La définition de ces critères nécessitera que des études soient menées afin de fixer des seuils techniquement réalistes.

Les prévisions de consommations pour les années à venir ne semblent pas sous-estimées par rapport aux besoins réels.

Ainsi, le bilan prévisionnel réalisé en 2007 pour la Martinique prévoyait une consommation de plus de 1700 gigawatts par heure en 2010, alors que la consommation effective cette même année devrait être de l'ordre de 1600 gigawatts par heure.

S'agissant de la politique d'équipement et de modernisation, il faut souligner que le niveau d'investissement par usager, pour les réseaux électriques en Martinique, est supérieur d'environ 50 % à celui qui est réalisé en métropole.

Le montant de ces investissements, pour la Martinique, atteindra 30 millions d'euros en 2012 et en 2013 – contre 25 millions d'euros actuellement –, afin notamment de renforcer l'alimentation de l'agglomération de Fort-de-France. Cet effort important est justifié par un programme de lutte contre l'aléa cyclonique mis en place en 2008, après le cyclone Dean, et par les prévisions de croissance de la consommation pour les années à venir.

J'ajoute que le Fonds d'amortissement des charges d'électrification constitue une aide supplémentaire à destination des autorités concédantes, à hauteur d'environ 17 millions d'euros par an pour l'outre-mer, dont plus de 2 millions d'euros par an pour la Martinique.

Mme la présidente. La parole est à M. Serge Larcher.

M. Serge Larcher. Je suis heureux que le Gouvernement ait pris des initiatives pour essayer de combler le vide dans lequel nous sommes depuis quelque temps. L'arrêté a été pris en 2007, mais, jusqu'à présent, il n'a eu aucun effet dans les départements d'outre-mer.

La fréquence des coupures de courant est inquiétante, monsieur le ministre, à tel point que, à l'heure actuelle, lorsque l'on regarde un film à la télévision, on n'est jamais sûr d'en voir la fin. Il s'agit d'un handicap très important pour un département à vocation touristique, quand les îles voisines, qui sont nos concurrentes, disposent d'un réseau électrique leur garantissant une qualité de fourniture nettement meilleure.

Par ailleurs, cette situation porte également préjudice aux ménages, car outre les chutes de tension et les coupures d'alimentation, on constate aussi des surtensions, qui provoquent des dégâts énormes en endommageant irrémédiablement des appareils électroménagers. Dans de tels cas, il est très difficile de faire admettre à EDF sa responsabilité.

Néanmoins, je ne désespère pas de l'amélioration de la qualité de la distribution du courant électrique à l'avenir. Il s'agit là d'une question essentielle, l'électricité étant un élément indispensable du développement, mais aussi du confort des ménages.

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