Question de M. ALFONSI Nicolas (Corse-du-Sud - RDSE) publiée le 17/12/2010

Question posée en séance publique le 16/12/2010

M. Nicolas Alfonsi. Ma question s'adressait à M. le Premier ministre, car lui seul, compte tenu de son autorité renouvelée, pouvait mettre un terme à la polémique qui est née à la suite à la décision récente du tribunal de Bobigny.

En outre, interroger M. le ministre de l'intérieur pourrait conduire ce dernier à récidiver une nouvelle fois : n'a-t-il pas déclaré à la suite des propos sensés et mesurés de M. le garde des sceaux qu'il « confirmait, revendiquait et assumait ses premiers propos » ?

Ainsi, le fait que les décisions de justice soient rendues au nom du peuple français ne semble pas avoir troublé, au moment même ou sont évoqués des projets de jury populaire dans les tribunaux correctionnels, M. le ministre de l'intérieur, qui, soucieux de soigner son image auprès des forces de police, a violé l'article du code pénal qui sanctionne le fait « de chercher à jeter le discrédit sur une décision juridictionnelle de nature à porter atteinte à l'autorité de la justice ». (Très bien ! sur les travées socialistes.)

Au demeurant, qui nous dit que les officiers de police judiciaire, confrontés quotidiennement à des situations difficiles – je tiens d'ailleurs à leur rendre hommage – et plus respectueux, sans doute, des décisions de justice que le ministre de l'intérieur,…

M. Roland Courteau. En effet !

M. Nicolas Alfonsi. … partagent le sentiment de ce dernier ? Qui nous dit qu'ils n'approuvent pas la sanction du tribunal de Bobigny, eu égard à la gravité des faits sanctionnés ?

M. Roland Courteau. Absolument !

M. Nicolas Alfonsi. Comme l'a souligné avec raison M. le Premier ministre, la décision d'engager des poursuites est due à une initiative du ministre de l'intérieur. N'est-il pas regrettable, dès lors, que cette initiative soit ruinée par les propos du même ministre, dont l'opinion publique retiendra le commentaire et non l'initiative.

S'arroger le droit de critiquer les décisions de justice est une faute, et même un délit, aggravé en l'occurrence par la qualité et le statut de celui qui s'exprime.

Il faut le dire et le répéter, l'état de droit s'impose aux ministres. Ces derniers doivent respecter le principe de la séparation des pouvoirs, lequel ne saurait être bafoué au bénéfice de considérations subalternes ou corporatistes,…

Mme Raymonde Le Texier. Très bien !

M. Nicolas Alfonsi. … quelle que soit la compréhension que nous pouvons manifester envers les policiers qui exercent leur métier dans des conditions difficiles.

M. le président. Veuillez poser votre question !

M. Nicolas Alfonsi. Il eût sans doute été préférable que M. le Premier ministre, plutôt que de rappeler la justice à ses devoirs, adressât semblable recommandation au ministre de l'intérieur.

Monsieur Baroin, pouvez-vous nous confirmer, sans remonter au Déluge, ou en tout cas à plus de dix ans en arrière comme vous l'avez fait voilà quelques instants, que des instructions ont été données à M. le ministre de l'intérieur pour l'inviter à plus de mesure, afin d'éviter que ne se reproduisent de tels dérapages, qui portent atteinte à l'idée que l'on doit faire de la justice ? (Applaudissements sur certaines travées du RDSE ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

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Réponse du Ministère du budget, des comptes publics , de la fonction publique et de la réforme de l'État publiée le 17/12/2010

Réponse apportée en séance publique le 16/12/2010

M. François Baroin, ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, je pourrais vous rappeler à nouveau que le Premier ministre a déclaré que les sept policiers qui ont été condamnés avaient commis des faits injustifiables. Je pourrais aussi vous rappeler que cette affaire est née de l'initiative du commissariat et de l'autorité hiérarchique qui a signalé les faits. Mais j'irai à l'essentiel.

Vous me dites de remonter moins loin que dix ans en arrière. Vous avez raison ! Arrêtons-nous donc ensemble à ce qui s'est passé voilà quelques jours.

Il faut tout de même beaucoup d'audace et un culot d'acier pour se draper dans une sorte de virginité en nous disant : « Vous, au Gouvernement, vous, à droite, vous vous comportez mal », alors que, voilà quelques jours, rue de Solférino, le « politburo » du PS a condamné par avance les observations du Conseil d'État, haute juridiction parfaitement inattaquable, au sujet de la situation du président de la région d'Île-de-France ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. David Assouline. Ça vole bas !

Mme Raymonde Le Texier. On persiste et on signe !

M. François Baroin, ministre. Vous appelez à plus de mesure ; nous appelons, nous, à plus de responsabilité partagée. (Vifs applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Jean-Pierre Sueur. M. Baroin méprise le Sénat !

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