Question de Mme CERISIER-ben GUIGA Monique (Français établis hors de France - SOC) publiée le 16/12/2010

Mme Monique Cerisier-ben Guiga appelle l'attention de Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur le statut réservé aux produits provenant des colonies israéliennes dans les territoires occupés palestiniens.

Le 25 février 2010, la Cour européenne de justice a statué que les produits en provenance des colonies israéliennes dans les territoires palestiniens occupés ne peuvent pas bénéficier du traitement préférentiel accordé aux produits israéliens en vertu de l'accord d'association Union européenne-Israël. Elle souhaiterait savoir quelles mesures elle envisage de prendre pour que ces produits agricoles et industriels cessent de bénéficier de l'exonération de droits de douane dans le cadre de l'accord du partenariat Union européenne-Israël : ces produits n'étant pas des productions du territoire israélien, ils ne sont pas concernés par l'accord.

Elle appelle également son attention sur la traçabilité géographique des produits commercialisés en France. En effet, issus de l'agriculture et de l'industrie des colonies israéliennes dans les territoires palestiniens occupés par l'armée israélienne, ils sont commercialisés en infraction à la 4ème convention de Genève.

Elle souhaite par conséquent que les mesures nécessaires soient prises pour que l'étiquetage des produits en provenance d'Israël et des territoires palestiniens spécifie leur provenance : Israël, colonies israéliennes, territoires palestiniens. Ces trois catégories permettraient au consommateur de connaître l'origine précise des biens concernés.

Elle lui demande si elle entend prendre les dispositions permettant au consommateur d'accéder à l'information qui lui est due et à la France de rappeler à Israël qu'il contrevient à la 4ème convention de Genève.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation publiée le 12/01/2011

Réponse apportée en séance publique le 11/01/2011

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Monsieur le secrétaire d'État, en exergue à ma question et pour mémoire, je rappelle que la France est membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU, qu'elle est signataire de la quatrième convention de Genève relative aux règles d'occupation militaire d'un territoire étranger et qu'elle est partie à l'accord de partenariat entre l'Union européenne et l'État d'Israël. Elle doit donc promouvoir le respect de tous ces instruments internationaux dans sa réglementation commerciale entre autres.

À ce titre, la France doit exclure la production des colonies israéliennes en Cisjordanie occupée des exemptions de droits de douane accordées actuellement aux produits israéliens.

Alors que l'extension des colonies provoque chaque jour exactions, spoliations, blessures et mort de civils palestiniens, la France ne peut pas continuer à ignorer le détournement des accords dont elle est partie en faveur de cette politique.

Agir ainsi, c'est apporter un appui concret à une politique de colonisation que l'on dénonce verbalement et contribuer à priver de tous les éléments de viabilité territoriale et économique le futur État palestinien, dont la France et l'Union européenne financent les institutions. En somme, cela revient à détruire d'une main ce que l'on prétend construire de l'autre.

Dans ce contexte, le statut réservé aux produits provenant des colonies israéliennes dans les territoires occupés palestiniens revêt un caractère déterminant. Je souhaiterais que vous me répondiez au nom du Gouvernement, monsieur le secrétaire d'État, sur les deux points suivants.

Le 25 février 2010, la Cour de justice de l'Union européenne a statué que les produits en provenance des colonies israéliennes dans les territoires palestiniens occupés ne peuvent pas bénéficier du traitement préférentiel accordé aux produits israéliens en vertu de l'accord d'association Union européenne-Israël. Qu'entend faire le Gouvernement pour que les produits agricoles et industriels en provenance de ces colonies cessent, en vertu de cet accord, de bénéficier de l'exonération de droits de douane ?

En outre, ces produits, qui sont issus de l'agriculture et de l'industrie des colonies israéliennes dans les territoires palestiniens, sont commercialisés en infraction à la quatrième convention de Genève. Une réelle traçabilité géographique des produits commercialisés constituerait un rappel fort et sans ambiguïté de la France à l'État d'Israël sur cet état de fait.

Je souhaiterais que l'étiquetage des produits en provenance d'Israël et des territoires palestiniens spécifie la provenance de ceux-ci : Israël, colonies israéliennes, territoires palestiniens. Ainsi, le consommateur pourrait connaître l'origine exacte des biens concernés et accéder à l'information qui lui est due.

Entendez-vous, monsieur le secrétaire d'État, donner des instructions pour mettre en place un étiquetage sans ambiguïté et lisible ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services, des professions libérales et de la consommation. Permettez-moi tout d'abord, monsieur le président, à l'occasion de cette nouvelle année, d'adresser à mon tour des vœux de pleine réussite à la Haute Assemblée. Je souhaite que la collaboration entre le Parlement et le Gouvernement soit fructueuse pour que cette année soit, pour les Français et pour notre pays, une année de sortie de crise réussie !

Madame la sénatrice, vous avez soulevé une question qui préoccupe tout le monde.

Je ne rappellerai pas l'accord euro-méditerranéen établissant une association entre les communautés européennes et leurs États membres, d'une part, et l'État d'Israël, d'autre part, car vous l'avez évoqué, pas plus que je ne rappellerai l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne rendu à propos de l'affaire Brita, que vous avez cité.

Il est parfaitement vrai, madame la sénatrice, que les produits originaires des territoires palestiniens ne peuvent pas bénéficier du régime tarifaire préférentiel instauré par l'accord entre l'Union européenne et Israël.

J'ajoute que, dans un avis aux importateurs publié au Journal officiel de l'Union européenne du 25 janvier 2005 énonçant des principes clairs d'indication du lieu de production, l'Union européenne a fait connaître sa position, qui consiste à refuser le régime préférentiel défini par l'accord Union européenne-Israël aux produits originaires des territoires palestiniens qui sont exportés par Israël dans l'Union européenne. Cette position est claire et sans ambiguïté.

Sur ces bases, les services douaniers français, comme les autres services douaniers européens, procèdent à des contrôles réguliers des certificats d'origine, en rejetant les certificats non conformes ou en signalant une origine hors du territoire israélien. Les importations dans l'Union européenne de produits originaires des implantations israéliennes situées dans les territoires palestiniens ne peuvent donc pas bénéficier des avantages tarifaires nés de l'accord Union européenne-Israël.

Vous avez ensuite soulevé, madame la sénatrice, la question de la traçabilité, une question évidemment essentielle à laquelle le Gouvernement attache une importance particulière. Moi-même, je prendrai des initiatives quant à l'appellation made in France, à la marque France et à l'appellation d'origine des produits en France, trois appellations qui concourent à assurer la traçabilité des produits. Toutefois, l'une des difficultés rencontrées, que l'on retrouve également dans le cas que vous avez évoqué, tient au fait que, au sein de l'Union européenne, le marquage de l'origine n'est pas obligatoire, la Cour de justice de l'Union européenne ayant indiqué à diverses reprises qu'une réglementation nationale rendant obligatoire le marquage de l'origine serait de nature à constituer une entrave aux échanges.

Pour cette raison, la France a dû supprimer l'obligation de mentionner l'origine dans le décret n° 86-985 du 21 août 1986 relatif à l'étiquetage des textiles.

De même, la Commission européenne a rejeté la demande de l'Irlande visant à réglementer à l'échelon national la mention du pays d'origine sur l'étiquetage des viandes de volaille, de porc et d'ovins dans la décision 2009/291/CE du 20 mars 2009.

En revanche, rien n'empêche les professionnels de fournir de façon volontaire des renseignements sur l'origine de leurs produits, en l'occurrence sur leur origine française.

Pour répondre à la question précise que vous m'avez posée, on ne peut que faire confiance à nos douaniers pour l'application d'une réglementation qui est aujourd'hui très claire à tous les niveaux de la chaîne, ce dont, visiblement, vous sembliez douter.

M. le président. La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga.

Mme Monique Cerisier-ben Guiga. Monsieur le secrétaire d'État, on peut toujours répondre que tout va pour le mieux et que rien ne pose problème !

Nous savons qu'un grand nombre des médicaments génériques que nous consommons en France sont produits dans des colonies israéliennes proches de Jérusalem, mais rien ne nous indique la provenance exacte.

Nous estimons, par conséquent, qu'il ne faut pas se voiler la face ! N'agissons pas comme nous l'avons fait pour le régime du président Ben Ali ! Il ne faut pas s'étonner des explosions de colère de la population à la suite des graves injustices qu'elle subit quand, pendant des années et des années, on a tout fait pour que ces injustices perdurent !

Une troisième Intifada n'aura peut-être pas lieu dans les territoires occupés ; mais, à l'instar de ce qui se passe actuellement en Tunisie contre le régime dictatorial du président Ben Ali, des soulèvements sporadiques se produiront, car le régime imposé aux Palestiniens par l'armée israélienne est du même ordre.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Madame Cerisier-ben Guiga, je ne vous suivrai pas sur ce terrain, car la comparaison est un peu osée !

Vous m'avez posé une question claire : les produits en provenance des colonies israéliennes dans les territoires palestiniens bénéficient-ils, sur le plan tarifaire, des conditions avantageuses accordées aux produits israéliens en vertu de l'accord d'association Union européenne-Israël ? Ma réponse, qui sera également très claire, est non !

Quant au sujet que vous avez évoqué dans votre réponse, il est d'une autre nature et ne relève absolument pas de la question posée aujourd'hui.

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