Question de Mme NICOUX Renée (Creuse - SOC) publiée le 21/04/2011

Mme Renée Nicoux attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative au sujet de l'épreuve d'histoire des arts au brevet des collèges.

Depuis la dernière rentrée scolaire, l'épreuve d'histoire des arts au brevet des collèges est devenue obligatoire sous la forme d'une épreuve orale de 15 minutes. Le bulletin officiel n° 32 du 28 août 2008 du ministère de l'éducation indique que cet enseignement a pour vocation « de donner à chacun une conscience commune : celle d'appartenir à l'histoire des cultures et des civilisations, à l'histoire du monde (...). L'enseignement de l'histoire des arts est là pour en donner les clés, en révéler le sens, la beauté, la diversité et l'universalité ».

Cependant, il apparaît que l'instauration d'une épreuve orale d'histoire des arts comme composante de l'évaluation du diplôme national du brevet, pose un certain nombre de difficultés et d'interrogations. En effet, au collège, aucun volume horaire n'est consacré spécifiquement à son enseignement et, surtout, aucune réelle préparation à l'épreuve orale n'est prévue, notamment par un encadrement des élèves permettant de les guider dans leurs recherches. D'après les textes en vigueur, c'est à l'équipe pédagogique de s'organiser elle-même pour dispenser cet enseignement transdisciplinaire et la préparation à cette épreuve qui nécessitera de la part des élèves « une grande autonomie, un travail personnel et de l'anticipation. Les élèves devront être capables de faire preuve de singularité en effectuant un tri efficace des informations à leur disposition ainsi qu'en étant capables de s'approprier des données et de les reformuler ».

Elle s'interroge donc sur la capacité d'élèves de 14 ou 15 ans à travailler en totale autonomie sans aucun accompagnement alors même que leurs aînés des classes de première en bénéficient dans le cadre d'épreuves similaires que sont les travaux personnels encadrés (TPE). De plus, les sujets ne dépassent-ils pas largement leurs compétences ? En effet, et pour ne citer qu'un exemple, certains élèves de troisième sont amenés à travailler cette année sur des sujets aussi divers et compliqués que « le corps et l'imaginaire au XXe siècle ».

Sans remettre en cause la pertinence de l'enseignement de cette matière ni l'utilité d'une évaluation, elle s'interroge sur la faisabilité d'une telle épreuve et sur son adéquation avec les compétences réelles d'un élève de troisième. Cette situation est, bien évidement, aggravée par la réduction draconienne des effectifs d'enseignants dans l'éducation nationale qui rend leur disponibilité très fortement amoindrie.

Elle craint donc, en l'état actuel des choses, que le manque d'accompagnement et de soutien produise l'effet inverse de celui escompté, à savoir un découragement et une démotivation des élèves en la matière, parfois sanctionnés par des mauvais résultats au brevet. De plus, ce mode d'enseignement et ce type d'épreuve contribuent à aggraver les inégalités car seuls les élèves bénéficiant d'un soutien au sein de leur cellule familiale parviendront à mener à bien les travaux demandés.

Elle souhaiterait donc connaître ses intentions pour que cet enseignement soit adapté au niveau des élèves et aux objectifs qu'il se fixe, et dispensé d'une manière plus encadrée, afin de permettre un égal accès à l'histoire des arts.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé de la jeunesse et de la vie associative publiée le 22/06/2011

Réponse apportée en séance publique le 21/06/2011

Mme Renée Nicoux. Madame la secrétaire d'État, je souhaite attirer votre attention sur les modalités de passage de l'épreuve d'histoire des arts au brevet des collèges.

Depuis la dernière rentrée scolaire, cette épreuve est devenue obligatoire sous la forme d'une épreuve orale de quinze minutes. Le Bulletin officiel n° 32 du 28 août 2008 du ministère de l'éducation nationale indique que cet enseignement a pour vocation « de donner à chacun une conscience commune : celle d'appartenir à l'histoire des cultures et des civilisations, à l'histoire du monde [...]. L'enseignement de l'histoire des arts est là pour en donner les clés, en révéler le sens, la beauté, la diversité et l'universalité ».

Cependant, il apparaît que l'instauration d'une épreuve orale d'histoire des arts comme composante de l'évaluation du diplôme national du brevet pose un certain nombre de difficultés et soulève des interrogations.

En effet, au collège, aucun volume horaire n'est consacré spécifiquement à son enseignement et, surtout, aucune réelle préparation à l'épreuve orale n'est prévue, notamment par un encadrement des élèves permettant de les guider dans leurs recherches.

D'après les textes en vigueur, c'est à l'équipe pédagogique de s'organiser elle-même pour dispenser cet enseignement transdisciplinaire et la préparation à cette épreuve qui demandera de la part des élèves « une grande autonomie, un travail personnel et de l'anticipation. Les élèves devront être capables de faire preuve de singularité en effectuant un tri efficace des informations à leur disposition ainsi qu'en étant capables de s'approprier des données et de les reformuler ».

Madame la secrétaire d'État, j'ai été enseignante et je m'interroge sur la capacité d'élèves de quatorze ou quinze ans à travailler en totale autonomie sans aucun accompagnement alors même que leurs aînés des classes de première en bénéficient dans le cadre d'épreuves similaires que sont les travaux personnels encadrés, ou TPE.

Au-delà de cette autonomie imposée, les sujets ne dépassent-ils pas largement les compétences des collégiens ? En effet, et pour ne citer qu'un exemple, certains élèves de troisième sont amenés à travailler cette année sur un sujet aussi compliqué que « le corps et l'imaginaire au XXe siècle ».

Je ne remets pas ici en cause la pertinence de l'enseignement de cette matière ni l'utilité d'une évaluation. Je m'interroge seulement sur la faisabilité d'une telle épreuve et sur son adéquation avec les compétences réelles d'un élève de troisième.

Comment les équipes pédagogiques peuvent-elles s'organiser en dehors de leurs heures de cours pour dispenser cet enseignement alors même que les réductions draconiennes des effectifs d'enseignants rendent leur disponibilité très fortement amoindrie ?

Madame la secrétaire d'État, je crains qu'en l'état actuel des choses le manque d'accompagnement et de soutien ne produise l'effet inverse de celui qui est escompté et n'aboutisse à décourager et à démotiver des élèves pour la matière, d'autant que ces derniers risquent d'être sanctionnés par des mauvais résultats au brevet.

De plus, ce mode d'enseignement et ce type d'épreuve contribuent à aggraver les inégalités sociales et scolaires, car seuls les élèves bénéficiant d'un soutien au sein de leur cellule familiale parviendront à mener à bien les travaux demandés.

Je souhaiterais donc connaître les intentions du Gouvernement pour que cet enseignement soit adapté au niveau des élèves et aux objectifs qu'il se fixe, et dispensé d'une manière plus encadrée, permettant ainsi un égal accès à l'histoire des arts.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, chargée de la jeunesse et de la vie associative. Madame la sénatrice, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser Luc Chatel, qui ne peut être présent ce matin.

À partir de 2008, avec l'introduction d'un enseignement obligatoire d'histoire des arts à tous les niveaux de la scolarité, l'école s'est fixée pour ambition de transmettre à chaque élève une culture artistique commune faite de références incontournables mais aussi d'éducation du regard, de l'oreille, de la sensibilité en général pour comprendre son environnement patrimonial.

Cet enseignement a été défini par l'arrêté d'organisation du 11 juillet 2008. Il s'agit d'un enseignement transversal porté par l'ensemble des disciplines dans la logique du socle commun.

Le ministère de l'éducation nationale est bien sûr conscient du caractère de nouveauté de cet enseignement et du défi que constitue sa mise en œuvre pour les professeurs comme pour les élèves.

Toutefois, en ce qui concerne plus précisément le collège, il n'est pas exact de dire que rien n'est fait pour organiser et pour dispenser cet enseignement.

D'abord, l'arrêté d'organisation précise que l'histoire des arts fait appel à toutes les disciplines – cela résulte de son caractère transversal –, mais aussi que l'histoire et les enseignements artistiques sont particulièrement concernés. À cette fin, l'histoire des arts représente désormais un quart du programme d'histoire et la moitié des programmes d'éducation musicale et d'arts plastiques.

En outre, ce même arrêté précise que l'enseignement de l'histoire des arts est organisé chaque année sur proposition du conseil pédagogique. Il s'agit bien d'une organisation et d'une mise en œuvre concertées, fondées sur une réflexion commune, et non d'une définition anarchique équipe par équipe, voire professeur par professeur.

L'introduction d'une épreuve d'histoire des arts au diplôme du brevet est le signe de l'ambition de l'éducation nationale pour cet enseignement. Optionnelle en 2010, cette épreuve est en effet devenue obligatoire depuis la session 2011.

Enfin, s'agissant de la préparation des élèves aux épreuves elles-mêmes, la note de service du 13 juillet 2009, qui définit les connaissances et les capacités destinées à être évaluées dans le cadre de cet oral, précise que l'épreuve porte sur un objet d'étude abordé pendant l'année. Ainsi, les élèves peuvent être amenés à commenter une œuvre proposée par le jury, ou à présenter une réalisation personnelle ou collective, dans les deux cas en rapport avec cet objet d'étude.

L'enseignement d'histoire des arts est un outil de démocratisation culturelle. En cette première année de généralisation, les services de l'éducation nationale ont été et restent extrêmement attentifs au déroulement de l'épreuve obligatoire au diplôme national du brevet.

Madame la sénatrice, vous pouvez être certaine que, si cela s'avère nécessaire, le ministère de l'éducation nationale veillera à affiner le cadrage de l'épreuve afin que les élèves retirent les fruits attendus de leur découverte des arts.

M. le président. La parole est à Mme Renée Nicoux.

Mme Renée Nicoux. Madame la secrétaire d'État, j'entends bien votre réponse quant à la nécessité de favoriser l'accès à la culture et de le démocratiser.

En revanche, l'organisation de l'épreuve et le travail que doivent fournir les élèves de troisième pour la préparer amènent à s'interroger.

J'ai pu constater auprès d'enfants de mon entourage les grandes difficultés auxquelles sont confrontés les élèves de troisième pour préparer cette épreuve : ils sont livrés à eux-mêmes pour travailler sur un sujet particulièrement complexe – le « corps et l'imaginaire au XXe siècle » –, digne d'un master de troisième cycle, en faisant appel, comme vous le disiez fort justement, madame la secrétaire d'État, à la transdisciplinarité. Ces jeunes éprouvent donc des problèmes non seulement pour comprendre le sujet en lui-même, mais aussi pour rechercher les œuvres adéquates au sein des différentes disciplines et pour voir comment les coordonner, les expliquer, les commenter. On demande même quelquefois aux élèves de présenter un PowerPoint, comme lors d'une épreuve d'un cycle bien supérieur !

Ma question portait donc non pas sur l'apprentissage en tant que tel, mais bien plutôt sur la manière dont les élèves de troisième sont préparés à cette épreuve, sachant que les élèves de première sont encadrés pour présenter des épreuves très similaires.

L'autonomie s'acquiert, elle n'est pas innée. Il est absolument nécessaire que ces élèves soient accompagnés pour préparer cette épreuve, qui est un élément positif du diplôme du brevet des collèges.

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