Question de M. MÉZARD Jacques (Cantal - RDSE) publiée le 05/05/2011

M. Jacques Mézard attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés, sur la situation inquiétante des services de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) dans le Cantal.

D'après le budget 2011 concernant la justice, le programme « Protection judiciaire de la jeunesse » (PJJ) enregistrera une perte de 140 postes ETPT (équivalent temps plein annuel travaillé). Ces 140 suppressions, sur le plan national, entraînent des transformations dans l'organisation des services, qui vont conduire à des fermetures de services, d'unités et de postes.

Il a été indiqué, par la direction nationale de la PJJ, qu'à la place des onze implantations actuelles en Auvergne, seules quatre, cinq ou six seraient maintenues. Ainsi, plusieurs implantations seront fermées dans les prochains mois ; celle d'Aurillac devrait rester fonctionnelle dans l'immédiat « par dérogation ». Cette situation est très préoccupante.

Jusqu'en 2009 la PJJ possédait une direction départementale dans le Cantal et un centre d'action éducative (CAE) basés à Aurillac. Depuis, la direction départementale a été supprimée au profit d'une direction territoriale qui dirige les quatre départements auvergnats depuis Clermont-Ferrand... À ce jour, le CAE d'Aurillac intervient sur l'ensemble du département.

Le CAE continue de jouer son rôle à titre « dérogatoire ». Cependant, il apparaît indispensable de pérenniser dans le Cantal un suivi éducatif de PJJ en « milieu ouvert » et une continuité du service public. Il est, en effet, manifestement impossible que le suivi soit réalisé de Clermont-Ferrand, sachant que cinq heures de route sont nécessaires pour un aller-retour Clermont-Ferrand – Aurillac… Il est important de tenir compte de la géographie du territoire.

En conséquence, il lui demande s'il envisage de pérenniser la situation du CAE d'Aurillac, qui exerce actuellement ses activités à titre « dérogatoire ».

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Réponse du Secrétariat d'État chargé de la jeunesse et de la vie associative publiée le 13/07/2011

Réponse apportée en séance publique le 12/07/2011

M. Jacques Mézard. Madame la secrétaire d'État, ma question concerne la protection judiciaire de la jeunesse dans le Cantal.

Relisant, voilà quelques minutes, l'excellent rapport spécial établi par notre collègue Roland du Luart sur la mission « Justice » du projet de loi de finances pour 2011, j'y relevais la perte de 140 postes affectant la protection judicaire de la jeunesse, la PJJ. Ces 140 suppressions d'emploi, sur le plan national, entraînent des transformations importantes dans l'organisation des services, qui vont conduire à des fermetures.

En Auvergne, il existe à ce jour un foyer de la PJJ dans le Puy-de-Dôme et onze implantations de « milieu ouvert » dans les quatre départements de la région, dont une seule dans le Cantal.

II nous a été indiqué, par la direction nationale de la PJJ, qu'à la place des onze implantations actuelles en Auvergne seules quatre, cinq ou six seraient maintenues. Ainsi, plusieurs implantations seront fermées dans les prochains mois. Celle d'Aurillac devrait rester fonctionnelle dans l'immédiat « par dérogation ». Cette situation est pour nous très préoccupante.

En effet, jusqu'en 2009, la PJJ possédait une direction départementale et un centre d'action éducative, un CAE, basés à Aurillac. Depuis, cette direction a été supprimée au profit d'une direction territoriale qui dirige les quatre départements auvergnats depuis Clermont-Ferrand. Il n'y a plus de directeur dans le Cantal ni d'adjoint administratif depuis 2009. Subsistent simplement, au sein du CAE d'Aurillac, un poste de responsable d'unité éducative, trois éducateurs, des vacations de secrétariat et de psychologue.

Dans son projet stratégique national, la direction de la PJJ se montre extrêmement zélée à mettre en œuvre les orientations de la révision générale des politiques publiques et prévoit de supprimer plus de la moitié des postes correspondant aux départs en retraite. Il y a des normes de viabilité des services en dessous desquelles elle organise la fermeture des structures.

Dans le Cantal, il n'y a que trois éducateurs qui accompagnent entre soixante et quatre-vingts jeunes, selon les périodes, dans autant de familles. Depuis 2009, le CAE d'Aurillac continue de jouer son rôle à titre « dérogatoire ». Or il est indispensable de pérenniser dans notre département un suivi éducatif de PJJ en « milieu ouvert » et une continuité du service public. Il est en effet impossible que le suivi soit réalisé de Clermont-Ferrand, sachant que cinq heures de route sont nécessaires pour un aller-retour Clermont-Ferrand-Aurillac et que, par le train, le trajet dure encore plus longtemps ; il n'y a pas de solution à ce problème de désenclavement. Il est donc essentiel de tenir compte de la géographie du territoire,

En conséquence, je vous demande, madame la secrétaire d'État, si le Gouvernement envisage de pérenniser la situation du CAE d'Aurillac, qui exerce actuellement ses activités à titre « dérogatoire ». Nous avons impérativement besoin de maintenir un suivi de proximité. Toute autre décision engendrerait des déplacements impossibles pour les jeunes et priverait les professionnels d'un travail de réseau élaboré au plus près des situations individuelles.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, chargée de la jeunesse et de la vie associative. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous prie de bien vouloir excuser M. le garde des sceaux, qui reçoit aujourd'hui les premiers présidents et les procureurs généraux.

Monsieur Mézard, la direction de la protection judiciaire de la jeunesse a pour objectif, dans le cadre de son projet stratégique national, de renforcer l'encadrement des mineurs les plus fragiles, les plus en difficulté, d'améliorer la qualité de leur prise en charge et d'assurer une exécution sans délai des décisions judiciaires.

La mise en œuvre de ces orientations entraîne des réorganisations qui ne signifient ni l'abandon d'un public en difficulté ni la remise en cause des missions, notamment la participation aux politiques publiques, mais qui conduisent à la mise en place de modalités d'intervention différentes. Les unités éducatives de milieu ouvert doivent être constituées de manière à garantir la qualité de la prise en charge des mineurs, le travail en équipe pluridisciplinaire, que vous avez évoqué, et la conduite de l'action éducative de façon continue.

Les dispositifs sont construits et évoluent de manière à répondre de façon rationnelle et équilibrée aux exigences et aux spécificités de chaque territoire, notamment des territoires ruraux, dans le respect des orientations fixées.

La décision d'installer une direction territoriale compétente pour plusieurs départements a pour objectif de rendre plus efficient le pilotage territorial. Cette réorganisation prend en compte le niveau départemental, notamment en ce qui concerne l'articulation des acteurs de la justice des mineurs. La direction territoriale d'Auvergne, créée le 1er janvier 2010 et basée à Clermont-Ferrand, a été renforcée par la création de trois postes : un responsable des politiques institutionnelles, un conseiller technique et une infirmière. Le pilotage des politiques menées sur l'ensemble du territoire auvergnat, notamment les relations avec les collectivités locales et les juridictions, a ainsi pu être consolidé.

Vous l'avez rappelé, l'unité éducative d'Aurillac est rattachée au service territorial éducatif de milieu ouvert sud-Auvergne, dont le siège est à Clermont-Ferrand. L'intervention dans le département du Cantal au bénéfice des mineurs suivis dans le cadre pénal n'a pas diminué depuis la réorganisation. Elle se fait au regard de l'activité du tribunal pour enfants et est concentrée majoritairement sur l'agglomération d'Aurillac ; elle continuera à être mise en œuvre à partir des locaux mis à disposition par le conseil général à Aurillac, avec comme objectif l'exercice de l'intégralité des missions dévolues au service public de la protection judiciaire de la jeunesse.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Madame la secrétaire d'État, vos propos ne m'ont pas rassuré. Déclarer que le travail de la protection judiciaire de la jeunesse continuera à se faire à partir des locaux du conseil général dans le Cantal n'est pas la réponse que j'attendais à la question précise que je vous ai posée.

Vous nous avez rappelé qu'il y avait une infirmière à Clermont-Ferrand ; je ne vois pas comment elle pourrait exercer dans les quatre départements si elle est obligée de faire cinq heures de route aller-retour. S'il n'est question que du maintien à disposition de locaux, ce n'est pas vraiment rassurant pour l'avenir !

J'attendais une réponse précise m'indiquant comment garantir la qualité du service et le travail en équipe, objectifs que vous avez vous-même mis en avant. Mais, madame la secrétaire d'État, comment ces objectifs pourraient-ils être atteints avec des distances de 180 kilomètres à parcourir et des trajets de cinq heures ?

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