Question de M. KERDRAON Ronan (Côtes-d'Armor - SOC) publiée le 19/05/2011

M. Ronan Kerdraon appelle l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative sur l'enseignement de la langue bretonne dans l'agglomération de Saint-Brieuc. En effet, l'offre d'enseignement du breton est en régression sur le territoire de l'agglomération briochine et la filière s'en trouve, aujourd'hui, menacée.

À la rentrée de septembre 2011, le lycée Ernest Renan annonce l'arrêt de l'option breton en seconde, ce qui signifie qu'il ne sera plus possible d'apprendre le breton dans aucun des lycées de Saint-Brieuc.

Pour ce qui concerne l'école primaire, la filière bilingue de l'école de Trégueux a été fermée à la rentrée de septembre 2010. À ce jour, il ne reste donc plus que deux lieux d'apprentissage du breton sur l'agglomération : l'école Diwan et l'école publique bilingue du Grand Clos, toutes deux localisées à Saint-Brieuc et enregistrant des effectifs en hausse.

S'il appartient aux parents de décider ou non que leurs enfants apprennent le breton, il est, en revanche, de la responsabilité des pouvoirs publics de faire en sorte que ce choix soit possible en organisant correctement l'offre d'enseignement.

Il lui demande donc quelles mesures il entend prendre afin de permettre d'assurer l'enseignement du breton dans de bonnes conditions dans l'agglomération de Saint-Brieuc.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé de la jeunesse et de la vie associative publiée le 13/07/2011

Réponse apportée en séance publique le 12/07/2011

M. Ronan Kerdraon. Madame la secrétaire d'État, je souhaite vous faire état de mes inquiétudes et, plus globalement, des craintes partagées par tous les acteurs de la promotion de la langue bretonne, au sujet des conditions d'enseignement du breton dans les établissements scolaires publics de l'agglomération de Saint-Brieuc dans les Côtes-d'Armor, dont je suis l'un des élus.

En effet, l'offre d'enseignement est en régression sur le territoire de l'agglomération, et la filière s'en trouve, de fait, menacée.

Pour ce qui concerne l'enseignement primaire, depuis la fermeture de la filière bilingue de l'école de Trégueux en 2010, ne subsistent que deux lieux d'apprentissage du breton : l'école Diwan et l'école publique bilingue du Grand-Clos, toutes deux localisées à Saint-Brieuc et enregistrant des effectifs en hausse.

Plus inquiétant encore, pour les enfants qui ont fait le choix de l'apprentissage de la langue bretonne dans l'une de ces deux écoles, les perspectives de poursuite sont très incertaines.

En effet, dans l'enseignement secondaire public, la seule possibilité restante est d'intégrer la filière bilingue du collège Jean-Macé, l'option « breton » n'étant prévue dans aucun des collèges de l'agglomération.

De plus, le rectorat de l'académie de Rennes vient de contraindre le lycée Ernest-Renan à mettre un terme à l'enseignement optionnel du breton en seconde. Par conséquent, il ne sera désormais plus possible d'apprendre la langue bretonne dans aucun des sept lycées de Saint-Brieuc.

Pour justifier cette décision, on nous explique que les effectifs sont en baisse, que les adolescents n'auraient plus d'appétit pour le breton.

Ces propos cachent mal l'absence totale de volonté des pouvoirs publics de promouvoir, de développer les langues régionales dans l'enseignement public. En effet, les études menées par l'Office de la langue bretonne prouvent, au contraire, que la demande d'apprentissage est bien réelle et qu'il suffirait de correctement l'accompagner pour voir repartir les effectifs à la hausse.

J'en veux pour preuve le fait que, sur la période 1999-2009, le nombre d'élèves bilingues ait plus que doublé, atteignant les 200 élèves, alors que la population scolaire totale diminuait dans le même laps de temps.

Autre statistique particulièrement révélatrice : le seul lycée privé du pays de Saint-Brieuc proposant l'enseignement optionnel du breton a vu ses effectifs tripler depuis 2004 !

Vous conviendrez donc que la baisse des effectifs sur laquelle se fonde le rectorat est très paradoxale et qu'elle cache vraisemblablement une réalité plus complexe, qui nécessite que l'on s'y intéresse vraiment.

En effet, s'il appartient aux parents de décider que leurs enfants apprennent ou non le breton, il est en revanche de la responsabilité des pouvoirs publics de faire en sorte que ce choix soit possible en organisant correctement l'offre d'enseignement de manière à assurer sa pérennité.

Madame la secrétaire d'État, ma question est donc simple : que comptez-vous faire pour permettre aux élèves qui le souhaitent d'apprendre le breton tout au long de leur parcours scolaire dans l'agglomération briochine ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Jeannette Bougrab, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative, chargée de la jeunesse et de la vie associative. Monsieur Kerdraon, tout d'abord, je vous prie de bien vouloir excuser Luc Chatel, qui ne peut être présent ce matin pour vous répondre.

L'éducation nationale consent un effort important en faveur de l'enseignement des langues vivantes régionales. Luc Chatel l'a d'ailleurs souligné ici-même le 30 juin dernier, à l'occasion de l'examen de la proposition de loi de votre collègue Robert Navarro.

Comme M. le ministre de l'éducation nationale l'a rappelé, cet effort passe par des programmes qui ont été profondément rénovés ces dernières années afin de permettre leur inscription dans le cadre européen commun de références pour les langues, par des modalités d'enseignement diversifiées et par les moyens, importants, que l'État consacre à cet enseignement.

Ainsi, en ce qui concerne le breton, sur lequel vous avez appelé l'attention du Gouvernement, 74 professeurs certifiés ont été recrutés depuis 1990 et 20 professeurs des écoles bivalents l'ont été à la session de 2010. Au total, au cours des dix dernières années, ce ne sont pas moins de 1 339 postes de professeurs des écoles qui ont été proposés dans le cadre de ces concours spéciaux, toutes langues régionales confondues. Si près de 200 000 élèves suivent en France un enseignement de langue et de culture régionales, ils sont près de 23 000 dans l'académie de Rennes.

En ce qui concerne l'agglomération de Saint-Brieuc, sur laquelle vous attirez notre attention, je vous confirme que l'enseignement optionnel de breton ne sera plus assuré au lycée Ernest-Renan pour une raison simple : l'extrême faiblesse des effectifs qui est constatée depuis plusieurs années.

Ainsi, le maintien de cette option à la rentrée de 2010 était conditionné à l'inscription d'au moins dix élèves. Or il n'y a eu que trois inscriptions. Les autorités académiques en ont donc tiré les conséquences en ne proposant plus l'enseignement du breton à la rentrée 2011. Vous noterez cependant que la filière bilingue du collège Jean-Macé est, quant à elle, maintenue malgré, là encore, la faiblesse des effectifs : trois élèves en quatrième, cinq en cinquième et trois en sixième.

Enfin, vous savez que des actions sont menées depuis plusieurs années par les services du rectorat, en liaison avec les collectivités territoriales, afin de créer un second site bilingue dans le premier degré public en complément du site de l'école du Grand-Clos. Malheureusement, aucune des pistes explorées, notamment à Ploufragan et Langueux, n'a pu aboutir en raison d'une demande parentale insuffisante. Cependant, les autorités académiques ont exprimé, à plusieurs reprises, leur volonté de mettre en place un second site dès que possible.

Vous le voyez, l'enseignement des langues régionales est loin d'être négligeable dans notre pays, et les moyens qui y sont consacrés, dans un contexte budgétaire difficile, permettent de répondre à la demande des élèves et de leurs familles, lorsqu'elle existe.

M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon.

M. Ronan Kerdraon. Madame la secrétaire d'État, je prends acte de votre réponse. Je dois tout de même souligner que, pour accroître le nombre, aujourd'hui effectivement faible, des élèves qui choisissent la langue bretonne en option, il faut prévoir des conditions correctes d'accès à cette langue, c'est-à-dire ne pas fixer l'enseignement du breton à dix-huit heures, par exemple, comme cela se fait dans certains établissements. On comprend, dès lors, que certains élèves ne fassent pas le choix de cette option…

J'ai bien noté qu'il y avait eu des avancées à la fois sur les programmes et sur les postes mis au concours. J'ai bien entendu également l'argument de la dépense budgétaire, qui n'est pas à prendre à la légère, j'en ai tout à fait conscience.

Cela étant, je voudrais rappeler que, depuis 2008, selon l'article 75-1 de notre Constitution, les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France. Si nous souhaitons sauvegarder et promouvoir ce patrimoine, ainsi que l'a souligné notre collègue Robert Navarro lors d'un débat récent, il est nécessaire de donner à nos enfants la possibilité de se l'approprier : il en va de la transmission de ce qui fait la richesse et la diversité de la France.

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