Question de M. KERDRAON Ronan (Côtes-d'Armor - SOC-EELVr) publiée le 28/10/2011

Question posée en séance publique le 27/10/2011

M. Ronan Kerdraon. Ma question s'adresse à M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé et concerne l'extrême malaise existant aujourd'hui au sein de Pôle emploi, au moment même où le nombre de chômeurs atteint le chiffre record de 2,78 millions.

Depuis plusieurs semaines, des manifestations et mouvements de grève des agents de Pôle emploi se multiplient à travers le pays. L'Ain, les Côtes-d'Armor, le Finistère, l'Indre-et-Loire, la Haute-Normandie, le Tarn-et-Garonne : autant de départements – et la liste n'est pas exhaustive ! – où s'exprime l'exaspération des agents de Pôle emploi.

Comment expliquer une telle contagion si ce n'est par un « ras-le-bol » des personnels face à une dégradation des conditions d'exercice de leur métier ?

Imposée par votre RGPP, la fusion de l'ASSEDIC et de l'ANPE était destinée à créer, nous avait-on dit, « un grand service de l'emploi performant ». Force est de constater aujourd'hui que, sur fond de crise et d'envolée spectaculaire du chômage, votre fusion est un échec.

Face à l'afflux des demandeurs d'emploi, la qualité des entretiens avec les conseillers s'est fortement dégradée : dans la plupart des agences, leur durée est tombée à un quart d'heure, contre une demi-heure auparavant. Dans ces conditions, il est impossible d'accompagner les personnes sur le fond ! Pis, nombre de conseillers, totalement débordés, n'arrivent plus à recevoir tous les demandeurs d'emploi. Avec un portefeuille de deux cents dossiers en moyenne, leur mission est tout bonnement impossible, même avec la meilleure volonté du monde.

Entre l'externalisation croissante des prestations de conseil aux chômeurs et la dématérialisation des services, les conseillers ont un sentiment de perte de sens généralisée.

Et ce sont les usagers qui en subissent les conséquences : défaut d'information sur l'indemnisation, erreurs qui les pénalisent financièrement, retards dans le traitement des dossiers, allongement des délais entre le licenciement et le premier entretien, déshumanisation du service à travers la plateforme téléphonique 3949.

Je tiens également, monsieur le ministre, à dénoncer le scandale des radiations massives, qui découlent de la politique du chiffre imposée à Pôle emploi. Tous les moyens sont bons pour les justifier, y compris l'absence de présentation à une convocation arrivée au domicile du demandeur plusieurs jours après la date prévue ou l'absence de réponse au bout de trois sonneries pour un entretien téléphonique…

M. Alain Gournac. La question !

M. Ronan Kerdraon. Ces quelques exemples pourraient paraître caricaturaux…

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Ils le sont en effet !

M. Ronan Kerdraon. … s'ils n'étaient le reflet d'une réalité qui privilégie le contrôle par rapport à l'accompagnement ou à la recherche de solutions adaptées au profil des demandeurs.

Au final, les agents de Pôle emploi sont sous pression avec, à la clef, l'augmentation du stress, la violence des usagers excédés et, malheureusement, le drame des suicides au travail.

M. Alain Gournac. Il continue !

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Posez votre question !

M. Ronan Kerdraon. Sans compter les arrêts pour maladie, qui se multiplient.

Surcroît de travail, dysfonctionnements multiples, perte de repères : les causes du mal-être sont nombreuses. (Protestations sur les travées de l'UMP.)

Monsieur le ministre, face à un tel désastre, les Français veulent une autre politique. Aussi, je souhaite connaître les mesures que vous comptez prendre – et il faut en prendre d'urgence – pour faire en sorte que le service public de l'emploi soit enfin à la hauteur des enjeux du temps présent. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. Jean-Louis Carrère. Ce gouvernement et sa majorité cassent tout ce qu'ils touchent !

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Réponse du Ministère du travail, de l'emploi et de la santé publiée le 28/10/2011

Réponse apportée en séance publique le 27/10/2011

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé. Vous venez de nous gratifier d'un bel aveu, monsieur le sénateur ! Vous êtes d'ailleurs si conscient du caractère totalement caricatural de vos propos que, à un certain moment, vous en avez complètement perdu le fil !

M. Didier Boulaud. C'est vous qui l'avez perdu, et depuis longtemps !

M. Xavier Bertrand, ministre. Si vous disiez juste, comment expliqueriez-vous que, depuis le début de l'année, le chômage des jeunes ait reculé de 6 % dans votre département des Côtes-d'Armor ? (Marques de satisfaction sur les travées de l'UMP.) Un tel résultat serait-il possible si la situation de Pôle emploi était à ce point catastrophique ? Je ne le crois pas. Ce résultat, on le doit à l'action menée sur le terrain ainsi qu'aux employeurs qui, dans votre département, donnent du travail aux jeunes !

Depuis le début de l'année, même si la situation n'est pas facile, le chômage des jeunes a légèrement reculé : de 2 %.

Bien sûr, ce progrès reste insuffisant.

M. Jean-Louis Carrère. Vous avez tout raté !

M. Xavier Bertrand, ministre. Mais, si vous n'étiez pas prisonnier d'un réflexe partisan, vous pourriez parfaitement signer la nouvelle feuille de route de Pôle emploi. Comme je l'ai exposé tout à l'heure en réponse à Chantal Jouanno, il s'agit de laisser davantage d'autonomie aux conseillers. Il s'agit, en étant plus réactif et en rendant des services plus précis aux entreprises, de rapprocher, encore mieux qu'aujourd'hui, l'offre et la demande.

M. Didier Boulaud. Ça sent vraiment la fin !

M. Xavier Bertrand, ministre. Si, depuis un an, les offres d'emploi satisfaites ont augmenté de 12 %, croyez-vous que cela soit dû au hasard ? Certainement pas ! C'est le fruit de la nouvelle politique que nous menons, beaucoup plus proche du terrain. Après définition d'une stratégie nationale, des plans d'action sont élaborés dans chacun des 340 bassins d'emploi, au plus près du terrain, dans votre département comme ailleurs.

Mais jamais vous ne reconnaîtrez ces avancées ! Car, au niveau national, vous avez choisi comme unique registre la critique et la promesse !

Mme Annie David. Et si l'on parlait plutôt de vos promesses non tenues ?

M. Claude Bérit-Débat. Vous êtes devant l'échec de vos propres promesses !

M. Xavier Bertrand, ministre. Mais cela ne fait pas une politique ! Car quelle est la politique de la gauche en la matière ? S'agit-il des emplois-jeunes de Mme Aubry dont M. Hollande ne veut pas ? Ou du contrat de génération de M. Hollande dont Mme Aubry ne veut pas ? Comme elle n'en voulait pas hier, je doute qu'elle en fasse dorénavant la promotion... (Protestations sur les travées du groupe socialiste-EELV. - Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Jean-Marc Todeschini. Hors sujet !

M. Xavier Bertrand, ministre. La vérité, c'est que vous n'avez rien à dire sur l'emploi ! En la matière, vous n'avez même aucune promesse à faire ! (Nouveaux applaudissements sur les travées de l'UMP.)

La situation est difficile, nous le savons comme vous, mais ce n'est pas en nous critiquant en permanence que vous gagnerez en crédibilité. On dirait que vous ne savez pas dans quel monde nous vivons, et que vous ne savez pas quelle crise nous affrontons !

Une chose est certaine : entre votre démagogie et notre action, les jeux sont loin d'être faits, monsieur Kerdraon ! (Très bien ! et vifs applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur plusieurs travées de l'UCR.)

M. Didier Boulaud. C'est la méthode Coué ! Vous me faites penser à un socialiste en 1992 !

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