Question de M. BAILLY Gérard (Jura - UMP) publiée le 24/11/2011

M. Gérard Bailly appelle l'attention de M. le ministre chargé des collectivités territoriales sur l'abus de normes appliquées aux collectivités locales. En 2010, la Commission consultative d'évaluation des normes (CCEN) a examiné 176 projets de textes réglementaires (118 décrets, 53 arrêtés et 5 ordonnances) dont le coût est estimé pour les collectivités à 577 millions d'euros pour une seule année. La conférence sur les déficits publics qui s'est tenue en 2010 avait conclu dans le sens d'un moratoire sur l'édiction des normes nouvelles. En juillet 2010, une circulaire précisait ses objectifs, sauf pour les normes commandées par des engagements internationaux de la France ou par l'application des lois.
Or les normes ne cessent de croître : équipements sportifs, fonctionnement des collectivités locales, services départementaux d'incendie et de secours (SDIS), restaurants scolaires, marchés publics, fonction publique, bâtiments publics ... n'en sont que quelques exemples. Au moment où l'endettement national et local atteint des sommets dangereux pour notre pays, il est nécessaire que la circulaire du 6 juillet 2010 soit appliquée.
Les normes sont coûteuses, elles sont un frein à la compétitivité et sont souvent difficiles à mettre en œuvre pour les collectivités. Il lui demande si les administrations ont bien eu les directives suffisantes de la part des différents ministères leur demandant de surseoir aux obligations qu'elles exigent pour les collectivités et si celles-ci ont été suivies d'effets.

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Réponse du Ministère chargé des collectivités territoriales publiée le 17/05/2012

L'inflation normative et les dépenses qu'elle génère sont une préoccupation majeure du Gouvernement qui a adopté toute une série de mesures pour mieux maîtriser le coût des normes sur les collectivités territoriales et les entreprises. Ainsi, les circulaires du Premier ministre en date des 6 juillet 2010 et 17 février 2011 ont prononcé un moratoire applicable aux normes réglementaires concernant les collectivités territoriales non commandées par un texte de rang supérieur. En outre, un Commissaire à la simplification a été désigné en novembre 2010. Placé auprès du Secrétariat général du Gouvernement, il est chargé de veiller à ce que l'impact des projets de normes sur les collectivités et les entreprises soit correctement anticipé et donne un avis au Premier ministre sur le bien-fondé des mesures proposées. Enfin, la circulaire du 7 juillet 2011 relative à la qualité du droit impose de nouvelles exigences dans l'élaboration de projets de réglementation : chaque projet de norme nouvelle doit désormais être soumis à un examen de nécessité et de proportionnalité aussi circonstancié que possible, au regard de ses effets prévisibles et des exigences de stabilité des situations juridiques. Ces orientations font écho aux préoccupations de la Commission consultative d'évaluation des normes (CCEN), instance de concertation entre l'État et les élus sur l'élaboration des normes qui les concernent. La CCEN assure un rôle de régulation des relations entre l'État et les collectivités territoriales en conduisant les administrations à s'interroger tant sur l'utilité de la norme proposée que sur sa « juste proportionnalité juridique et financière » pour les collectivités territoriales. La démarche d'évaluation préalable obligatoire, aujourd'hui généralisée, couvre les projets de loi conformément à la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008 et à la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009, ainsi que les projets de texte concernant les entreprises, en application de la circulaire précitée du 17 février 2011. S'agissant plus particulièrement des projets de loi concernant les collectivités territoriales, aux termes de l'article L. 1211-4-2 du code général des collectivités territoriales, « le Gouvernement peut consulter la CCEN sur tout projet de loi ou tout projet d'amendement du Gouvernement concernant les collectivités territoriales ». Cette consultation n'est pas obligatoire ; le Gouvernement en a fait usage pour la première fois lors de la séance du 5 janvier 2012, à l'occasion de laquelle la CCEN a examiné deux projets de loi, l'un relatif à la réforme du régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, l'autre portant diverses dispositions dans le domaine des transports et de la mer, qui ont tous deux reçu un avis favorable unanime de la commission. Par ailleurs, la démarche de « délégifération » entreprise par le président de la République et le Gouvernement en janvier 2011 a donné lieu au rapport sur la simplification des normes applicables aux collectivités locales de M. Éric Doligé, sénateur et président du conseil général du Loiret, remis au Président le 16 juin 2011 au terme de la mission qui lui avait été confiée en la matière. Une partie des 268 propositions formulées dans ce rapport a été transposée dans une proposition de loi (PPL) déposée par le sénateur Doligé le 4 août 2011. Son article 1er prévoit un « principe de proportionnalité et d'adaptation des normes à la taille des collectivités » à mettre systématiquement en œuvre dans le cadre des mesures réglementaires d'application des lois. La PPL propose ainsi d'insérer dans le code général des collectivités territoriales une disposition selon laquelle lorsque la loi permet de déroger à des normes à caractère obligatoire, la capacité financière des collectivités territoriales et de leurs groupements doit faire partie des critères au vu desquels la dérogation est possible. Le représentant de l'État dans le département autorise la dérogation au cas par cas après avis des commissions départementales compétentes dans la matière concernée. Toutefois, cette proposition de loi de simplification des normes applicables aux collectivités territoriales a fait l'objet d'un débat en séance publique le 15 février dernier, à l'issue duquel le Sénat a adopté (par 175 voix contre 166) une motion tendant à son renvoi en commission. Pour autant, le Gouvernement n'a pas abandonné cet objectif qui demeure une priorité. En effet, à l'issue de la conférence sur les finances locales qui s'est tenue au palais de l'Elysée le 10 février dernier, le Premier ministre a annoncé que le Gouvernement et les élus locaux se sont « mis d'accord sur la nécessité de faire un travail de réduction de ces normes, à la fois des normes existantes et s'agissant des normes à venir ». Un consensus a également été trouvé sur la nécessité de renforcer les pouvoirs de la CCEN afin de lui conférer un rôle plus déterminant en matière de maîtrise de l'impact des normes sur les dépenses locales. Enfin, le rapport remis au président de la République en mars dernier par M. le député Pierre Morel-A-l'Huissier sur la « simplification des normes au service du développement des territoires ruraux » souligne également les contraintes qu'un excès de normes peut générer sur les petites collectivités et défend également, parmi d'autres propositions, le principe de l'adaptation des normes aux circonstances locales. L'ensemble de ces orientations traduit la volonté du Gouvernement de lutter contre l'inflation normative et les coûts qui en résultent pour les collectivités et de permettre une plus grande souplesse dans l'application des normes en fonction des circonstances locales.

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