Question de Mme GILLOT Dominique (Val-d'Oise - SOC) publiée le 13/01/2012

Question posée en séance publique le 12/01/2012

Mme Dominique Gillot. Ma question s'adresse au chef du Gouvernement.

Ces dernières semaines, plusieurs ministres se sont évertués à ériger la politique universitaire en exemple de réussite du bilan Sarkozy.

La réforme de l'Université était votre priorité, pour « rendre l'enseignement supérieur plus compétitif ». Mais, comme dans d'autres domaines, les promesses n'ont pas été tenues, et, aujourd'hui, vous abusez les Français pour cacher ce qui est symbole de reniements, de mensonges et d'échecs. (M. Hugues Portelli s'exclame.)

Alors que le Gouvernement se vante d'avoir sanctuarisé le budget de l'enseignement supérieur, avec une démographie étudiante en croissance et de nouvelles obligations contractuelles, ce budget ne suit même pas l'inflation ! Le candidat Sarkozy promettait pourtant de l'accroître de 1 milliard d'euros par an pendant cinq ans !

M. Didier Boulaud. Eh oui !

Mme Dominique Gillot. Cette insuffisance de dotation débouche sur des gels de recrutements, voire des suppressions de postes et de filières par centaines.

De nombreux paramètres décidés sur le plan national échappent à la maîtrise budgétaire des responsables d'université.

Et, loin de les rendre autonomes, votre manière de faire prend leurs présidents en otage. Ou bien ils défendent leurs établissements et ils sont mis à l'index public, ou bien ils font des coupes claires que vous leur imposez sournoisement et ils sont instruments de vos basses œuvres. Dans les deux cas, ils sont humiliés.

La communauté étudiante est en voie de paupérisation accélérée. Ainsi, 40 % des étudiants renoncent à se faire soigner faute de moyens.

La mise en place du dixième mois de bourse, juste prise en compte de l'allongement de la scolarité, occulte la baisse de tous les autres dispositifs d'aide et d'accompagnement.

Et votre projet de TVA sociale appauvrira encore plus les étudiants, en grevant leur maigre pouvoir d'achat !

Faute de moyens, les CROUS, les Centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires, ne peuvent pas répondre aux besoins de logement étudiant, et ils devront augmenter les loyers dans les résidences universitaires pour compenser la baisse de leurs ressources.

Quant à « l'opération Campus », il est établi aujourd'hui que seul 1 % des crédits alloués ont été dépensés !

Enfin, comment qualifier l'effet désastreux de la circulaire Guéant, qui s'attaque aux étudiants étrangers ? (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Vous le savez, cette stigmatisation scandaleuse, traduite par une application administrative abusive et contraire à la loi de 2006, une loi défendue par le ministre de l'intérieur de l'époque, Nicolas Sarkozy lui-même, est en rupture avec la tradition intellectuelle française. (Même mouvement.)

M. David Assouline. Eh oui !

Mme Dominique Gillot. Au détriment de l'efficacité économique et diplomatique, vous mettez en place une restriction des flux migratoires des élites de ces pays, qui croient encore en la France, condamnant ainsi notre pays à rétrécir dans l'imaginaire de la communauté internationale.

Alors, de grâce ! Dans les cent jours qui vous restent, n'aggravez pas la situation !

Quand allez-vous abroger purement et simplement la circulaire Guéant, qui entache l'honneur de la France ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe écologiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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Réponse du Ministère de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration publiée le 13/01/2012

Réponse apportée en séance publique le 12/01/2012

M. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite d'abord répondre à M. Alain Anziani, qui me reprochait de solliciter le garde des sceaux pour exercer des poursuites contre l'auteur d'une diffamation.

Monsieur le sénateur, je ne crée pas un usage de droit extraordinaire ; j'applique simplement la loi, qui prévoit de passer par le garde des sceaux afin de poursuivre les auteurs de diffamation !

Mme Gillot a interpellé le Gouvernement sur les universités. Je le rappelle, c'est un effort sans précédent (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)...

M. Didier Boulaud. Un effort de baratin sans précédent !

M. Claude Guéant, ministre. ... qui a été réalisé en faveur de la promotion des universités depuis 2007.

Mme Dominique Gillot. C'est faux !

M. Claude Guéant, ministre. L'autonomie des universités était un principe de fonctionnement attendu par la totalité des universités !

M. Jean-Pierre Michel. N'importe quoi !

M. Claude Guéant, ministre. Et, je dois le dire, c'est pour nous un grand plaisir d'entendre aujourd'hui tous les présidents d'université exprimer leur satisfaction de pouvoir bénéficier de cette autonomie...

Mme Dominique Gillot. Ils sont menottés !

M. Claude Guéant, ministre. ... et choisir leurs professeurs ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP. - M. Vincent Capo-Canellas applaudit également. - Protestations sur les travées du groupe socialiste, du groupe écologiste et du groupe CRC.)

Il suffit de les écouter : tous, quelles que soient leurs préférences politiques, le disent !

M. Jean-Pierre Michel. C'est faux !

M. Claude Guéant, ministre. Les présidents d'université sont désormais maîtres du destin de leur établissement, avec le conseil d'administration. D'ailleurs, ils demandent même plus d'autonomie.

Vous avez aussi évoqué le plan Campus.

Mme Dominique Gillot. Seulement 1 % des fonds ont été utilisés !

M. Claude Guéant, ministre. Il est vrai que les procédures ont pu occasionner quelques retards dans la mise en œuvre du dispositif. Mais il n'empêche que ce plan aboutira à une rénovation de la consistance physique de nos universités. (M. Didier Boulaud s'exclame.) Enfin, nous aurons de l'interdisciplinarité ! Enfin, nous aurons une vie culturelle grâce à la rénovation de l'immobilier universitaire ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

Songeons aussi au programme de grands investissements. Les universités en profiteront largement ; les deux tiers du programme iront à l'université et à la recherche !

Mme Dominique Gillot. C'est faux !

M. Claude Guéant, ministre. Ne niez pas l'évidence : c'est la réalité des chiffres !

De même, l'augmentation des crédits des universités année après année a été considérable. Le budget de l'enseignement supérieur n'a pas été sanctuarisé ; il a été augmenté d'année en année !

J'en viens à la circulaire dite « sur les étudiants étrangers ».

M. Didier Boulaud. La circulaire Guéant !

M. Claude Guéant, ministre. Au risque de vous décevoir, je vous informe que la circulaire du 31 mai - beaucoup de personnes la commentent, mais très peu l'ont lue ! - ne porte absolument pas sur les étudiants étrangers. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.) Elle concerne l'immigration professionnelle ! (Même mouvement.)

Un sénateur du groupe socialiste. Menteur !

M. Claude Guéant, ministre. Et si elle fait allusion, il est vrai, aux étudiants étrangers, c'est simplement pour rappeler deux droits qui sont les leurs. D'une part, la situation de l'emploi ne leur est pas opposable. D'autre part, la loi de 2006 leur permet de changer de statut et de devenir des salariés pour acquérir une première expérience professionnelle et bénéficier ensuite d'un autre titre de séjour, afin de poursuivre leur expérience. La circulaire n'apporte aucune restriction à ces droits.

Il n'en demeure pas moins que les présidents d'université, les directeurs d'école ont effectivement fait part de ce que certaines demandes n'avaient pas été suivies d'avis positif. (Mme Dominique Gillot s'exclame.) Sans doute y a-t-il d'ailleurs une raison à cela. La tonalité restrictive de la circulaire en matière d'immigration professionnelle, que je ne renie pas, a pu entraîner des décisions trop rigoureuses.

C'est la raison pour laquelle une nouvelle circulaire est en cours de préparation. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Elle sera signée aujourd'hui ou demain. Cette circulaire, qui portera uniquement sur les diplômés étrangers, rappellera les droits spécifiques des étudiants étrangers ; elle rappellera également que la nécessaire maîtrise de l'immigration professionnelle ne doit pas porter préjudice à nos entreprises, ni à l'attractivité de notre enseignement supérieur. (Mme Dominique Gillot s'exclame.)

Aussi, la circulaire exposera un certain nombre de principes qui guideront l'action des préfectures, afin que les décisions prises soient conformes à la volonté du Gouvernement. Et cette volonté, c'est effectivement de développer l'attractivité de notre enseignement supérieur vis-à-vis de l'étranger.

Mme Dominique Gillot. C'est raté !

M. Didier Boulaud. Encore raté !

M. Claude Guéant, ministre. L'an dernier, nous avions 60 000 étudiants étrangers, soit 50 % de plus que trois ans auparavant. Et les changements de statut sont en augmentation de 20 % d'une année sur l'autre. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur plusieurs travées de l'UCR.)

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