Question de M. RAINAUD Marcel (Aude - SOC) publiée le 05/07/2012

M. Marcel Rainaud attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, au sujet du diagnostic à visée criminologique (DAVC).
Cet outil, décrété et imposé à la va-vite par le Gouvernement précédent dans sa politique que l'on peut qualifier de tout répressif et tout restrictif (budget, humain), a été présenté comme moyen d'harmoniser les prises en charge sur le territoire, de prévenir la récidive. Depuis un peu plus d'un an, il apparaît être en finalité un outil de fichage et loin de ses justifications premières de lutte contre la récidive.
Cet « outil de gestion des flux » est une application informatique permettant l'extraction de données statistiques, aux fins de pilotage des politiques pénales et de traçabilité des populations.
En interconnexion avec Cassiopée, le DAVC est non seulement « consultable » mais aussi « utilisable » par les magistrats, procureurs de la République, et le sera plus tard par les forces de l'ordre.
Il semble que ce logiciel ne permette pas d'évaluer les besoins des professionnels pour améliorer le suivi des personnes condamnées, mais que sa création réponde à une vision des politiques pénales et pénitentiaires :
politiques où le sens de la condamnation a été relégué à une vision stigmatisante des personnes placées dans les mains de la justice tout en réduisant le nombre de fonctionnaires.
Accélérant la déqualification professionnelle, substituant les relations personnelles de l'accompagnement vers une nouvelle étape de la vie du détenu nous nous engagerions là dans une gestion comptable et bureaucratique avec le DAVC.
C'est pourquoi, il lui demande si elle envisage de faire un bilan des outils déjà disponibles, et de revenir sur le DAVC pour en faire un outil pertinent, s'il devait exister, mais en le créant en étroite collaboration avec les professionnels.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 28/02/2013

La garde des sceaux, ministre de la justice, partage l'intérêt du parlementaire pour le service public pénitentiaire et attache une importance toute particulière à la situation des services pénitentiaires d'insertion et de probation (SPIP), acteurs institutionnels centraux dans le cadre de la prévention de la récidive. L'élaboration et la mise en œuvre du diagnostic à visée criminologique (DAVC) s'inscrivent dans le cadre des missions du SPIP qui doit s'organiser de manière à lutter efficacement contre la récidive en favorisant la réinsertion sociale. La prévention de la récidive est indissociable d'un travail d'évaluation des personnes placées sous main de justice (PPSMJ). À ce titre, il appartient aux personnels d'insertion et de probation de procéder à l'évaluation et à l'analyse de toutes les situations individuelles. Il est dès lors indispensable que les SPIP disposent d'outils d'évaluation leur permettant d'adapter la nature et l'intensité de leur suivi aux besoins des personnes suivies. Il est aussi nécessaire que soient développés des programmes de suivi des personnes sous main de justice adaptés à leurs problématiques ; ces outils auront aussi pour effet de favoriser le partage et une homogénéisation des pratiques sur l'ensemble du territoire. Ainsi, dans le cadre de la réflexion sur les missions et les méthodes d'intervention des SPIP, la direction de l'administration pénitentiaire a engagé dès 2008 un travail destiné à développer un outil commun d'évaluation des personnes placée sous main de justice (PPSMJ). Élaboré par des professionnels des SPIP et de l'administration centrale et expérimenté sur plusieurs sites, il s'agit d'un outil qui a fait l'objet d'ajustements et d'une communication régulière depuis sa première ébauche en 2008 jusqu'à son déploiement et sa mise en œuvre progressive en novembre 2011. Le DAVC n'a pas été conçu dans l'objectif d'évaluer les besoins des professionnels, mais permet d'évaluer la situation des PPSMJ, après un ou plusieurs entretiens individuels, et ainsi de dégager les axes de travail du SPIP. Il ne s'agit pas d'un outil permettant la « traçabilité des populations », mais d'une trame d'évaluation permettant d'adapter la prise en charge aux problématiques des personnes suivies afin notamment de mieux individualiser la peine et d'harmoniser les pratiques. De plus, l'accessibilité des données à caractère personnel collectées dans l'application « Application des peines probation insertion » (APPI) dans laquelle est intégré le DAVC et commune aux services d'application des peines et aux SPIP, est encadrée par décret, conformément à l'avis de la Commission Nationale Informatique et Liberté (CNIL). La garde des sceaux, ministre de la justice, s'est personnellement saisie du dossier. Elle indiquera prochainement les orientations données à l'ensemble des personnels d'insertion et de probation. Concernant l'interconnexion avec Cassiopée, la mise en place à titre expérimental par la direction des services judiciaires en janvier 2012 d'un flux d'échanges de données entre Cassiopée et l'application APPI a permis pour les services de l'application des peines de récupérer automatiquement les données saisies dans Cassiopée, en évitant ainsi la ou les re-saisies manuelles de données pouvant être source d'erreurs. Ce flux d'échanges a été généralisé à l'ensemble des juridictions fin juin 2012. Il s'agit donc d'une interface informatique qui permet l'intégration des données de Cassiopée vers APPI (à sens unique) relatives à l'identité des personnes condamnées (éléments complets d'état civil), aux infractions et aux peines d'emprisonnement prononcées par jugement du tribunal correctionnel. Il n'est pas possible de consulter le DAVC via l'interconnexion Cassiopée, l'accès au DAVC étant exclusivement réservé aux utilisateurs dument habilités de l'application APPI.

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