Question de M. LEFÈVRE Antoine (Aisne - UMP) publiée le 26/10/2012

Question posée en séance publique le 25/10/2012

M. Antoine Lefèvre. Ma question s'adressait à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Alors que se tient cette semaine à Paris, comme tous les deux ans, le salon international de l'alimentation, force est de constater que le made in France cher au ministre du redressement productif est aussi dans nos assiettes.

L'agroalimentaire est un atout important pour notre commerce extérieur, tout comme l'était notre agriculture. Je dis « était » car celle-ci a été devancée ces dernières années par ses voisines allemande et néerlandaise.

M. Alain Gournac. Eh oui !

M. Antoine Lefèvre. Notre agriculture a donc besoin d'un soutien ferme de nos gouvernants, et non de revirements successifs qui mettent à mal les prévisions de nos agriculteurs.

En effet, tout récemment, et au nom de la protection de la biodiversité, le ministre de l'agriculture, avec son collègue en charge de l'écologie, a informé la profession de sa volonté de porter de 3 % à 4 % sur les exploitations les surfaces qui doivent être occupées par des haies, jachères, plantations, pièces d'eau, etc. C'est ce qu'on appelle les surfaces en équivalent topographique, les SET.

À l'origine, ces éléments devaient représenter 1 % dans le dossier PAC. Ils sont passés à 3 % en 2011, avant d'être gelés en 2012.

Alors que la campagne 2012-2013 est déjà engagée, avec des programmes d'assolement déjà définis et des semences déjà commencées, un tel changement de règles va générer un manque à gagner certain pour les agriculteurs, sans aucune contrepartie.

Alors que les discussions pour la PAC 2014 sont sensibles en ce qui concerne son verdissement, une telle initiative tendant à réduire encore et sans préalable les surfaces cultivables est un signal prématuré.

En devançant une décision qui n'est pas encore prise, la France se retrouve donc, comme souvent, en distorsion de concurrence avec ses voisins, d'autant que la décision européenne n'est pas arrêtée.

Il semble, d'ailleurs, que vous auriez évoqué votre soutien à une hausse allant jusqu'à 7 % dans le cadre de la future PAC !

Aujourd'hui, les agriculteurs sont bien conscients des enjeux liés à l'environnement et à la biodiversité, mais ces initiatives ne doivent pas entraver la compétitivité de notre agriculture.

Je vous remercie donc, monsieur le ministre, de bien vouloir considérer les appels des agriculteurs qui vous demandent de renoncer à ce projet d'accroissement des SET, lequel va contribuer à tendre encore plus les marchés alimentaires. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. – M. Jean-Marie Bockel applaudit également. )

M. Bruno Sido. Très bien !

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Réponse du Ministère chargé de l'agroalimentaire publiée le 26/10/2012

Réponse apportée en séance publique le 25/10/2012

M. Guillaume Garot, ministre délégué auprès du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, chargé de l'agroalimentaire. Monsieur le sénateur, je veux d'abord présenter les excuses de Stéphane Le Foll qui, retenu au congrès de l'Association nationale des élus de montagne, l'ANEM, n'a pas pu être parmi nous aujourd'hui.

M. Pierre Charon. Il prend de la hauteur !

M. Guillaume Garot, ministre délégué. La France doit préparer l'avenir et, s'agissant de son agriculture, elle doit le faire en répondant aux enjeux économiques, mais aussi aux enjeux environnementaux pour conquérir une nouvelle compétitivité (Mme Isabelle Debré s'exclame.), alors que, vous ne l'ignorez pas, monsieur le sénateur, nous avons perdu tant de terrain depuis dix ans !

M. Bruno Sido. Oui ! Pourquoi ?

M. Guillaume Garot, ministre délégué. Après concertation avec l'ensemble des syndicats agricoles et des ONG environnementales et en plein accord avec la ministre de l'écologie, Delphine Batho, le ministre de l'agriculture, Stéphane le Foll, a décidé, à la fin du mois de septembre, de faire passer le seuil des SET de 3 % à 4 % pour l'année 2013.

S'il l'a fait, c'est pour la simple raison que, nous en sommes convaincus, l'agriculture doit inventer un nouveau modèle (Mme Corinne Bouchoux et M. Ronan Dantec applaudissent.) faisant de l'engagement environnemental un atout pour nos agriculteurs.

Nous soutenons et nous soutiendrons les agriculteurs pour relever ce défi environnemental. C'est bien le sens de cette décision. (M. Ronan Dantec opine.) Et je rappelle que, dans le cadre des négociations sur la réforme de la politique agricole commune, la Commission européenne propose que chaque exploitation respecte un pourcentage de 7 % de surfaces d'intérêt écologique.

Vous le savez, la France soutient cet objectif européen de parvenir à 7 %. Nous défendons par conséquent l'idée d'inclure non seulement des éléments topographiques comme les haies, mais aussi des cultures qui sont intéressantes d'un point de vue environnemental. (MM. Jean-Vincent Placé et Ronan Dantec applaudissent.) Cela concerne le lin, mais aussi le chanvre (Rires sur les travées de l'UMP.) ainsi que les légumineuses. J'ai parlé du chanvre. Je vois que cela vous fait sourire. Il n'y a pas matière à sourire : il s'agit bien d'agriculture ! (Exclamations sur les mêmes travées.)

M. Francis Delattre. Et en plus, il n'a pas le sens de l'humour !

M. Guillaume Garot, ministre délégué. Merci de votre attention, mesdames, messieurs les sénateurs ! (M. le ministre délégué regarde les travées de l'UMP.)

M. le président. Monsieur le ministre, il faut terminer.

M. Guillaume Garot, ministre délégué. En tout cas, c'est en travaillant de façon progressive et en restant toujours déterminés à agir dans ce sens que nous pourrons engager le changement pour une agriculture économiquement et écologiquement performante.

Je suis sûr, monsieur Sido, que nous obtiendrons un large accord du Sénat sur ce projet, sur cette ambition pour, tout simplement, réussir la mutation dont notre agriculture a besoin. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. - Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du groupe écologiste.)

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