Question de M. PLACÉ Jean-Vincent (Essonne - ECOLO) publiée le 08/11/2012

M. Jean-Vincent Placé attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur la situation alarmante des déserts médicaux dans le département de l'Essonne.

Le délitement de notre système de santé, amplifié ces dix dernières années avec l'instauration des franchises médicales, la casse du service public hospitalier, un reste à charge de plus en plus important pour les patients, la récente augmentation de la taxation sur les mutuelles et des dépassements d'honoraires toujours plus importants, poussent une part croissante de Français à retarder, voire à renoncer aux soins pour des raisons financières. De surcroît, la répartition inégale des professionnels de santé sur le territoire porte une grande responsabilité dans l'abaissement de la qualité du service public de santé en faisant apparaître des déserts médicaux aussi bien dans les zones rurales que dans les zones périurbaines et populaires.

Ainsi, le diagnostic francilien de l'agence régionale de santé d'Île-de-France présente les forces et faiblesses de l'offre régionale, laquelle est caractérisée par de nombreux déséquilibres touchant autant les professionnels(spécialistes, omnipraticiens, paramédicaux), les secteurs conventionnels (secteur1, secteur 2, honoraires libres), que le territoire régional (centre/périphérie, centre ville, banlieues, zones rurales). À cela s'ajoutent les difficultés liées au départ non remplacé de professionnels de santé dans les cinq prochaines années. Par ailleurs, la profession de médecin n'est pas la seule concernée, le même phénomène de tension est constaté pour les métiers d'infirmier, de sage-femme ou encore de masseur-kinésithérapeute.

Il souhaite porter à sa connaissance que le département de l'Essonne n'échappe pas au phénomène de baisse démographique des professionnels de santé. Ainsi parmi les vingt-neuf territoires franciliens qui devraient être reconnus déficitaires par l'ARS IDF, quatre concernent l'Essonne (Grigny, La Ferté-Alais, Méréville et Vigneux-sur-Seine) et parmi les vingt et un territoires complémentaires retenus comme fragilisés, deux se situent dans ce même département (Saint-Chéron, Morsang-sur-Orge).

La santé étant l'une des préoccupations majeures des Français et Françaises au même titre que l'emploi et le logement, et face à l'ampleur croissante des inégalités d'accès financières et territoriales aux soins primaires, il lui demande si elle envisage d'adopter des mesures pour que chacun et chacune, sur notre territoire, puisse accéder à une offre de soins de qualité, à une offre de soin de proximité et à une offre de soins financièrement accessibles.

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Réponse du Ministère chargé des Français de l'étranger publiée le 19/12/2012

Réponse apportée en séance publique le 18/12/2012

M. Jean-Vincent Placé. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la santé constitue l'une des préoccupations majeures des Françaises et des Français, au même titre que l'emploi et le logement.

Nous avons assisté ces dix dernières années à un délitement de notre système de santé du fait de l'instauration de franchises médicales, de la casse du service public hospitalier, d'un reste à charge de plus en plus important pour les patients, ou encore des dépassements d'honoraires toujours plus nombreux.

Ces politiques ont eu pour conséquence d'aggraver les inégalités de santé, poussant une part croissante de Français à retarder des soins, voire à y renoncer pour des raisons financières. Cette tendance au renoncement aux soins est amplifiée par la difficulté à obtenir un rendez-vous chez un professionnel de la santé, en raison du nombre décroissant de praticiens exerçant une activité libérale et de leur répartition inégale sur le territoire, à l'origine de l'apparition de ce que l'on appelle des « déserts médicaux ». Les zones rurales ne sont pas les seules concernées, et les zones périurbaines ou encore certains quartiers plus populaires apparaissent comme des zones sous-dotées en professionnels.

L'Île-de-France n'est pas épargnée par cette tendance qui est confirmée dans un document intitulé État de santé et inégalités sociales et territoriales : éléments de diagnostic francilien, dans lequel l'agence régionale de santé, l'ARS, présente les forces et faiblesses de l'offre régionale, cette dernière étant caractérisée par de nombreux déséquilibres touchant autant les professionnels eux-mêmes que le territoire régional.

À cela s'ajoutent les difficultés liées au départ en retraite des professionnels de santé qui risque de ne pas être compensé par l'installation de jeunes professionnels, ceux-ci se désintéressant de plus en plus de la médecine générale libérale, pour de multiples raisons. La profession de médecin n'est pas la seule concernée, le même phénomène de tension étant constaté pour les métiers d'infirmier, de sage-femme ou encore de masseur-kinésithérapeute.

Le département de l'Essonne n'échappe pas, lui non plus, au phénomène de baisse démographique des professionnels de santé. Ainsi, parmi les vingt-neuf territoires franciliens qui devraient être reconnus déficitaires par l'ARS d'Île-de-France, quatre sont situés dans l'Essonne : Grigny, La Ferté-Alais, Méréville et Vigneux-sur-Seine. En outre, parmi les vingt et un territoires complémentaires retenus comme fragilisés, deux appartiennent à ce même département : Saint-Chéron et Morsang-sur-Orge.

Face à l'ampleur croissante des inégalités d'accès financières et territoriales aux soins primaires, Mme la ministre des affaires sociales et de la santé a annoncé le lancement d'un pacte « territoire-santé », ce dont je me félicite.

Concrètement, madame la ministre, quelles mesures le Gouvernement compte-t-il adopter dans le cadre de ce pacte pour que chacune et chacun, sur notre territoire, puisse accéder à une offre de soins de qualité, une offre de soins de proximité et une offre de soins financièrement accessibles, notamment dans l'Essonne dont la population souffre également du manque de professionnels de santé ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée des Français de l'étranger. Monsieur le sénateur Jean-Vincent Placé, la question des déserts médicaux concerne tous les territoires, et pas seulement certains territoires ruraux isolés, comme vous l'avez noté. Les premières difficultés apparaissent aussi en zone urbaine. Celles-ci vont s'accroître rapidement si nous ne nous mobilisons pas, car un grand nombre de médecins vont partir à la retraite dans les prochaines années.

En moyenne, en France, près de 27 % des médecins généralistes installés ont plus de soixante ans, et à peine plus de 10 % d'entre eux ont moins de quarante ans La relève n'est donc pas assurée. Comme vous le soulignez, le département de l'Essonne, comme beaucoup d'autres départements, est situé sous cette moyenne : 31 % des médecins généralistes qui y sont installés ont plus de soixante ans, et seulement 7,5 % d'entre eux ont moins de quarante ans.

Vous le savez, les causes de ce phénomène sont multiples : notre pays ne connaît pas un manque global de médecins, mais ceux-ci sont mal répartis. Les jeunes médecins cherchent d'autres conditions d'exercice, en équipe, avec d'autres professionnels de santé, et souhaitent atteindre un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle.

Une mesure unique n'apportera pas de réponse satisfaisante. J'ajoute que, dans cette perspective, la coercition est une mauvaise solution et qu'elle ne fonctionnera pas. En revanche, c'est grâce à un ensemble de mesures coordonnées destinées à mobiliser l'ensemble des acteurs, professionnels, élus locaux et, bien sûr, services de l'État et de l'assurance maladie, que nous pourrons faire face à ces difficultés.

Ma collègue Marisol Touraine a présenté le pacte « territoire-santé », le 13 décembre dernier, dans la Vienne. Ce pacte comporte douze mesures fondées sur la mobilisation et l'incitation des professionnels de santé, pour répondre au problème des déserts médicaux.

La formation initiale doit être davantage ouverte pour inciter au choix de la médecine générale. La découverte au plus tôt de ce métier, notamment en parvenant à ce que 100 % des étudiants aient suivi un stage en médecine générale, permettra d'attirer plus d'internes vers cette spécialité majeure pour notre système de soins.

Le moment de l'installation est également stratégique. Il ne s'agit plus de multiplier les dispositifs d'aide, déjà très nombreux, il est maintenant temps de les faire connaître et de sécuriser les jeunes médecins, en les accompagnant dans leur installation.

Il faut aussi transformer en profondeur l'exercice des soins de proximité, avec la constitution d'équipes pluri-professionnelles, des transferts de compétences, le développement de la télémédecine. C'est grâce à une nouvelle organisation de ce type que nous pourrons attirer les jeunes.

Enfin, certains territoires isolés doivent faire l'objet d'un suivi tout particulier : les médecins salariés, les hôpitaux de proximité, les centres de santé doivent pouvoir venir en appui dans ces territoires isolés.

Ces solutions seront concertées au niveau national et régional, afin de les enrichir et les compléter éventuellement, pour permettre leur mise en œuvre rapide, dès 2013.

M. le président. La parole est à M. Jean-Vincent Placé.

M. Jean-Vincent Placé. Madame la ministre, je vous remercie de cette réponse précise et ancrée dans le réel.

Vous avez rappelé que Mme la ministre des affaires sociales et de la santé a présenté un pacte « territoire-santé », par lequel le Gouvernement s'est engagé sur trois objectifs : changer la formation et faciliter l'installation des jeunes médecins, transformer les conditions d'exercice des professionnels de santé et investir dans les territoires isolés.

Vous l'aurez compris, je serai très vigilant sur le respect de ce troisième engagement. Il s'agit en effet de garantir l'accès aux soins urgents en moins de trente minutes d'ici à 2015, de permettre aux professionnels hospitaliers salariés d'apporter leur appui aux structures ambulatoires, qui peuvent représenter une bonne réponse aux difficultés rencontrées aujourd'hui par les territoires isolés, d'adapter les hôpitaux de proximité et de responsabiliser les centres hospitaliers de niveau régional à l'égard de leur territoire d'implantation et, enfin, de conforter les centres de santé.

Tous les membres de la représentation nationale sont également attachés à l'objectif de la santé pour tous affiché par le Gouvernement.

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