Question de M. DAUDIGNY Yves (Aisne - SOC) publiée le 01/11/2012

M. Yves Daudigny attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social sur l'inquiétude des professionnels de l'artisanat face aux propositions de main d'œuvre étrangère provenant de l'Union européenne.

Des sociétés d'intérim démarchent les entreprises notamment dans le secteur du BTP, leur proposant des professionnels à des coûts horaires très inférieurs aux coûts pratiqués en France.

Pour les professionnels, ces pratiques s'apparentent à du dumping.

Il lui demande donc quelle initiative, dans le cadre européen, il entend prendre pour répondre à l'inquiétude des professionnels.

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Réponse du Ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social publiée le 31/01/2013

L'attention du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a été appelée sur l'inquiétude des professionnels de l'artisanat face aux conditions d'intervention sur le territoire national d'entreprises de travail temporaire établies dans un autre pays membre de l'Union européenne, notamment dans le secteur du BTP. Ces entreprises s'affranchissent des règles en proposant notamment leurs services à des coûts horaires très inférieurs à ceux pratiqués en France. Dans ce contexte, il convient de présenter les initiatives envisagées ou déjà prises par le gouvernement afin d'apporter les solutions attendues et de mettre fin à ces pratiques de dumping social qui engendrent une concurrence déloyale. Le code du travail encadre strictement les conditions d'intervention en France des entreprises établies hors de France, conformément aux dispositions de la directive européenne 1996/71/CE du 16 décembre 1996 concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services. La mise à disposition de salariés intérimaires par une entreprise de travail temporaire établie hors de France auprès d'une entreprise utilisatrice en France est un des quatre cas de détachement définis par le code du travail. À ce titre, le code du travail prévoit l'obligation pour les entreprises de travail temporaire établies hors de France d'être régulièrement immatriculées en tant que telles dans leur pays d'établissement et d'y exercer une activité significative. Elles doivent en outre justifier d'une garantie financière, afin d'assurer le paiement aux salariés détachés de l'intégralité des salaires dus pendant leur période de détachement. Les entreprises de travail temporaire établies hors de France sont également tenues de respecter à l'égard des salariés détachés en France l'ensemble des règles du code du travail relatives au travail temporaire. Ainsi s'appliquent notamment les règles françaises relatives à la durée des missions, aux cas de recours à l'intérim, à l'élaboration du contrat de mise à disposition et du contrat de mission et aux droits individuels des salariés en matière de conditions de travail (durée du travail, travail de nuit, jours fériés, repos hebdomadaire, sécurité et hygiène sur les lieux de travail) et de rémunération (les salariés mis à disposition doivent ainsi percevoir une rémunération au moins égale à celle que percevrait, après période d'essai, un salarié de l'entreprise utilisatrice de qualification équivalente et occupant le même poste de travail). Concernant les formalités à accomplir, les entreprises de travail temporaire établies hors de France doivent transmettre une déclaration préalable à l'inspection du travail du lieu d'exécution de la mission du salarié détaché. En matière de sécurité sociale, le règlement communautaire 883/2004 permet, sous certaines conditions, de limiter les changements de législation applicable pour de courtes périodes de détachement, en prévoyant le maintien de la législation de l'Etat d'envoi (ou Etat d'origine). Ainsi, en application de ce règlement, les entreprises prestataires établies hors de France (y compris les entreprises de travail temporaire) peuvent continuer à relever du régime de sécurité sociale de leur Etat d'établissement et y verser des cotisations sociales pendant et au titre de la période de détachement de leurs salariés en France. Enfin, l'entreprise utilisatrice en France, en sa qualité de donneur d'ordre, a l'obligation de se faire remettre par l'entreprise étrangère un certain nombre de documents préalablement à la conclusion du contrat de prestation de services dès lors qu'il porte sur un montant au moins égal à 3 000 euros. Sa responsabilité solidaire pourra être engagée s'il est prouvé qu'elle n'a pas accompli ces formalités et qu'un procès-verbal pour travail dissimulé est relevé à l'encontre de l'entreprise ayant détaché des salariés. Pour la bonne application de ces règles dans un contexte de libre circulation accrue des travailleurs au sein de l'Union européenne et compte tenu du constat de certaines pratiques de contournement du droit (exemple des entreprises « boîte aux lettres »), la Commission européenne a adopté en date du 21 mars dernier une proposition de directive visant à renforcer l'effectivité de la mise en œuvre de la directive de 1996. Cette proposition de texte prévoit différentes mesures destinées à permettre une information plus précise et plus accessible des acteurs du détachement, à préciser les critères du détachement et à faciliter le contrôle et les sanctions des entreprises qui ne respectent pas les droits des salariés détachés et les règles encadrant la prestation de service transnationale. Dans le cadre des négociations entre les Etats membres relatives à ce projet, le Gouvernement est extrêmement vigilant à sensibiliser l'ensemble des partenaires européens à la nécessité de mettre en place des mécanismes permettant de lutter efficacement contre les fraudes et les abus. En termes de contrôle, il convient de souligner que le secteur du BTP reste en 2011 le secteur le plus contrôlé (avec 41 % des contrôles) et le plus verbalisé (avec un taux d'infraction voisin de 15 %). En outre, en ce qui concerne le volet « prévention », plusieurs initiatives ont été engagées avec les partenaires sociaux dans le cadre du protocole sur la prévention du travail illégal et les bonnes pratiques de la sous-traitance dans le BTP, qui a été conclu le 25 octobre 2005 entre les ministères du travail et de l'équipement et plusieurs organisations professionnelles. Enfin le Gouvernement reste attentif à ce que la mobilisation des services soit encore renforcée dans les mois à venir, tant dans ses aspects préventif que répressif. À cet égard la commission nationale de lutte contre le travail illégal réunie le 27 novembre 2012 a dressé le bilan des actions déjà engagées par les services de l'Etat et les organismes de recouvrement des cotisations sociales et fixé les axes prioritaires du plan national d'action pour les années 2013 à 2015. Il doit être signalé que ce plan retient parmi cinq objectifs prioritaires le renforcement de la lutte contre les fraudes au détachement dans le cadre de prestations de services transnationales, notamment dans le secteur du BTP.

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