Question de M. MASSON Jean Louis (Moselle - NI) publiée le 08/11/2012

M. Jean Louis Masson attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le fait que l'article L. 2132-5 du code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit qu'un contribuable de la commune peut être autorisé par le tribunal administratif à ester au nom de la commune pour défendre les intérêts de celle-ci. Toutefois, le tribunal administratif ne peut donner son accord que si la commune a refusé d'exercer elle-même l'action en justice. L'application de cet article ne pose pas de problème, sauf lorsque l'action judiciaire au nom de la commune est susceptible de mettre en cause le maire ou un adjoint, notamment dans le cadre de poursuites pénales (corruption, détournement de fonds publics...). Dans ce cas, la majorité municipale essaye souvent d'utiliser un artifice pour empêcher l'article L. 2132-5 de s'appliquer. Pour cela, elle décide que la commune se porte elle-même partie civile, ce qui lui permet de priver le contribuable de toute action. Parallèlement, le maire demande à l'avocat de la commune de ne faire aucune diligence et de se comporter comme une partie civile dormante. Il n'y a alors plus d'action réelle et sérieuse pour défendre la commune. C'est d'autant plus regrettable que pour appliquer l'article L. 2132-5 du CGCT, la jurisprudence met d'ores et déjà des conditions strictes. Elle exige, d'une part, que l'intérêt en cause de la commune soit important et, d'autre part, que la procédure ait des chances sérieuses d'aboutir favorablement. Les actions intempestives ou fantaisistes sont ainsi rejetées d'office. Il n'est donc absolument pas nécessaire d'imposer en plus des conditions supplémentaires qui peuvent être dévoyées. Il lui demande s'il envisage de remédier au problème sus-évoqué.

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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 10/01/2013

En vertu de l'article L. 2132-5 du code général des collectivités territoriales (CGCT), « tout contribuable inscrit au rôle de la commune a le droit d'exercer, tant en demande qu'en défense, à ses frais et risques, avec l'autorisation du tribunal administratif, les actions qu'il croit appartenir à la commune, et que celle-ci, préalablement appelée à en délibérer, a refusé ou négligé d'exercer ». L'exercice par un contribuable local d'une action en justice qu'il croit appartenir à la commune est conçu comme un dispositif exceptionnel qui suppose un refus, explicite ou implicite, du conseil municipal d'exercer une telle action. Aussi, le refus du tribunal administratif d'accorder au contribuable local une autorisation d'exercer une telle action en justice est-il justifié dès lors que la collectivité a exercé celle-ci sous la forme d'une plainte avec constitution de partie civile (CE, 26 juin 1992, req. n° 137343). Toutefois, l'exercice formel d'une action en justice par la commune ne doit pas constituer une manœuvre en vue de mettre fin à toute possibilité d'action pour le contribuable local. Il en est ainsi lorsque le dépôt par une commune d'une plainte avec constitution de partie civile a pour objet de faire juger celle-ci irrecevable, l'avocat mandaté par la commune ayant reçu instruction du conseil municipal de démontrer l'absence de préjudice subi par la commune. Dans un tel cas de figure, l'action engagée par la commune vise un objectif contraire à celui poursuivi par le contribuable local consistant à faire reconnaître et réparer le préjudice financier subi par la commune. L'autorisation d'exercer l'action en justice doit ainsi être accordée au contribuable local dès lors qu'elle « n'est pas dépourvue de chance de succès et présente un intérêt suffisant pour la commune » (CE, 13 octobre 2003, req. n° 253804). Par ailleurs, l'article L. 2122-26 du CGCT prévoit que « dans le cas où les intérêts du maire se trouvent en opposition avec ceux de la commune, le conseil municipal désigne un autre de ses membres pour représenter la commune, soit en justice, soit dans les contrats ». Au regard des éléments précités, il apparaît que les dispositions du CGCT et leur interprétation jurisprudentielle permettent de garantir l'effectivité de la possibilité ouverte au contribuable local d'exercer une action en justice présentant un intérêt suffisant pour la commune, tout en limitant cette possibilité aux cas dans lesquels l'exercice d'une telle action s'avère justifié par l'absence de recherche par la commune de la réparation du préjudice en question. Le Gouvernement n'envisage donc pas de modification législative à ce stade.

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