Question de Mme ARCHIMBAUD Aline (Seine-Saint-Denis - ECOLO) publiée le 07/12/2012

Question posée en séance publique le 06/12/2012

Mme Aline Archimbaud. Ma question s'adresse à Mme la ministre déléguée chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion.

Le premier rapport de l'Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire, l'INJEP, en tant qu'Observatoire de la jeunesse et des politiques de jeunesse, présenté ce mardi 4 décembre, met en exergue un constat des plus sombres : on assiste à une fragilisation accrue de la jeunesse, à de forts risques d'exclusion et à un creusement des inégalités entre jeunes dans le contexte actuel de crise économique, dont ceux-ci sont les premières victimes. En effet, 15 % des jeunes ne sont ni en études, ni en formation, ni en emploi. Le taux de pauvreté des 18-24 ans atteint en moyenne 22,5 %. Au total, plus d'un million de jeunes sont désormais confrontés à une situation de grande précarité.

Le rapport montre également que les jeunes représentent 22 % de la population active, mais 40 % des chômeurs. En outre, l'augmentation du chômage de longue durée est particulièrement préoccupante chez ces jeunes. Par ailleurs, la réalité n'est pas uniforme : dans l'accès à l'emploi, le clivage se creuse entre diplômés et non-diplômés. Le taux de chômage des non-diplômés est de 46 % ; 30 % d'entre eux vivent sous le seuil de pauvreté.

Madame la ministre, je souhaite vous alerter sur le dispositif du RSA jeunes, qui, il faut le constater, est un échec total. La dotation de 27 millions d'euros pour 2013 a été fortement revue à la baisse du fait de l'important taux de non-recours. En effet, seuls 8 000 jeunes sur les 130 000 initialement prévus en bénéficient, soit 6 %. Le taux de non-recours est donc de 94 % !

Il faut reconnaître que les conditions requises pour y avoir droit sont totalement irréalistes. Il est exigé que les jeunes justifient d'une activité professionnelle de deux ans à temps plein sur les trois années précédant la demande. Quand on connaît la réalité, on comprend qu'il y ait si peu de candidats !

Si nous nous réjouissons de la mise en place des 150 000 emplois d'avenir, beaucoup reste à faire.

Madame la ministre, ma question est donc la suivante : quelle réforme du RSA jeunes envisagez-vous et que comptez-vous faire pour lutter contre la précarité et la paupérisation croissante et massive de la jeunesse ?

De nombreux points méritent d'être abordés lors de la conférence qui sera organisée par le Gouvernement la semaine prochaine. Concernant la jeunesse en situation de précarité, avez-vous notamment prévu d'évoquer la possibilité de mettre en place une allocation jeunesse donnant un minimum d'autonomie et de stabilité pour construire un projet, l'impulsion d'une aide forte pour l'accès à la mobilité, au logement et à la santé ou bien le droit à la formation ?

Sur ce dernier point, il est urgent de réfléchir à la mise en place pour les jeunes précaires d'un droit de tirage automatique à des formations de qualité dans les filières d'avenir. Tous les acteurs de l'insertion, les missions locales, les mouvements d'éducation populaire, insistent sur ce point. (Marques d'impatience sur les travées de l'UMP.)

M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.

Mme Aline Archimbaud. Nous connaissons bien les très grandes difficultés pour un jeune qui enchaîne les contrats de travail très courts, les stages non rémunérés et les périodes de chômage à avoir accès à de telles formations ; c'est même quasiment impossible. C'est pourtant une condition incontournable pour faire reculer le chômage. (Mêmes mouvements.)

M. le président. Je vous demande de conclure, s'il vous plaît.

Mme Aline Archimbaud. La jeunesse est l'avenir de notre pays. C'est un immense potentiel. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Jean Desessard. Elle avait des choses à dire, mes chers collègues !

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Réponse du Ministère chargé des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion publiée le 07/12/2012

Réponse apportée en séance publique le 06/12/2012

Mme Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Madame la sénatrice, vous avez raison de le souligner, tous les rapports sur la jeunesse sont alarmants. Nous le voyons tous, tous les jours : les jeunes sont durement frappés par la misère, par le chômage. L'avenir devrait pourtant leur appartenir. C'est le résultat non seulement de la crise, mais aussi de politiques et de dispositifs qui ne se sont pas révélés totalement adaptés à la situation et aux besoins des jeunes. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

C'est chez les jeunes que les inégalités sont les plus marquées. Il y a aujourd'hui des jeunes qui n'ont rien, ni emploi, ni formation, ni ressources. C'est vers eux que nous devons nous tourner en priorité. Il ne serait pas digne d'un pays comme la France de laisser tomber une partie importante de sa jeunesse. Nous devons donner une seconde chance à ceux qui ont décroché.

Vous le savez, la jeunesse c'est la priorité du mandat de François Hollande, c'est la priorité du gouvernement de Jean-Marc Ayrault. D'ailleurs, la première mesure que vous avez votée après l'élection présidentielle, ce sont les emplois d'avenir, qui répondent à la situation d'urgence de ces jeunes sans qualification qui ont besoin qu'on les aide pour démarrer dans la vie professionnelle.

Le contrat de génération sera lui aussi un levier très puissant pour favoriser l'emploi des jeunes. Mais nous n'en resterons pas là. Nous devons également être solidaires avec tous ceux qui ne peuvent pas entrer tout de suite sur le marché du travail.

Vous l'avez souligné, madame la sénatrice, le RSA jeunes est un échec. Il n'est pas adapté au public auquel il était initialement destiné. L'obtenir représente désormais une mission impossible. Il n'est lié à aucune mesure d'accompagnement qui permettrait aux jeunes de retourner sur le chemin de l'emploi. Sur les 130 000 jeunes qui étaient visés par le dispositif, seuls 9 000 y ont recours aujourd'hui. Nous devons tenir compte de cet échec.

Il est de notre responsabilité de trouver de nouvelles façons de soutenir les jeunes en difficulté, ceux qui n'ont ni formation ni emploi. Ce sera l'un des grands objectifs de la conférence dont vient de parler le Premier ministre. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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