Question de M. COURTEAU Roland (Aude - SOC) publiée le 14/02/2013

M. Roland Courteau attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre du redressement productif, chargée des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique, sur les dispositions relatives à la mise en œuvre de la réduction des délais de paiement prévues par la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie (LME).

C'est ainsi que les entreprises du bâtiment sont tenues de raccourcir les délais de paiement aux fournisseurs, tandis que les délais consentis aux clients sont maintenus ou allongés.

Il lui indique que de telles dispositions ne sont pas sans créer d'importants problèmes de trésorerie aux entreprises d'un secteur dont l'activité en forte baisse est de surcroît concurrencée par les offres anormalement basses des entreprises situées dans des États membres de l'Union européenne.

Il lui demande s'il est dans ses intentions de proposer de légiférer dans l'intérêt de ce secteur important et porteur de nombreux emplois mais fragilisé.

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Réponse du Ministère chargé des petites et moyennes entreprises, de l'innovation et de l'économie numérique publiée le 05/09/2013

La loi de modernisation de l'économie (LME) a réformé le cadre général applicable aux relations commerciales en introduisant le principe d'un plafonnement des délais de paiement convenus entre les parties à 45 jours fin de mois ou 60 jours date d'émission de la facture. Les bénéfices de la réduction des délais de paiement interentreprises sont unanimement reconnus, comme en témoignent les travaux de l'observatoire des délais de paiement. Toutefois, les entreprises du secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) peuvent se trouver confrontées à des problèmes de trésorerie en raison d'un déséquilibre entre des délais de paiement des fournisseurs, plus courts depuis la LME, et des délais de paiement des clients inchangés. Ainsi qu'a pu le relever l'observatoire des délais de paiement, dans ses rapports 2010 et 2011, les entrepreneurs du bâtiment peuvent ainsi être victimes d'un « effet ciseau » en matière de délais de paiement. Certains maîtres d'ouvrage soumis aux conditions de règlement prévues par le code de commerce, ne respectaient pas ces dispositions. C'est pourquoi l'article 121 IV de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification et à l'allègement des démarches administratives, rappelle que les professionnels opérant dans le secteur des marchés de travaux privés sont soumis aux plafonds des délais de paiement prévus par le code de commerce et issus de la LME. Ces plafonds s'appliquent au règlement des acomptes mensuels et du solde des marchés de travaux privés, mais ne s'appliquent pas à l'acompte à la commande, qui est payé selon les modalités prévues au marché. Concernant le solde des marchés de travaux privés, un protocole d'accord interprofessionnel a été conclu en juin 2010, qui recommande aux entreprises d'envoyer leur mémoire définitif simultanément au maitre d'œuvre et au maître de l'ouvrage dans un délai maximum de 45 jours à compter de la réception des travaux. Il est aussi recommandé aux maîtres d'ouvrage de régler le solde de chaque entreprise sans attendre d'avoir reçu l'ensemble des mémoires définitifs. Le secteur du BTP a développé une politique dynamique avec l'élaboration de chartes de bonnes pratiques, permettant d'améliorer les relations avec les maîtres d'ouvrage et d'anticiper les différends. En outre, les parties peuvent décider de soumettre leur marché aux normes édictées en la matière par l'AFNOR, qui constituent des documents de référence élaborés de manière consensuelle par les intéressés (par exemple la norme AFNOR NF P 03.001, dont l'article 20.3.1 prévoit le paiement des acomptes mensuels « à dater de la remise de l'état de situation au maître d'œuvre »). L'efficacité du plafonnement des délais de paiement a été renforcée par l'institution légale d'une exception d'inexécution au bénéfice de l'entrepreneur du bâtiment. L'article L. 111-3-1 du code de la construction et de l'habitation prévoit que lorsque l'entrepreneur n'est pas payé dans les temps, il peut suspendre l'exécution des travaux quinze jours après avoir, sans succès, mis son débiteur en demeure de s'exécuter. Par ailleurs, l'article L. 441-6 du code de commerce prévoit expressément que les pénalités de retard sont exigibles de plein droit et sans qu'un rappel ne soit nécessaire. Ainsi, tout retard de paiement doit entraîner le versement par le débiteur, en sus du principal, de pénalités de retard calculées sur la base d'un taux dont les planchers sont fixés par le code de commerce. Ces taux fixés à 10 points de plus que le taux BCE sont parmi les plus élevés d'Europe. Ces pénalités ne sont d'ailleurs pas exclusives de toute autre somme pouvant être obtenue à titre d'indemnisation. De plus, depuis le 1er janvier 2013, cet article prévoit, que « tout professionnel en situation de retard de paiement est de plein droit débiteur, à l'égard du créancier, d'une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, dont le montant est fixé par décret ». Cette indemnité a pour objet de compenser les frais de recouvrement exposés en cas de retard de paiement, et de décourager les paiements tardifs. Le décret n° 2012-1115 du 2 octobre 2012 fixe le montant de cette indemnité forfaitaire à 40 €. Le Gouvernement s'emploie en priorité à améliorer le dispositif existant de sanctions. Le Gouvernement a publié le 6 décembre 2012 un « pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi ». La troisième décision du second levier d'action de ce pacte établit un plan d'action pour lutter contre l'allongement des délais de paiement, dont une des mesures est de doter l'administration d'un pouvoir de sanction efficace pour obtenir le respect des délais de paiement légaux. Le 6 février 2013, le ministre de l'économie et des finances a présenté un plan pour le renforcement de la trésorerie des entreprises. L'action 9 du quatrième levier de ce plan tend à mieux sanctionner les retards de paiement par la mise en œuvre par l'administration, en l'occurrence la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), de sanctions administratives. À ce titre, un projet de texte a fait l'objet d'une consultation de l'ensemble des organisations professionnelles au début de l'année 2013. Au terme de cette consultation, le dispositif a été intégré dans le projet de loi sur la consommation, qui est actuellement en cours d'examen au Parlement. Ce dispositif permettra à l'autorité chargée de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, après constat, par procès-verbal des agents habilités de la DGCCRF, d'un manquement aux règles relatives aux délais de paiement, de prononcer une amende administrative, dont le montant maximum sera par infraction de 75 000 € pour une personne physique et de 375 000 € pour une personne morale. Il n'a pas paru opportun de donner suite à la proposition d'insertion dans la loi d'une disposition prévoyant le paiement à 30 jours des acomptes et du solde (soit un délai réduit de moitié par rapport aux dispositions du code de commerce). Il convient en effet de veiller à laisser au maître d'ouvrage un délai suffisant pour s'assurer de l'état d'avancement du chantier et de la qualité des travaux. Toutefois, la mesure n° 7 du plan d'investissement pour le logement, annoncé par le ministère de l'égalité des territoires et du logement le 21 mars 2013, a pour finalité de faciliter la gestion de la trésorerie des entreprises du bâtiment. Pour les marchés de travaux privés, il s'agit d'une part, d'inclure dans les délais de paiement des acomptes mensuels le délai de vérification du maître d'œuvre ou d'un autre prestataire dont l'intervention conditionne le paiement des sommes dues, et d'autre part, d'assurer que les maîtres d'ouvrage paieront chaque mois les travaux exécutés par les entrepreneurs sur la base des demandes de paiement mensuel qu'ils présentent. Ces nouvelles dispositions seront prochainement intégrées à l'article L. 111-3-1 du code de la construction et de l'habitation. Enfin, le recours à des solutions de financement alternatives pourra constituer une solution complémentaire aux problèmes de trésorerie rencontrés par les entrepreneurs. La mise en place de crédits de campagne, ainsi que le préconise l'observatoire des délais de paiement, répondent à ces problématiques. De plus, les difficultés que pourraient rencontrer les PME à se financer ont conduit le Gouvernement à prévoir la mise en place d'une banque publique d'investissement. Les ressources de cette banque peuvent être ciblées sur les défaillances de marché avérées.

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