Question de M. CLÉACH Marcel-Pierre (Sarthe - UMP) publiée le 28/02/2013

M. Marcel-Pierre Cléach appelle l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur la très vive inquiétude manifestée par l'ensemble des enseignants du privé suite aux dispositions que Mme la ministre des affaires sociales a indiqué vouloir prendre pour équilibrer leur régime additionnel de retraite.

Créé par la loi n° 2005-5 du 5 janvier 2005 dite loi Censi, ce régime additionnel a été adopté à l'unanimité par le Parlement. La loi Censi prévoit notamment un mécanisme permettant aux pensions du privé de rattraper en 20 ans celles du public. En effet, selon une étude réalisée en 2005 par son ministère, les enseignants des établissements privés disposaient en moyenne d'une pension de retraite inférieure de 20 % à celle de leurs collègues de l'enseignement public.

Il lui rappelle que depuis cette loi les enseignants du privé ont le statut d'agent de l'État, qu'elle est en parfaite adéquation avec l'esprit de parité inscrit dans la loi de 1959, dite loin Debré, et que lors de sa campagne électorale, le président de la République a indiqué ne pas vouloir remettre en cause l'école privée.

À ce jour, cette retraite additionnelle octroie aux enseignants du privé une prime de 8 % sur leur pension de base. En 2015, elle doit passer à 9 % puis à 10 % en 2020. Mais la situation financière de ce régime est aujourd'hui très préoccupante, ce qui a conduit la Cour des comptes à alerter par référé le Gouvernement sur le risque d'un exercice déficitaire du régime dès 2013 et d'un épuisement de ses réserves en 2019.

Pour remédier à cette situation, Mme la Ministre des affaires sociales indique dans son courrier réponse vouloir remanier en profondeur le régime à compter du 1er janvier 2013. Il est ainsi proposé : une action sur le taux de pension des maîtres ayant acquis des droits gratuits ; le gel du montant des pensions liquidées ; le gel du calendrier de la montée en charge du taux de pension en stabilisant son taux à 8 % (alors qu'il devait être porté à 10 %) et, enfin, un relèvement des cotisations des actifs.

Ces mesures drastiques, si elles devaient réellement être mises en œuvre, entraîneraient une perte de revenus substantielle des prestations de retraite et du salaire net des maîtres de l'enseignement privé sous contrat, et à terme, avec le gel, des pensionnés actuels. En réalité, de telles modifications porteraient gravement atteinte aux principes de parité entre les enseignants du public et ceux du privé, remettant ainsi en cause par voie de décret ou décision ministérielle, l'engagement de parité décidé à l'unanimité par la représentation nationale en 2005.

Pour terminer, il souhaite insister tout particulièrement sur le grand sentiment d'injustice et de défiance à l'égard des pouvoirs publics que susciteraient chez les enseignants du privé, l'adoption des mesures préconisées par Mme la ministre des affaires sociales.

En conséquence, il lui demande, d'une part, s'il entend agir afin que le Gouvernement revienne sur les annonces précitées et, d'autre part, ce qu'il compte faire pour que l'État assure les engagements pris par le Parlement vis-à-vis des maîtres du privé sous contrat.














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Réponse du Ministère de l'éducation nationale publiée le 04/04/2013

Le régime additionnel de retraite des enseignants du privé, créé par la loi n° 2005-5 du 5 janvier 2005, alloue un complément de retraite aux personnels enseignants exerçant dans les établissements privés sous contrat, avec l'objectif de compenser, à terme et à carrière comparable, l'écart de pension entre les enseignants du privé et du public. La pension additionnelle versée correspond à une fraction des pensions de base et complémentaires, fixée initialement à 5 % en 2005 et prévue pour être portée à 10 % en 2030. En 2006, le calendrier de montée en charge a été accéléré : le palier de 8 % est effectif depuis septembre 2010, au lieu de 2020 initialement. Les différents rapports sur la situation financière du régime soumis au comité de participation à la gestion du régime ont souligné son caractère structurellement déficitaire. Au 31 décembre 2011, les engagements non financés du régime atteignent 4,2 Md€ et ne sont plus désormais couverts qu'à hauteur de 5 % par les réserves constituées par le régime. Cette situation tient à l'attribution de droits à pension à des personnels n'y ayant jamais ou peu cotisé, que ne permettent pas de financer des cotisations à la fois stables et insuffisantes. Cette situation a été aggravée par l'accélération du calendrier de montée en charge du régime. À partir de 2013, les prestations servies annuellement seront supérieures aux cotisations encaissées par le régime. Sans réforme, ses réserves auraient été épuisées et le régime aurait été en faillite en 2019. La Cour des comptes, dans un référé rendu public le 30 octobre 2012, insiste sur l'urgence à prendre des mesures de redressement du régime. Le Gouvernement s'est engagé à prendre des mesures de redressement pour sauvegarder le régime et préserver ainsi l'objectif qui lui est assigné. Plusieurs réunions de travail ont associé les trois principales organisations syndicales des maîtres de l'enseignement privé sous contrat (SPELC, FEP-CFDT, SNEC-CFTC), membres du comité de participation à la gestion du régime additionnel de retraite, afin d'examiner différents scenarii de réforme. Les organisations syndicales ont rappelé les objectifs associés à la création du régime en faveur du rapprochement à terme des retraites versées aux enseignants du privé par rapport à leurs collègues du public et reconnu l'existence d'une situation financière très dégradée. Après consultation du conseil supérieur de l'éducation et du conseil national de l'enseignement agricole, le Gouvernement a mis en œuvre une réforme qui permet d'assurer la pérennité du régime. Elle s'est traduite juridiquement par le décret n° 2013-145 du 18 février 2013 relatif au régime additionnel de retraite des personnels enseignants et de documentation mentionnés aux articles L. 914-1 du code de l'éducation et L. 813-8 du code rural et par l'arrêté du 18 février 2013 modifiant l'arrêté 28 juillet 2006 pris pour l'application du décret n° 2005-1233 du 30 septembre 2005 relatif au régime additionnel de retraite des personnels enseignants et de documentation mentionnés aux articles L. 914-1 du code de l'éducation et L. 813-8 du code rural. Les mesures de réforme arrêtées par le Premier ministre et contenues dans ces textes visent un partage équitable de l'effort entre les bénéficiaires actuels et futurs du régime, sans exclure un effort financier de l'État, à travers une hausse de cotisation et dans des limites compatibles avec les équilibres budgétaires. Ces mesures consistent à stabiliser la fraction déterminant la pension additionnelle à 8 % et à prendre en compte la durée de cotisation au régime en limitant cette fraction à 2 % pour les périodes non cotisées au régime. Par construction, la part des droits cotisés au régime s'accroît chaque année de sorte que la réforme du régime additionnel étale sur un horizon de moyen terme l'objectif de niveaux de pensions similaires à carrière comparable entre maîtres du privé et enseignants du public. Il est également prévu un gel de la pension additionnelle tant que le ratio d'équilibre du régime n'est pas atteint et une augmentation à 2 % du taux de cotisation fixé actuellement à 1,5 %, partagé pour moitié entre l'État et les enseignants. Le Gouvernement a entendu les organisations syndicales représentatives des maîtres de l'enseignement privé sous contrat s'agissant notamment des modalités de mise en œuvre de la réforme. En effet, cette dernière entrée en vigueur le 21 février 2013, comporte une disposition transitoire qui permet le maintien des règles de calcul antérieures pour les bénéficiaires remplissant, avant cette date, les conditions d'ouverture des droits à la pension additionnelle, quelle que soit la date prévisionnelle de leur départ. L'attention doit être appelée sur le fait que la mise en œuvre de la réforme n'entraînera aucune diminution des pensions versées aux allocataires actuels du régime. Au total, l'ensemble de ces mesures permettra de préserver la viabilité d'un régime qui n'est remis en cause ni dans sa nature ni dans les objectifs ayant présidé à sa création.

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