Question de M. TROPEANO Robert (Hérault - RDSE) publiée le 12/04/2013

Question posée en séance publique le 11/04/2013

M. Robert Tropeano. Monsieur le président, mesdames, messieurs les membres du Gouvernement, mes chers collègues, la crise de la viande de cheval résulte de l'accumulation d'évolutions inacceptables au cours de ces dernières années, qui ont aussi conduit les agents de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, à manifester samedi dernier à Paris.

Il faut rappeler ici que ces agents ont joué un rôle crucial dans la révélation de ces fraudes, fraudes qui témoignent de pratiques peu scrupuleuses dans l'industrie agroalimentaire, mais aussi de carences dans les réglementations françaises et européennes.

Ces agents accomplissent un travail remarquable qui mérite d'être salué. Or ils sont aujourd'hui gagnés par la colère et le découragement, et on peut les comprendre ! Depuis 2007, 560 postes ont été supprimés. Résultat, les 3 000 agents qui couvrent aujourd'hui l'ensemble du territoire national ne peuvent plus assurer correctement leurs trois missions essentielles, que sont la sécurité des consommateurs, leur protection économique et la régulation concurrentielle des marchés.

Conséquence directe de la diminution drastique des moyens humains et financiers, le nombre de contrôles effectués par la DGCCRF est en chute libre, baissant de 13 % en 2012. Dans certains départements, le nombre d'agents a été divisé par plus de trois depuis 2009. Ainsi, dans l'Aude, département cher à nos collègues Roland Courteau et Marcel Rainaud, où les fraudes dans l'affaire de la viande de cheval ont été constatées, un seul agent est affecté aux contrôles alimentaires !

La réforme de la DGCCRF enclenchée en 2008 a, de surcroît, conduit à une désorganisation totale des services. Les agents sont désormais répartis entre les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi et des directions départementales de la protection des populations. À un organigramme particulièrement complexe s'ajoute l'absence de mise en réseau rapide et efficace des informations. Cette inertie, directement liée à la nouvelle organisation, affaiblit les conditions d'exercice des agents de la DGCCRF.

C'est pourquoi il est indispensable non seulement d'accorder à ces agents des moyens supplémentaires, mais aussi d'engager un retour à une organisation plus efficace et cohérente. C'est une condition sine qua non pour permettre à la DGCCRF de remplir pleinement ses missions de service public, ô combien primordiales pour nos concitoyens.

Monsieur le ministre, quelles dispositions comptez-vous prendre pour permettre à la DGCCRF de fonctionner correctement et d'assumer pleinement ses missions de contrôle et de protection ? (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur certaines travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC.)

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Réponse du Ministère chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation publiée le 12/04/2013

Réponse apportée en séance publique le 11/04/2013

M. Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation. Monsieur le sénateur, votre question est double.

Vous m'avez interrogé, d'une part, sur la nécessité de renforcer les effectifs de la DGCCRF, de façon à ce que ses agents remplissent correctement leur mission sur le terrain et soient en mesure d'effectuer les contrôles qui leur sont demandés.

Vous m'avez interrogé, d'autre part, sur la manière de renforcer aujourd'hui les pouvoirs de cette administration pour qu'elle fasse mieux respecter les procès-verbaux qu'elle dresse et les injonctions qu'elle adresse aux différentes entreprises.

La réalité, c'est que l'affaire de la viande de cheval a révélé la diminution de la présence des agents de la DGCCRF sur le terrain, conséquence d'un double mouvement, fruit notamment d'une mise en œuvre assez absurde de la RGPP, qui a entraîné une réduction de 16 % des effectifs au sein de cette direction au cours des cinq dernières années. (Protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Éric Doligé. Et qui supprime les sous-préfectures ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Mesdames, messieurs les sénateurs, on peut vouloir mener une politique de réduction de la dépense publique sans pour autant être sots au point de renoncer à des choix aussi prioritaires que la protection des consommateurs contre la tromperie économique !

C'est la raison pour laquelle je me réjouis que M. le ministre de l'économie et des finances ait demandé, pour l'année 2013, la stabilisation des effectifs de la DGCCRF, en dépit du fait que cette direction n'était pas prioritaire et que toutes les administrations devaient contribuer au financement des créations de postes dans la police, la gendarmerie et l'éducation nationale.

Nous avons donc maintenu les effectifs, mais nous devons aussi subir les conséquences de la RéATE, c'est-à-dire la réforme de l'administration territoriale de l'État, que, là encore, le précédent gouvernement a souhaitée, et qui a séparé les missions en deux niveaux territoriaux distincts, et en deux départements interministériels distincts.

En conséquence, nous avons aujourd'hui une désorganisation des services, une chaîne de commandement qui a été remise en cause et une baisse de 13,5 % des contrôles sur le terrain.

Or la Commission européenne exige aujourd'hui des services de la DGCCRF qu'ils remplissent de nouvelles missions de contrôle.

M. Gérard Cornu. Autrement dit, encore l'Europe !

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Nous avons nous-mêmes voulu que les filières viande et poisson soient mises sous surveillance après l'affaire Spanghero.

C'est la raison pour laquelle nous souhaitons aujourd'hui que les effectifs de la DGCCRF soient revus et que l'organisation territoriale mise en œuvre dans le cadre du Comité interministériel pour la modernisation de l'action publique, ou CIMAP, tienne compte des défauts qui ont été hérités du précédent gouvernement. (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)

Je me réjouis de constater que vous reconnaissez un tant soit peu vos erreurs, mesdames, messieurs les sénateurs de l'opposition ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

M. le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre délégué.

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je suis sûr que vous nous soutiendrez quand il s'agira de renforcer les pouvoirs de la DGCCRF, vous qui êtes toujours champions pour donner des leçons ! (Brouhaha sur les travées de l'UMP.) Vous voterez certainement le projet de loi relatif à la consommation pour faire en sorte que, demain, nous ayons davantage de sanctions administratives et que nous puissions punir les entreprises qui fautent. Ainsi, grâce à vous, le crime arrêtera de payer ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste. - Protestations continues sur les travées de l'UMP.)

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