Question de M. SUEUR Jean-Pierre (Loiret - SOC) publiée le 11/07/2013

M. Jean-Pierre Sueur appelle l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur la prise en compte du droit des auteurs dans le cadre des dispositions prévues par la loi n° 2012-287 du 1er mars 2012 relative à l'exploitation numérique des livres indisponibles du XXe siècle. Cette loi dispose qu'un livre publié en France avant le 1er janvier 2001 est qualifié d'indisponible s'il n'est plus commercialisé ni publié sous forme numérique ou imprimée. Ces livres « indisponibles » sont alors inscrits automatiquement, par la Bibliothèque nationale de France dans la base de données publique « RElire » en accès libre et gratuit. Une inscription de plus de six mois à cette base de données entraîne la récupération de l'exercice des droits numériques par une société de gestion collective agréée par le ministère, la société française des intérêts des auteurs de l'écrit (SOFIA), qui dispose seule de la reproduction ou de la représentation sous forme numérique de l'ouvrage, sans que les auteurs ne soient ni consultés, ni avertis. En outre, la possibilité de s'opposer à l'inscription d'une œuvre est rendue très complexe par la procédure actuelle, les auteurs ne disposant que d'un délai de six mois pour en demander le retrait et cela pour chacun de leurs ouvrages. Ces dispositions sont, de l'avis de nombreux écrivains et éditeurs, en contradiction avec le droit d'auteur tel qu'il est défini par le code de la propriété intellectuelle, qui dispose que « l'auteur jouit, sa vie durant, du droit exclusif d'exploiter son œuvre sous quelque forme que ce soit et d'en tirer un profit pécuniaire. Au décès de l'auteur, ce droit persiste au bénéfice de ses ayants droit pendant l'année civile en cours et les soixante-dix années qui suivent ». S'il considère que l'accessibilité d'œuvres non éditées constitue une avancée pour l'enrichissement et la diffusion du patrimoine littéraire, il souhaite toutefois l'interroger sur les dispositions qu'elle envisage de mettre en œuvre pour faire respecter les droits des auteurs.

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Réponse du Ministère de la culture et de la communication publiée le 03/04/2014

Adoptée à l'unanimité au Sénat et à l'Assemblée nationale, la loi n° 2012-287 du 1er mars 2012 introduit dans le code de la propriété intellectuelle un nouveau chapitre consacré aux dispositions particulières relatives à l'exploitation numérique des livres indisponibles du XXe siècle et instaure un mécanisme de gestion collective pour les droits numériques attachés à ces œuvres. Les livres qui peuvent entrer dans le champ de cette gestion collective doivent avoir été publiés en France avant le 1er janvier 2001 et ne plus faire l'objet d'une diffusion commerciale par un éditeur. Seuls sont donc concernés les livres qui ont été publiés dans un contexte où les perspectives de diffusion numérique n'étaient pas envisagées. La loi prévoit que l'exercice des droits numériques des livres indisponibles est confié à une société de perception et de répartition des droits gérée de façon paritaire par des représentants des auteurs et des éditeurs et agréée à cet effet par le ministre chargé de la culture sur la base d'un certain nombre de critères posés par le législateur et précisés par le pouvoir réglementaire. Le législateur a été particulièrement vigilant dans l'élaboration de ce texte quant à la volonté des auteurs. Le droit des auteurs n'est aucunement aliéné, la société de gestion collective ne faisant que les exercer au nom et dans l'intérêt de leurs titulaires légitimes. L'exercice des droits ne peut intervenir qu'au terme d'un délai de six mois après l'inscription des livres dans la base de données publique « ReLIRE », mise en œuvre par la Bibliothèque nationale de France, et sauf opposition des titulaires de droits. Pendant ce délai de six mois, de larges mesures de publicité, dont la nature a été précisée par le décret n° 2013-182 du 27 février 2013 portant application de la loi avertissent les titulaires de droits de la mise en place du dispositif afin de leur permettre d'exercer en toute connaissance de cause leur droit de sortie initial. Après l'entrée en gestion collective, les titulaires de droits conservent à tout moment la possibilité de se retirer du dispositif afin de recouvrer l'exercice individuel de leurs droits. Par ailleurs, si un auteur estime que la nouvelle diffusion de l'ouvrage porte atteinte à son honneur ou à sa réputation, une simple manifestation de sa volonté suffit à suspendre le mécanisme. En prévoyant plusieurs possibilités de sortie du dispositif de gestion collective mis en place ainsi que la rémunération des titulaires de droits en cas d'exploitation de l'œuvre, la loi du 1er mars 2012 respecte les grands principes du droit d'auteur.

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