Question de M. VAUGRENARD Yannick (Loire-Atlantique - SOC) publiée le 01/11/2013

Question posée en séance publique le 31/10/2013

M. Yannick Vaugrenard. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation.

Monsieur le ministre, je souhaite vous interroger sur la situation d'une industrie forte et emblématique de notre pays, à savoir la construction navale.

Les chantiers de Saint-Nazaire, en Loire-Atlantique, ont su construire le Normandie, le France, le Queen Mary 2 et ont lancé, voilà quelques semaines, la construction du plus grand navire de croisière du monde, l'Oasis 3. Par ailleurs, la diversification y est bien présente, avec le développement en particulier de l'éolien offshore.

La qualité de la main-d'œuvre est donc mondialement reconnue et appréciée. En revanche, ce qui est source d'inquiétude aujourd'hui, c'est que l'actionnaire à 66,6 % de ce chantier, STX France, à savoir la principale banque publique de Corée du Sud, envisage de vendre les actions qu'il détient. Cette banque est en effet en quête de liquidités, compte tenu de la situation dramatique du géant naval STX Corée.

Je rappelle que la France, quant à elle, est actionnaire depuis 2008 à hauteur de 33,3 %, par l'intermédiaire du fonds stratégique d'investissement.

On peut donc aisément mesurer le risque que cette vente potentielle représente si nous n'en maîtrisons pas suffisamment le rachat. Le risque le plus important est qu'un financier de chantier concurrent, notamment européen, se place sur les rangs, nous privant par la suite de la maîtrise de notre propre avenir.

Monsieur le ministre, il y a selon moi deux logiques à suivre face à ces informations qui, vous vous en doutez, ne cessent d'inquiéter.

La première, c'est une logique industrielle, en organisant, sur l'initiative de l'État, un tour de table de grands groupes français afin qu'ils réfléchissent rapidement à un positionnement offensif en termes de rachat partiel ou total.

La seconde, c'est une logique de précaution, qui n'exclut pas la première. Cette précaution, c'est que la puissance publique accepte, momentanément, d'être majoritaire dans le capital, afin de maîtriser l'avenir d'une filière industrielle qui fonctionne et qui a su innover et se diversifier.

Un paquebot de l'envergure du prochain – sans compter celui, identique, qui peut suivre –, c'est 2 milliards d'euros dans notre balance commerciale, ce qui est loin d'être négligeable dans la période actuelle.

Monsieur le ministre, je vous remercie de nous donner les informations permettant, je le souhaite, de nous rassurer sur le destin d'une filière industrielle indispensable à l'économie de notre pays. Je souhaite que la détermination du Gouvernement soit totale. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

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Réponse du Ministère chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation publiée le 01/11/2013

Réponse apportée en séance publique le 31/10/2013

M. Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation. Monsieur le sénateur, ce dossier inquiète légitimement les élus que vous êtes, les salariés des chantiers de Saint-Nazaire et leurs familles. Au nom du Gouvernement, je voudrais leur adresser un message à la fois de confiance et de vigilance. En effet, nous suivons avec la plus grande attention les développements actuels concernant la situation financière du groupe coréen STX. Ce dernier est actionnaire majoritaire de STX Europe, qui lui-même détient plus de 66 % de STX France.

Que se passe-t-il aujourd'hui ? Le groupe STX connaît des difficultés financières, et il est en cours de redressement, sur l'initiative de la banque publique coréenne KDB.

La question ou l'option d'une cession de certains de ses actifs, notamment en Europe, est aujourd'hui posée, sans que pour autant - je tiens à vous le dire - le Gouvernement ait été officiellement informé de ses intentions.

À ce jour, l'État, actionnaire indirect de STX France via la Banque publique d'investissement, n'a pas été saisi par STX Corée. Or aucun projet de cession ne peut avoir lieu sans information préalable de l'actionnaire public français.

Plusieurs points doivent donc être soulignés.

En aucun cas la situation économique et le financement des chantiers de Saint-Nazaire ne sont en cause dans le développement de la situation du groupe STX Corée. À l'inverse, STX France a pleinement consolidé son activité ces derniers mois grâce à d'importants contrats remportés, en particulier à l'export, notamment, vous l'avez cité, monsieur le sénateur, la construction du plus grand paquebot de croisière du monde, Oasis 3. L'activité de Saint-Nazaire n'est donc pas menacée par les événements de Corée.

Le Gouvernement est pleinement mobilisé sur ce dossier afin de conforter, comme vous l'avez souhaité, parmi les options que vous évoquez, l'avenir industriel des chantiers, qu'il continuera d'accompagner dans leur développement et leur diversification.

Le Gouvernement a donc confiance dans l'avenir capitalistique des chantiers. La preuve en est qu'il suit avec la plus grande attention la restructuration actuelle du groupe coréen STX. Le Premier ministre lui-même a évoqué, à la fin du mois de juillet dernier, lors de son déplacement en Corée, cette restructuration avec le Premier ministre coréen.

Cette confiance n'empêche pas la vigilance. Le principal enjeu demeure, pour nous comme pour vous, l'activité des chantiers, plus que sa structure actionnariale.

De quoi les chantiers de Saint-Nazaire ont-ils besoin aujourd'hui ? D'une part, vous l'avez dit, de continuer à engranger des commandes pour poursuivre la consolidation des perspectives de charge de travail. D'autre part, de poursuivre les actions visant à renforcer leur compétitivité et à circonscrire l'exposition de leur activité à un nombre limité de commandes dans le secteur de la croisière. C'est le sens des développements dans l'éolien offshore.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur le ministre.

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Ces aspects sont aussi importants pour l'entreprise que les questions actionnariales. (Mme Isabelle Pasquet s'exclame.)

Pour conclure, l'État entend rester un partenaire de long terme du groupe aux côtés d'actionnaires industriels responsables, désireux de développer la société, son activité et l'emploi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. - M. Michel Le Scouarnec applaudit également.)

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