Question de M. MAUREY Hervé (Eure - UDI-UC) publiée le 11/04/2014

Question posée en séance publique le 10/04/2014

M. Hervé Maurey. Après la défaite historique subie par la gauche et le Président de la République aux élections municipales, nous voici avec un nouveau gouvernement ou plutôt, devrais-je dire, un nouveau Premier ministre, puisque le Gouvernement est quasiment inchangé dans sa composition.

M. Didier Guillaume. Il est excellent !

M. Hervé Maurey. C'est avec beaucoup d'intérêt, mais aussi d'étonnement, voire de stupeur que nous avons entendu le Premier ministre sur un sujet qui nous intéresse tout particulièrement dans cette assemblée : la réforme des collectivités territoriales.

Alors que le Président de la République et la gauche de cet hémicycle proclamaient voilà peu encore le nécessaire rétablissement de la clause générale de compétence, vous annoncez la suppression de celle-ci, monsieur le Premier ministre.

Alors que le Président de la République confirmait au mois de janvier 2014 son attachement aux départements et sa volonté d'assurer leur maintien, vous annoncez la suppression de cette collectivité.

Alors que la gauche s'est toujours opposée à la fusion des régions – en tant qu'élu normand, je suis bien placé pour en témoigner –, vous annoncez une diminution par deux de leur nombre.

Alors que vous défendiez il y a peu encore les financements croisés, vous les fustigez désormais.

Alors que la gauche condamnait en 2011 le gel des dotations, vous annoncez, après une baisse de 1,5 milliard d'euros en 2014, une baisse de 10 milliards d'euros d'ici à 2017, c'est-à-dire une baisse plus de six fois supérieure à celle qui a déjà été supportée cette année. Cette baisse représente 20 % de l'effort d'économies demandé, alors que les collectivités locales ne représentent que 4 % des déficits publics, contre 83 % pour l'État.

M. Alain Gournac. Très juste !

M. Hervé Maurey. Mes questions sont donc les suivantes, monsieur le Premier ministre : comment les collectivités locales vont-elles pouvoir présenter, conformément à la loi, un budget en équilibre, alors que la baisse des dotations va être considérable et absorber dans la plupart des cas les actuels excédents de fonctionnement ?

M. Alain Gournac. Absolument !

M. Hervé Maurey. Je vous rappelle que la baisse des dépenses au sein des collectivités locales se heurte à la rigidité de la plupart des postes, notamment des charges de personnels.

Derrière cette mesure, n'y aurait-il pas une volonté cachée de supprimer les communes ou de procéder à des regroupements massifs de celles-ci ?

Dans ce contexte, la coûteuse réforme des rythmes scolaires ne peut se limiter à un assouplissement du cadre réglementaire tel que vous l'avez annoncé ; elle nécessite une véritable remise à plat, car vous ne pouvez pas à la fois réduire drastiquement les dotations aux collectivités locales et leur imposer de nouvelles charges. Ce n'est pas possible !

Je voudrais donc savoir quelles sont les intentions précises du Gouvernement sur ce sujet. (Applaudissements sur plusieurs travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

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Réponse du Premier ministre publiée le 11/04/2014

Réponse apportée en séance publique le 10/04/2014

M. Manuel Valls, Premier ministre. Je présente mes excuses à Mme Debré.

Mme Isabelle Debré. Quand même !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Madame la sénatrice, n'y voyez aucun sectarisme de ma part,...

M. Ladislas Poniatowski. On ne dirait pas !

M. Manuel Valls, Premier ministre. ... mais Mme Lebranchu connaît bien le dossier du Grand Paris.

Pour ma part, j'ai fait des annonces concernant la réforme des collectivités territoriales. Il est donc normal que je réponde.

Monsieur Maurey, depuis deux ans, vous me demandez souvent, et plus récemment par l'intermédiaire de votre président de groupe, d'entendre le message des électeurs, de réformer le pays et de réaliser les économies nécessaires. Vous ajoutez parfois, parce que vous êtes sincère, qu'un certain nombre de réformes de structures ou d'économies auraient dû être réalisées avant.

J'ai à nouveau posé ces questions hier : pouvons-nous encore vivre au-dessus de nos moyens ?

M. Bruno Sido. Non !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Pouvons-nous admettre le niveau d'endettement et de déficit de notre pays ? Pouvons-nous attendre pour procéder à des réformes ? Non ! J'ai d'ailleurs indiqué hier ici même que je considérais que, au-delà du travail qui avait été engagé sur la décentralisation par Marylise Lebranchu, nous aurions dû commencer par des réformes de structures beaucoup plus lourdes avant de traiter la question des modes de scrutin. Lors de la présentation de ces textes de loi, j'avais dit exactement la même chose en répondant à diverses interpellations.

Eh bien, il est temps de faire ces réformes ! Elles sont sur la table, et il va y avoir un débat.

La suppression des conseils généraux n'est pas une idée nouvelle ; elle est même portée par des personnalités de toutes sensibilités politiques.

M. Alain Fouché. Pas de la majorité !

M. Manuel Valls, Premier ministre. Ce débat existe au sein de la majorité comme de l'opposition. Portons-le !

Voulons-nous engager la réforme de manière brutale ? Non, puisque nous indiquons l'horizon de 2021. D'ici à cette échéance, auront lieu les élections départementales en 2015, une élection présidentielle en 2017. Reste que nous ne pouvons pas attendre. Nous voulons donc que le débat s'engage.

Nous aurons au préalable un débat sur les régions - nous voulons passer à une dizaine de grandes régions. Il nous permettra ainsi de franchir une première étape et d'examiner comment nous devons organiser nos collectivités territoriales.

M. Jean-Pierre Sueur. Absolument !

M. Manuel Valls, Premier ministre. J'ai été très clair à ce sujet : je suis attaché aux communes - elles trouvent un rôle nouveau dans l'intercommunalité -, mais ces réformes de structures sont indispensables. Il ne s'agit pas de transformer notre pays en un État fédéral. Il convient de mieux l'organiser et d'être beaucoup plus performants, non seulement pour nos concitoyens et les acteurs économiques, mais aussi pour réaliser des économies.

M. Alain Fouché. Lesquelles ?

M. Bruno Retailleau. Combien ?

M. Manuel Valls, Premier ministre. Moi, je ne fustige pas les collectivités territoriales. Je n'ai pas prononcé les mots que j'ai parfois entendus au sein du gouvernement avant 2012 à leur égard. J'ai été maire. Je sais combien il est difficile de gérer une collectivité, surtout quand elle est pauvre et rencontre des difficultés sociales sur son territoire.

Nous avançons, je l'ai dit tout à l'heure, le chiffre de 10 milliards d'euros. Vous le savez parfaitement, des économies d'échelle sont tout à fait réalisables en la matière.

Il y va de la responsabilité de ce gouvernement d'être à la hauteur de la situation et d'engager le pays sur la voie non seulement des réformes de structures mais aussi des économies, à condition que ces dernières soient bien précisées - nous y reviendrons avec Michel Sapin et Christian Eckert - et bien ciblées,...

M. Jean Bizet. Nous attendons !

M. Manuel Valls, Premier ministre. ... en nous appuyant sur le travail qui a été réalisé par MM. Lambert et Malvy, qui connaissent parfaitement la question des normes. Je pense que nous pouvons atteindre ces résultats. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. - M. Alain Bertrand applaudit également.)

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