Question de Mme ESTROSI SASSONE Dominique (Alpes-Maritimes - UMP) publiée le 11/12/2014

Mme Dominique Estrosi Sassone interroge Mme la secrétaire d'État, auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique sur la fracture numérique dans le département des Alpes-Maritimes. Alors que le Gouvernement encourage l'utilisation du numérique pour faciliter les démarches en ligne et les relations entre les citoyens et l'administration, avec la mise en place d'outils dématérialisés comme le dépôt de pré-plaintes ou encore le paiement des impôts, certaines communes n'auront plus de connexion au 1er janvier 2015, ce qui est un comble à l'ère du « tout-numérique ». La commune du Mas, village de 170 habitants à 77 kilomètres au nord de Nice, est dans ce cas de figure, puisqu'au 1er janvier 2015, ce village ne sera plus équipé par internet. N'étant pas en couverture « 3G », le maire de Mas craint pour le bon fonctionnement de la mairie et pour la continuité du service public. La raison évoquée du retrait de l'opérateur est le manque de rentabilité. Par conséquent, aucun autre prestataire ne prendrait le relai. La seule alternative proposée est l'installation d'un « kit » satellitaire, avec un abonnement bien trop onéreux pour une si petite commune et pour fournir un débit bien plus lent à nos concitoyens. Cette situation n'est pas un cas unique, puisque dix-huit autres communes des Alpes-Maritimes seraient actuellement dans une situation analogue. L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) a déjà mis en demeure deux opérateurs téléphoniques qui avaient deux à trois ans de retard sur leur taux de couverture attendu. Une enquête administrative a également été ouverte sur une zone « blanche » de montagne, censée disposer de réseau, comme l'a expliqué le président de l'ARCEP lors de son audition à l'Assemblée nationale le 18 juin 2014. À l'heure de l'« ultra-connectivité », à l'heure où les campagnes de publicité des opérateurs vantent les mérites du très haut débit, les communes sont loin d'être égales face au numérique. Dans les Alpes-Maritimes, l'uniformisation des connexions a été fixée à l'horizon 2020. Le département s'est engagé à financer les opérations grâce à un schéma départemental d'aménagement du numérique mais les opérateurs doivent jouer leur rôle, conformément aux accords, et proposer des offres convenables aux habitants. Elle lui demande ce qu'il compte entreprendre pour encourager les opérateurs à s'implanter dans ces zones et s'il souhaite renforcer les moyens de l'ARCEP pour sanctionner les opérateurs qui se retirent d'une zone géographique, alors que des communes sont recensées et doivent bénéficier d'une connexion digne de notre temps.

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Réponse du Ministère de la ville, de la jeunesse et des sports publiée le 18/02/2015

Réponse apportée en séance publique le 17/02/2015

Mme Dominique Estrosi Sassone. Alors que le Gouvernement encourage l'utilisation du numérique pour faciliter les démarches des citoyens auprès de l'administration, avec la mise en place d'outils dématérialisés pour le paiement des impôts ou le dépôt de pré-plainte, certaines communes n'ont plus de connexion internet depuis le 1er janvier 2015. Un comble à l'ère du« tout-numérique » !

La commune du Mas, village de 170 habitants situé à 77 kilomètres au nord de Nice, se trouve précisément dans cette situation. Faute de couverture 3G, le maire nourrit des craintes quant au bon fonctionnement de la mairie et à la continuité du service public.

La raison évoquée de ce retrait par l'opérateur est le manque de rentabilité. Cela laisse supposer qu'aucun autre prestataire ne prendra le relai. La seule solution proposée est l'installation d'un « kit satellitaire », avec un abonnement bien trop onéreux pour une si petite commune et un débit bien plus lent pour la navigation.

Il ne s'agit malheureusement pas d'un cas unique, puisque dix-huit autres communes des Alpes-Maritimes sont actuellement dans la même situation.

L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l'ARCEP, a mis en demeure deux opérateurs téléphoniques qui avaient deux à trois ans de retard sur leur taux de couverture attendu. Une enquête administrative a également été ouverte sur une « zone blanche » de montagne, censée disposer de réseau, comme l'a expliqué l'ancien président de l'ARCEP lors d'une audition à l'Assemblée nationale le 18 juin 2014.

À l'heure de l'« ultraconnectivité », à l'heure où les campagnes de publicité des opérateurs vantent les mérites du très haut débit, les communes sont loin d'être toutes égales face au numérique.

Dans les Alpes-Maritimes, l'uniformisation des connexions a été fixée à l'horizon 2020. Le conseil général s'est engagé à financer les opérations grâce à un schéma directeur départemental d'aménagement numérique, ou SDDAN, mais les opérateurs doivent néanmoins jouer leur rôle, conformément aux accords, et proposer des offres aux habitants.

Comment le Gouvernement compte-t-il encourager les opérateurs à s'implanter dans ces zones où la collectivité aura installé son propre réseau, et à y rester ?

Va-t-il renforcer les moyens de l'ARCEP pour sanctionner les opérateurs qui se retirent d'une zone géographique, alors que des communes y sont recensées et doivent bénéficier d'une connexion digne de notre temps ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Myriam El Khomri,secrétaire d'État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargée de la politique de la ville. Madame la sénatrice, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l'absence de Mme Axelle Lemaire.

Avec le plan France Très Haut Débit, nous avons souhaité engager le plus rapidement possible le chantier structurant pour nos infrastructures numériques de demain. Mais il nous faut aussi répondre aux besoins du moment, veiller à étendre l'accès aux réseaux existants et en assurer la fiabilité.

S'agissant des réseaux mobiles, des travaux sont en cours pour définir un nouveau programme de couverture, avec trois objectifs.

Premièrement, il convient d'achever les précédents programmes de couverture des zones blanches et, au-delà de ces programmes, de couvrir les 170 communes identifiées comme ne disposant d'aucune couverture mobile. Aucune commune n'est concernée dans le département des Alpes-Maritimes : l'ensemble des seize communes recensées au titre du programme « zones blanches » sont couvertes, quinze par les trois opérateurs et la seizième, pour le moment, par un seul opérateur.

Deuxièmement, il s'agit de pallier un manque évident des programmes précédents, lesquels ne permettaient pas d'assurer la couverture de l'ensemble de la population des communes puisqu'ils ne visaient que les centres-bourgs. Il faut en effet pouvoir répondre aux besoins des communes les plus mal couvertes, comme certaines communes des Alpes-Maritimes que vous avez évoquées.

Troisièmement, au-delà du service téléphonique de base, il faut s'assurer que les territoires ruraux disposent de l'accès à l'internet mobile en 3G.

Un programme de couverture en 3G de 3 900 communes par l'ensemble des opérateurs devait être achevé à la fin de 2013. Il ne l'a pas été et l'ARCEP a ouvert, à ce titre, une enquête administrative en mai dernier. Le Gouvernement travaillera, avec le régulateur, pour que l'objectif de ce programme soit atteint, ce qui permettra aussi de limiter les zones grises de la 3G.

Le programme que le Gouvernement entend proposer à brève échéance permettra de répondre aux difficultés que vous décrivez. Il pourra nécessiter d'étendre par la loi les obligations existantes des opérateurs mobiles.

Dans le cas d'une commune telle que celle du Mas, la réponse doit venir autant de la couverture fixe que de la couverture mobile. L'un des objectifs du plan France Très Haut Débit est d'apporter l'accès à internet dans les communes qui n'en bénéficient pas aujourd'hui ou qui n'ont qu'un accès très dégradé.

La situation de la commune du Mas est en outre assez particulière : il apparaît que les habitants de la commune sont placés derrière un équipement du réseau de cuivre d'Orange, un multiplexeur, empêchant les signaux DSL émis depuis la commune voisine de Saint-Auban de passer. Historiquement, cet équipement était nécessaire afin d'assurer le raccordement téléphonique de la commune. De ce fait, aucun logement du Mas n'est aujourd'hui éligible à l'ADSL.

Orange a engagé depuis plusieurs années un plan de neutralisation de ces multiplexeurs, consistant à procéder à des opérations de réaménagement de réseau exactement semblables à la montée en débit sur cuivre. Dans cette hypothèse, les logements du Mas pourraient théoriquement être éligibles au haut débit de qualité pour 93 % d'entre eux et au très haut débit pour 56 %.

Néanmoins, la commune du Mas ne fait pas partie du plan de neutralisation des multiplexeurs GMUX d'Orange. La réponse viendra donc du projet porté par le département dans le cadre du plan France Très Haut Débit. Ce projet prévoit la couverture en fibre optique de l'ensemble du département, y compris de la commune du Mas, selon un calendrier dont il a la maîtrise.

Dans ce cadre, le Gouvernement ne peut que vous encourager, madame la sénatrice, à solliciter les services du conseil général des Alpes-Maritimes, mais il reste bien entendu, de même que la mission France Très Haut Débit, à votre disposition.

M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone.

Mme Dominique Estrosi Sassone. Je vous remercie de ces réponses, madame la secrétaire d'État.

Bien évidemment, le conseil général des Alpes-Maritimes s'est saisi de ce projet de réduction de la fracture numérique, en se fixant pour objectif très ambitieux l'uniformisation des connexions à l'horizon 2020.

Cependant, ce schéma a un coût, qui, selon l'estimation du conseil général, est de 140 millions à 180 millions d'euros.

Je souhaite donc que l'État accompagne le conseil général des Alpes-Maritimes. Celui-ci financera une partie de l'équipement nécessaire pour couvrir les communes non encore couvertes par le très haut débit, mais il est impératif que l'État soit présent financièrement à ses côtés. D'autres sources de financement seront également bienvenues. Nous avons ainsi sollicité l'aide de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et de l'Union européenne.

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