Question de Mme GATEL Françoise (Ille-et-Vilaine - UDI-UC) publiée le 06/02/2015

Question posée en séance publique le 05/02/2015

Concerne le thème : La situation de l'emploi


Mme Françoise Gatel. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je veux évoquer la situation préoccupante et catastrophique du secteur du BTP. Il pèse sur le maintien de ses emplois une grave inquiétude.

À la situation économique catastrophique que connaît ce secteur, aux effets négatifs de la loi du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, dite « loi ALUR », s'ajoutent de lourdes contraintes administratives : je pense ici non seulement au compte pénibilité, dont M. Sapin lui-même dit qu'il est impraticable, mais aussi et surtout à la réglementation extrêmement contraignante qui pèse sur le travail des mineurs. Certes, celle-ci a une vocation préventive, mais elle rend tout simplement impossible l'apprentissage d'un vrai métier dans l'entreprise.

Ainsi, en Bretagne, depuis cinq ans, le secteur du BTP a perdu 800 postes d'apprenti, alors que celui-ci a une longue tradition quantitative et qualitative de formation.

Je voudrais également évoquer, monsieur le ministre, la question des salariés détachés d'entreprises localisées dans l'Union européenne. Nous le savons, bon nombre d'entre elles ne respectent pas la réglementation en vigueur, soit sur les conditions de travail, soit sur les salaires.

Le nombre d'emplois détachés est passé de 26 000 en 2008 – je le dis de mémoire – à plus de 200 000 en 2013, et atteint 300 000 si l'on compte aussi les emplois détachés non déclarés.

Cette situation a contribué, en Ille-et-Vilaine, à une perte de 2 000 emplois dans le secteur du BTP.

Certes, la loi Savary de 2014 a mis en place un dispositif assez coercitif pour lutter contre la fraude, mais, vous le savez, monsieur le ministre, les fraudeurs ne connaissent pas les 35 heures ! Ces entreprises incitent nombre de salariés à travailler le soir, le week-end et les jours fériés, et il est indispensable de mieux cibler ces contrôles.

Monsieur le ministre, quelles seront vos propositions concrètes pour un meilleur ciblage de la lutte contre la fraude destructrice d'emploi ?


Mme la présidente. Il faut conclure, ma chère collègue.


Mme Françoise Gatel. Surtout, comment le Gouvernement compte-t-il concilier sa volonté très louable en matière de développement de l'apprentissage et la réglementation très stricte qui constitue un frein à l'embauche ?

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Réponse du Ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social publiée le 06/02/2015

Réponse apportée en séance publique le 05/02/2015

M. François Rebsamen,ministre.Madame la sénatrice, je ne reprendrai pas les différents éléments de votre question, mais je partage vos préoccupations. Il est vrai qu'il y a eu une dégradation assez sensible de l'emploi dans le secteur du bâtiment et des travaux publics. Il est vrai qu'il y a une augmentation très sensible du nombre de travailleurs détachés, ce qui, en soi, n'est pas un problème lorsqu'ils sont déclarés.(Mme Françoise Gatel opine.- M. Philippe Dallier s'exclame.) On peut considérer qu'il existe actuellement plus de 350 000 travailleurs détachés en France, dont plus de 100 000 dans le secteur du BTP.

Madame la sénatrice, vous m'interrogez sur les dispositions que nous comptons prendre pour lutter contre le travail détaché illégal, c'est-à-dire non déclaré.

Vous le savez, les parlementaires ont adopté la loi dite« Savary » dont l'objet est la lutte contre le travail détaché illégal. Pour ce faire, nous allons augmenter, bien sûr fortement, l'amende administrative afin de lui donner un effet dissuasif. Nous allons prochainement avoir la possibilité de suspendre les prestations de services internationales en cas de manquement grave aux règles de détachement. En outre, à la demande de la fédération du bâtiment, qui le réclamait depuis près de dix ans, nous allons mettre en place une carte d'identité professionnelle.

Mme Catherine Procaccia. Cela avait aussi été demandé par les sénateurs !

M. François Rebsamen,ministre.Je suis heureux de pouvoir apporter une réponse positive en la matière, car de nombreux freins s'opposaient à l'instauration d'une telle carte.

Nous allons également, dans le domaine de l'apprentissage, apporter une réponse concrète à la suite de la réunion qu'avait organisée le Président de la République le 19 septembre pour lever les freins à l'apprentissage. Je vais prendre un décret sur les travaux dits dangereux des jeunes, qui sera publié prochainement, avant le mois de mai. Il permettra de faciliter l'accès des jeunes à l'apprentissage - sans pour autant les mettre en danger -, par une déclaration et non plus une demande d'autorisation des entreprises. Cette mesure sera conforme à ce que vous attendiez. De plus, les objectifs de contrôle vont être réévalués à la hausse. Je prendrai d'ailleurs dans les semaines qui viennent, avec M. le Premier ministre, une initiative très forte pour lutter contre le travail illégal.

Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour la réplique.

Mme Françoise Gatel. Monsieur le ministre, nous comptons sur vous pour favoriser le développement de l'apprentissage, mais aussi, je le répète, pour assurer les contrôles le week-end et les jours fériés. À cet égard, il m'est arrivé, lors d'une promenade dans ma commune, de m'approcher d'un chantier et de voir les peintres s'enfuir comme une volée de moineaux. C'était un dimanche après-midi, monsieur le ministre !

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