Question de M. LEFÈVRE Antoine (Aisne - UMP) publiée le 12/02/2015

M. Antoine Lefèvre attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur les conséquences que pourrait entraîner la modification du fonctionnement actuel du don du sang. En effet, actuellement bénévole, anonyme et sans profit, le don du sang en France est un acte très encadré et sécurisé puisqu'il respecte les principes éthiques inscrits dans la loi n° 93-5 du 4 janvier 1993 relative à la sécurité en matière de transfusion sanguine et de médicament (non-commercialisation et indisponibilité du corps humain). Cet encadrement est assuré par l'établissement français du sang (EFS) et le laboratoire biopharmaceutique français (LFB), qui assurent, à toutes les étapes, un suivi et des garanties sanitaires indispensables. Or, l'article 71 de la loi n° 2014-1554 du 22 décembre 2014 de financement de la sécurité sociale pour 2015 a créé une nouvelle catégorie de médicament : le plasma à utilisation transfusionnelle dans la production duquel intervient un processus industriel, entérinant la mise sur le marché français de plasma thérapeutique traité par solvant détergent (plasma SD) provenant de fournisseurs étrangers et fabricant ce médicament à partir de plasma collecté sur des donneurs rémunérés. L'EFS est par ailleurs obligé de conserver et distribuer ce médicament moyennant rétribution, alors que l'EFS est interdit de produire son propre plasma SD à compter du 31 janvier 2015. Les associations de donneurs de sang craignent que la mise en œuvre de cet article porte atteinte à l'éthique du don en France, ne fragilise l'information sur la majorité légale du donneur et le dépistage des maladies transmissibles prévue par le code de la santé publique, d'autant que le projet de loi n° 2302 (Assemblée nationale, XIVe législature) relatif à la santé prévoirait la commercialisation du sang, à l'encontre des principes actuels susmentionnés.
Par conséquent, il souhaiterait que le Gouvernement lui apporte des précisions sur ces projets, et qu'elle lui expose ce qu'elle entend faire pour que les principes essentiels reconnus dans les lois bioéthiques soient respectés.

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Réponse du Ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes publiée le 05/03/2015

L'article 71 de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2015 a pour objectif de mettre en conformité le droit français à la suite des arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne et du Conseil d'État qui ont requalifié le plasma sécurisé par solvant-détergent (dit plasma SD), considéré jusqu'à ce jour comme un produit sanguin labile, en médicament. L'arrêt du Conseil d'État ne laissant que jusqu'au 31 janvier 2015 pour permettre les adaptations nécessaires à cette requalification, le Gouvernement a proposé un dispositif permettant d'assurer dès cette date un haut niveau de sécurité pour les patients transfusés. Il est en effet impératif de garantir un système intégrant en toute sécurité des produits transfusionnels de statuts juridiques différents qui, sans modification de la législation, emprunteraient des circuits distincts de distribution et de délivrance jusqu'au lit du patient. Sans cette mesure, le plasma SD serait arrivé directement dans les pharmacies à usage intérieur des hôpitaux qui ne disposent pas encore des équipements nécessaires à la conservation et à la délivrance de ce produit et dont les personnels n'ont pas encore été formés à ce type de produit. Le danger que nous devons parer aujourd'hui est de désorganiser, du jour au lendemain, la délivrance des produits transfusionnels, désorganisation qui pourrait conduire à des retards de transfusion voire à des accidents plus graves. Par ailleurs, sans ces dispositions, il n'aurait pas été pas possible d'assurer un double suivi de ce plasma en pharmacovigilance et en hémovigilance, ce qui pourrait être préjudiciable à la sécurité de la chaîne transfusionnelle et à celle des patients. La mesure présentée par le Gouvernement n'est absolument pas le signe d'un changement de conviction sur les grands principes qui régissent la transfusion sanguine en France. La France reste plus que jamais attachée aux grands principes d'organisation de la filière de la transfusion sanguine que sont la sécurité sanitaire, l'autosuffisance, le don éthique, bénévole, anonyme et non rémunéré, et la séparation entre le collecteur et le fractionneur. Par ailleurs, le monopole de l'établissement français du sang (EFS) sur la collecte des produits sanguins labiles en France n'est absolument pas remis en cause par cette mesure. L'EFS continuera ainsi à produire, distribuer et délivrer des plasmas transfusionnels et tous les autres produits sanguins labiles ; seul le plasma SD pourra être commercialisé par des laboratoires pharmaceutiques, sous réserve d'obtenir les autorisations prescrites par la loi. Enfin, il convient de souligner que des règles existent en France régissant les médicaments dérivés du sang afin de soutenir la promotion de médicaments d'origine éthique. Déjà aujourd'hui, nos règles nationales d'autorisation de mise sur le marché imposent le principe de l'origine éthique du plasma ; demain, le label éthique viendra encore renforcer la promotion de ces médicaments éthiques. Le plasma SD ne dérogera pas à ces règles.

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