Question de M. KARAM Antoine (Guyane - Socialiste et républicain) publiée le 10/12/2015

M. Antoine Karam attire l'attention de Mme la ministre des outre-mer sur le prix des carburants en Guyane.

En 2008, la Guyane était plongée dans une crise du carburant éprouvante que personne ne souhaite revivre.

La présidente de la région Poitou-Charentes avait alors accusé la société anonyme de la raffinerie des Antilles (SARA) « d'engranger des profits faramineux sur le dos des Guyanais ».

Si cette crise a permis d'initier une vaste réflexion ainsi qu'un travail sur la formule de calcul du prix du carburant, la population et les entreprises continuent de s'interroger, sept ans plus tard, sur le manque de transparence dans le calcul du « prix de sortie SARA ».

Lorsque l'on observe l'évolution du prix du carburant et celui du baril de pétrole, les courbes sont extrêmement parlantes. On observe en effet que le prix de sortie SARA a toujours été corrélé au cours du BRENT depuis 2011. Toutefois, la baisse régulière de ce dernier depuis août 2014 semble s'être peu répercutée sur le prix de vente du carburant.

Pour preuve, entre janvier 2014 et septembre 2015, le cours du brent est tombé de 80,83 € à 41,77 €. Dans le même temps, le prix à la pompe a baissé de 21 cents pour le gazole, et de seulement 1 cent pour le sans-plomb.

Finalement, suite aux alertes répétées d'une fédération d'entreprises, la SARA a concédé en octobre 2015 des baisses sur le prix du carburant : 4 centimes sur le gazole et 14 centimes sur le sans-plomb.

Dans ce contexte, il souhaiterait connaître la position du Gouvernement sur les deux points suivants.

Le décret n° 2013-1314 du 27 décembre 2013 était destiné à faire la transparence sur les marges des pétroliers. Près de deux ans plus tard, il lui demande si elle est favorable à ce que soit engagée une évaluation approfondie de l'évolution des prix pratiqués par la SARA en Guyane depuis l'adoption du texte.

Par ailleurs, force est de constater que l'approvisionnement en carburant par la SARA en Guyane ne constitue toujours pas le gage d'un « juste » prix aux consommateurs de ce territoire. Il lui demande s'il n'est pas temps de mettre en place une filière alternative d'approvisionnement en carburants aux normes européennes depuis un proche territoire, le Suriname, à même de fournir ces produits dans un très proche délai.

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Réponse du Ministère des outre-mer publiée le 10/03/2016

Le Gouvernement demeure particulièrement attentif à la question du prix des carburants outre-mer et à la lutte contre la vie chère en général. Il partage ainsi pleinement les préoccupations de M. le sénateur Karam quant à la nécessité d'assurer aux consommateurs guyanais un prix juste. L'honorable parlementaire propose d'engager « une évaluation approfondie de l'évolution des prix pratiqués par la SARA en Guyane » depuis l'adoption du décret n°  2013-1314 réglementant le prix des produits pétroliers dans les Départements Français d'Amérique et de l'arrêté méthodologique afférent du 5 février 2014. Pour rappel, les prix des carburants en Guyane sont fixés par le préfet, conformément aux textes réglementaires précités, et non par la SARA. Le prix de sortie SARA n'est qu'un élément de coût dans la chaîne de formation du prix final, qui intègre également la fiscalité et les taxes relatives aux carburants, la marge de gros et la marge de détail. La réforme de la réglementation des prix des produits pétroliers intervenue fin 2013 a par ailleurs permis d'apporter des garanties nouvelles aux consommateurs. Elle accroît la transparence sur les modalités de fixation des prix, en détaillant, à chaque stade de la chaîne pétrolière, les éléments constitutifs de la formation des prix. Elle augmente également la transparence sur la rentabilité dégagée par les opérateurs, s'agissant en particulier des entreprises en situation de monopole (SARA) ou d'oligopole (distributeurs pétroliers). Leurs résultats sont désormais rendus publics. Elle réduit enfin la rémunération perçue par la société de raffinage (SARA). Alors que son résultat net oscillait autour de 33 M€ en 2011, 2012 et 2013, celui-ci est ramené autour de 20 M€ par les effets de la nouvelle règlementation. Dans les faits, cette nouvelle réglementation conduit à un strict encadrement par le préfet des prix des produits pétroliers et gaziers en Guyane, tout au long de la filière. Au cas particulier, les prix de sortie SARA sont validés chaque mois par les préfets de Guyane, Guadeloupe et Martinique. Ils font l'objet de contrôles réguliers et étendus des services compétents, dans l'intérêt du consommateur. Les prix de sortie SARA ont ainsi diminué de 6 % pour l'essence sans-plomb et de 25 % pour le gazole, entre janvier 2015 et janvier 2016. À titre complémentaire, la Guyane bénéficie aujourd'hui pleinement du système de péréquation des coûts de transport pour les carburants. Ce dispositif assure aux consommateurs guyanais un prix en sortie des entrepôts guyanais de la SARA identique à celui observé en sortie de ses entrepôts antillais. Aujourd'hui, l'écart constaté dans les Départements Français d'Amérique sur les prix à la pompe s'explique du seul fait du poids de la fiscalité locale, qui relève d'options prises par les collectivités. Ainsi, pour l'essence sans-plomb, le poids des taxes (octroi de mer et TSC) représente, en janvier 2016, 115 % du prix de sortie SARA en Guyane (91 % en Guadeloupe et 90 % Martinique). S'agissant du gazole, le poids des taxes représente, en janvier 2016, 82 % du prix de sortie SARA en Guyane (58 % en Guadeloupe et 42 % en Martinique). L'honorable parlementaire évoque par ailleurs la mise en place d'une filière alternative d'approvisionnement en carburants aux normes européennes depuis le Suriname. À l'heure actuelle, le Suriname est importateur net d'essence. Il semble donc difficile d'envisager que la société nationale StaatsOlie approvisionne aussi la Guyane dès lors que sa production est insuffisante à subvenir aux seuls besoins de la population surinamienne. S'agissant du gazole, StaatsOlie dégage un surplus de production par rapport aux besoins surinamiens. Ces excédents ne pourraient toutefois être commercialisés que dans les mêmes conditions de fiscalité, de normes qualitatives et environnementales que les produits issus de la SARA.

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