Question de M. MASSON Jean Louis (Moselle - NI) publiée le 26/05/2016

M. Jean Louis Masson demande à Mme la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat quelles sont ses intentions et quel est l'échéancier précis pour la réforme du code minier. De plus, il attire son attention sur les problèmes rencontrés dans le bassin houiller de Lorraine où l'arrêt de l'exploitation devrait avoir pour corollaire un suivi attentif des séquelles de « l'après-mine ». Cela concerne aussi bien l'indemnisation des affaissements miniers postérieurs à l'exploitation (cas de Rosbruck) que la remontée de la nappe phréatique autour de la communauté de communes du Warndt. Les trois questions écrites qu'il a posées sur ces sujets (n° 17882 du 24/09/2015, n° 19979 du 11/02/2016, n° 20079 du 18/02/2016) n'ayant pas obtenu de réponse, il lui demande de lui préciser sa position face aux problèmes soulevés dans ces questions.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargé des relations internationales sur le climat, chargé de la biodiversité publiée le 08/06/2016

Réponse apportée en séance publique le 07/06/2016

M. Jean Louis Masson. Madame la secrétaire d'État, la loi dispose que les dégâts miniers doivent être indemnisés par l'exploitant. Cependant, ces dégâts sont parfois reportés dans le temps et ne surviennent qu'après l'arrêt de l'exploitation de la mine. De ce fait, pour le bassin houiller de Lorraine, l'État a été subrogé à la responsabilité de Charbonnages de France, après la dissolution de cet établissement public.

Or l'arrêt de l'exhaure du siège de la Houve entraîne une importante remontée de la nappe phréatique.

Ce problème est d'autant plus grave qu'à la suite de l'extraction du charbon, le niveau de la surface a baissé de plusieurs mètres en de nombreux endroits, ce qui crée de véritables cuvettes.

À proximité de l'ancien puits de la Houve, Charbonnages de France s'est engagé à réaliser des pompages pour maintenir le niveau de la nappe phréatique à au moins trois mètres sous la surface du sol, ce qui fut confirmé par un arrêté préfectoral du 5 août 2005.

Néanmoins, la remontée de la nappe phréatique est plus rapide et plus importante que prévu. Malheureusement, l'administration refuse de confirmer clairement la prise en charge financière du pompage supplémentaire.

Par ailleurs, près de Forbach, la commune de Rosbruck est victime d'affaissements très importants. Un groupe de maisons est même descendu d'une hauteur de quinze mètres et se retrouve dorénavant sous le niveau de la Rosselle.

Le risque d'inondation brutale a conduit au classement de ce secteur en zone rouge du plan de prévention des risques.

Plus généralement, la commune est confrontée à l'obligation de mener des travaux de l'ordre de 10 à 15 millions d'euros, montant démesuré pour une localité comptant moins de 1 000 habitants.

La responsabilité minière est évidente dans les dégâts causés aux bâtiments et aux réseaux souterrains. L'État mène, hélas ! une « guérilla » juridique pour éviter ou retarder l'indemnisation des dégâts miniers causés à Rosbruck. Cette situation dure depuis plus de dix ans et, d'expertises en recours de procédure, l'arbitrage définitif n'est toujours pas rendu.

Madame la secrétaire d'État, oui ou non, l'État accepte-t-il d'assumer ses responsabilités à l'égard des communes et des habitants du bassin houiller de Lorraine ?

Par le passé, en réponse à diverses questions parlementaires, il a été indiqué que l'État assumerait les suites de ces problèmes. Comme tous les élus du bassin houiller, je suis donc très déçu par l'attitude actuelle des pouvoirs publics en la matière. Cette situation n'est pas normale, qu'il s'agisse du pompage à hauteur de la Houve ou des difficultés subies par la commune de Rosbruck. Lorsqu'une localité s'affaisse de plus de dix mètres, il faut être d'une certaine mauvaise foi pour affirmer qu'il n'y a pas de conséquences !

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité. Monsieur le sénateur, Ségolène Royal, qui ne pouvait être présence ce matin dans cet hémicycle, m'a demandé de vous apporter la réponse suivante.

Vous appelez particulièrement l'attention de Mme la ministre de l'environnement sur la commune de Rosbruck, située dans un territoire où d'anciennes mines de charbon ont été exploitées et qui a été touché par des mouvements de terrain.

Vos questions concernent l'indemnisation des victimes. Mme Royal est attachée à ce que ces dernières soient justement indemnisées au regard des dommages qu'elles subissent. Mais, malgré l'intervention de plusieurs experts, aucun accord n'a pu être trouvé quant au montant à verser. La justice a donc été saisie à la demande de la commune de Rosbruck qui, en 2009, a contesté la première expertise.

Pour ce qui concerne le phénomène de remontée de nappe autour de la communauté de communes du Warndt, des études ont été réalisées dès 2003 en prévision de l'arrêt de l'exploitation minière, afin de dimensionner les éventuels dispositifs de prévention.

Ces études tenaient compte d'hypothèses fondées sur l'analyse des consommations passées, en particulier des industries et des collectivités. Or, au total, ces consommations se révèlent beaucoup plus faibles que prévu, notamment du fait d'une baisse significative de la consommation industrielle.

Face à cette situation, les services du ministère de l'environnement ont commandité une révision des études menées en 2014. Ce travail est en cours.

Depuis 2009, l'État a déjà entrepris et financé des travaux de pompage et de traitement des eaux minières, pour un montant de 7,4 millions d'euros.

Par ailleurs, la remontée de la nappe fait l'objet d'une surveillance effectuée par l'État à travers un réseau de vingt-cinq piézomètres.

Au regard des premiers éléments disponibles, l'État a décidé de réaliser différents travaux de prévention complémentaires pour un montant total de 1,5 million d'euros, alors même que l'arrêt de l'exploitation minière n'est pas la seule cause des remontées de nappe.

L'État assume donc pleinement sa responsabilité en matière d'après-mine, et il agit. Il a en effet déjà mis en œuvre les mesures nécessaires pour faire face à la remontée de nappe observée dans le bassin houiller lorrain.

M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson.

M. Jean Louis Masson. Madame la secrétaire d'État, cette réponse n'est pas du tout satisfaisante. Si l'on observe des remontées de nappe, c'est bien sûr du fait de l'exploitation minière sous les communes bordant la Houve. Je le répète, les terrains se sont affaissés !

L'État espérait peut-être que certains industriels de la zone chimique de Carling pomperaient de leur côté dans la nappe, ce qui l'aurait dispensé d'assurer des pompages pour compenser les séquelles causées par les mines. Mais, en la matière, ces entreprises n'ont aucune obligation.

En faisant reposer sur ces sociétés la responsabilité de la remontée de nappe, l'État s'exonère un peu rapidement... Les quelques travaux que vous avez évoqués ne correspondent pas du tout au problème. Vous le savez très bien, dans cette région, certaines maisons voient leurs sous-sols régulièrement inondés, y compris en période de sécheresse - je ne parle pas des inondations actuelles. Cette situation est tout à fait inadmissible.

Enfin, on ne peut pas affirmer qu'il n'y a pas de problème majeur à Rosbruck, que la difficulté se limite à un léger contentieux d'indemnisation. Il ne faut pas se moquer du monde ! Je le répète, tout un quartier de cette commune est en zone rouge, parce qu'il est situé à dix mètres sous le niveau de la rivière. Bien entendu, avant l'exploitation de la mine, les maisons considérées étaient au-dessus de la rivière. Puisqu'il y a eu un affaissement et que la rivière a été artificiellement surélevée, c'est quand même à l'État d'assumer la responsabilité de l'incidence sur les populations.

Je suis très déçu de l'attitude des pouvoirs publics. Je connais bien les problèmes miniers, étant moi-même ingénieur en chef des mines. En la matière, quand on a des responsabilités, il faut les assumer. Or, actuellement, l'État n'assume pas les siennes !

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