Question de M. GUÉRINI Jean-Noël (Bouches-du-Rhône - RDSE-R) publiée le 16/06/2016

M. Jean-Noël Guérini appelle l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire sur les circuits de distribution des produits alimentaires, du producteur au consommateur.
Lors de sa séance du 11 mai 2016, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a adopté un avis et un rapport les concernant, s'alarmant d'un modèle dominant en crise, marqué par la prééminence de la grande distribution et des groupes industriels. Les grandes enseignes assurent ainsi plus de 70 % de l'approvisionnement alimentaire en France et poursuivent leur concentration par leur récent regroupement en quatre centrales d'achat. Leurs fournisseurs sont pour 98 % des petites, moyennes et très petites entreprises (PME et TPE), disséminées sur tout le territoire national, soit plus de 16 200 sociétés. Le CESE déplore que la guerre des prix « déséquilibre la chaîne de valeurs, fragilise tous les acteurs économiques, sape la cohésion sociale et génère défiance et suspicion ».
C'est pourquoi il lui demande si elle compte inspirer son action des préconisations du CESE, qui plaide pour un meilleur équilibre des négociations commerciales, le développement des circuits de proximité par la territorialisation et le renforcement de l'information et de la sensibilisation du consommateur quant aux impacts de ses choix.

- page 2622

Transmise au Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt


Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt publiée le 20/10/2016

Le conseil économique, social et environnemental (CESE) a adopté le 11 mai 2016 un avis sur les circuits de distribution des produits alimentaires. Il y liste un certain nombre de préconisations visant à réunir les conditions d'un meilleur équilibre des relations commerciales, à développer les circuits de proximité et à informer le consommateur. Pour assurer un meilleur équilibre des relations commerciales, le CESE préconise de mesurer les impacts de la loi de modernisation de l'économie (LME). Une étude d'impact de la LME a été commandée par le ministère en charge de l'économie à des chercheurs français experts sur ces questions. Le ministère chargé de l'agriculture est associé à cette commande. Les résultats de cette analyse sont attendus pour la fin de l'année 2016. Le conseil milite également pour des contrats pluriannuels et pour faire des organisations de producteurs des interlocuteurs privilégiés dans les négociations commerciales. Le projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dans sa version issue de la première lecture, répond à ces préconisations. Un amendement du Gouvernement adopté par les parlementaires prévoit la possibilité pour les entreprises agroalimentaires de négocier des contrats pluriannuels pour une période maximale de trois ans, afin de disposer d'une meilleure visibilité sur leurs prix et leurs volumes. Ces contrats intégreront une clause obligatoire de révision des prix qui pourra s'appuyer sur des indices publics de coûts de production. De plus, pour les filières soumises à contractualisation écrite obligatoire, le texte prévoit la mise en place d'un accord-cadre entre les acheteurs et les organisations de producteurs (OP) ou associations de producteurs (AOP) afin de renforcer le pouvoir de négociation des producteurs. Il est également prévu de prendre en compte de manière obligatoire les prix de vente des produits transformés pour la fixation des prix payés aux agriculteurs, ainsi que l'obligation de faire référence aux prix payés aux producteurs lors des négociations commerciales afin d'assurer une juste répartition de la valeur. Enfin, plus généralement, plusieurs actions sont menées pour améliorer les relations commerciales. L'observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, en livrant une information objective et partagée par tous, permet d'établir un dialogue constructif entre les différents maillons de la filière. De plus, un « comité de suivi des relations commerciales » a été mis en place en 2014, dont la mission est notamment de suivre le déroulement des négociations commerciales. Lors de ces réunions, présidées par les cabinets des ministres chargés de l'économie, de la consommation et de l'agriculture, les professionnels sont invités à faire le point sur le déroulement des négociations commerciales, en faisant notamment état des remontées de leurs adhérents et des difficultés qu'ils rencontrent sur le terrain. Il s'agit de permettre un dialogue entre les différents maillons de la filière, d'insister sur le respect de la loi et d'inciter aux bonnes pratiques, notamment avec la présentation de l'évolution du label relations fournisseur responsables. S'agissant des recommandations relatives à l'information du consommateur, le CESE préconise dans son rapport de mettre davantage en lumière les produits bénéficiant de signes officiels de l'origine et de la qualité (SIQO), et ce en adéquation avec les attentes sociétales, par la mise en place d'un signe distinctif commun en plus de leur identification respective, par la production d'une forme simplifiée et homogénéisée des cahiers des charges et par une réflexion sur la cohérence des différents cahiers des charges en matière de traçabilité, critères environnementaux, modes de production. Les SIQO portent des démarches différentes selon les critères sur lesquels ils fondent leur existence et auxquels ils se conforment pour communiquer. Ces démarches font l'objet d'engagements précis dans leurs cahiers des charges respectifs et sont contrôlés à ce titre. L'encadrement de ces signes et de leur identification est européen, sauf pour ce qui concerne le label rouge. Pour élargir leur notoriété et leur visibilité, assurer la protection de ces signes, leur développement et leur promotion, le ministère en charge de l'agriculture a doté de moyens financiers deux établissements que sont l'institut national de l'origine et de la qualité (INAO) et l'agence bio. D'importants moyens européens sont par ailleurs mobilisables pour promouvoir ces dispositifs que ce soit à travers le programme européen d'information et de promotion doté d'un budget qui atteindra 200 M€ en 2019 qu'à travers les actions d'information de la politique agricole commune. Leur promotion est doublée d'aides du fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) pour promouvoir un cahier des charges en particulier et pour prendre en charge les coûts de certification des producteurs, contribuant largement à la diffusion des dispositifs tant auprès des filières professionnelles que des acheteurs et consommateurs. Si la notoriété des SIQO est forte grâce à ces différentes politiques convergentes, elle peut encore être renforcée et leurs valeurs davantage mises en avant. C'est pourquoi le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt a demandé en janvier 2016 à l'INAO de proposer, avec l'ensemble des filières professionnelles et experts, un cadre de mesures agro-écologiques. Ces mesures doivent pouvoir être déclinables par les différentes filières que ce soit dans leur cahier des charges ou par d'autres vecteurs. Ce travail est en cours au sein des instances de l'INAO et se traduira d'ici la fin de l'année par une mise à disposition auprès des organismes de défense et de gestion de ces signes de mesures types et actions par filière visant à améliorer ou matérialiser des pratiques plus protectrices des terroirs et plus respectueuses de l'environnement et du bien être animal. Enfin la visibilité des signes et de leurs cahiers des charges est également favorisée par la disponibilité aisée des référentiels. Les cahiers des charges sont en effet mis en ligne ainsi que leurs « documents uniques » (condensé des cahiers des charges). Tous ces éléments et actions contribuent à la visibilité et au développement des SIQO et de leurs pratiques. S'agissant des recommandations portant sur le développement des circuits de proximité par la territorialisation, il convient de rappeler que la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt du 13 octobre 2014 prévoit l'élaboration de projets alimentaires territoriaux pour favoriser l'émergence de ces organisations collectives dans les territoires. Ils doivent être élaborés de manière concertée à l'initiative de l'ensemble des acteurs d'un territoire et s'appuyer sur un diagnostic partagé faisant un état des lieux de la production agricole locale et du besoin alimentaire exprimé au niveau d'un bassin de vie ou de consommation, aussi bien en termes de consommation individuelle que de restauration collective. Un travail est en cours avec les acteurs concernés pour mettre en oeuvre à l'automne un dispositif de reconnaissance officielle de ces démarches, qui feront par ailleurs l'objet d'une attention spécifique dans le cadre du prochain appel à projets du programme national de l'alimentation. Pour accompagner ces démarches, plusieurs fonds sont mobilisables, dont le FEADER. Il peut aider à la structuration de filières d'approvisionnement pérennes et viables pour les agriculteurs, adaptées aux besoins et aux contraintes spécifiques des marchés qu'elles ciblent. Ces fonds sont pilotés depuis 2015 par les régions, au travers des programmes régionaux de développement rural, que chaque région établit en sélectionnant les mesures qui lui semblent les plus pertinentes pour le développement de son territoire. Enfin, le ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt met en place des mesures pour faciliter l'accès des gestionnaires de la restauration collective publique à des produits issus des circuits courts : amélioration des connaissances, guide pratique pour favoriser l'approvisionnement local et de qualité en restauration collective, promotion de projets de regroupement de l'offre (plate-formes), sites internet pour la promotion voire la commande des produits locaux auprès de fournisseurs… L'objectif poursuivi est d'encourager ce type d'initiatives innovantes et de mutualiser les expériences sur le territoire pour favoriser leur développement.

- page 4583

Page mise à jour le