Question de M. COURTEAU Roland (Aude - Socialiste et républicain) publiée le 25/08/2016

M. Roland Courteau attire l'attention de Mme la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat qu'au lendemain de la COP 21, elle avait diligenté une mission chargé de lui faire des propositions, notamment, sur la réforme du marché européen du carbone.
Demande qui fut complétée par l'étude de la mise en œuvre d'un prix plancher, pour la production d'électricité et celle de la mise en place d'un prix plancher du carbone, en France, dès cette année.
Il lui indique que ce rapport confié à Messieurs Pascal Canfin, Alain Grandjean et Gérard Mestrallet, lui ayant été remis le 11 juillet 2016, il souhaiterait connaître l'ensemble des propositions avancées par les trois auteurs, ainsi que celles susceptibles d'être retenues.

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Réponse du Ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargé des relations internationales sur le climat publiée le 27/10/2016

La présidente de la COP 21, a missionné Pascal Canfin, Alain Grandjean, et Gérard Mestrallet sur le renforcement de la tarification carbone dans le monde. Ils étaient chargés de faire des propositions concrètes pour la mise en œuvre de la proposition française de corridor de prix sur le marché carbone européen, pour une mesure nationale en vue d'accélérer la sortie du charbon en France, et pour élargir le périmètre de la tarification carbone dans le monde. Après avoir auditionné plus de 80 experts de la tarification carbone, les auteurs ont rendu leur rapport le 11 juillet 2016 [1]. Ce rapport fait 10 propositions pour un prix du carbone efficace, prévisible et coordonné :Proposition 1 : A partir de 2020, adapter les trajectoires de réductions d'émissions du marché carbone européen à l'objectif climatique à horizon 2050, en portant le facteur de réduction du plafond d'émission de la valeur de 2,2 % retenue par le Conseil européen, à une valeur comprise entre 2,4 % et 2,6 % par an et accélérer la mise en réserve du surplus de quotas.Proposition 2 : Introduire un corridor de prix du carbone au niveau européen sur le modèle californien et québécois, avec un prix de réserve sur les enchères permettant de ne pas mettre des quotas sur le marché si le prix minimum n'est pas atteint lors des enchères.Proposition 3 : Fixer le prix plancher selon la trajectoire suivante : entre 20 € et 30 € en 2020, avec une augmentation annuelle de 5 à 10 % afin de dépasser 50 € en 2030, afin d'accélérer la transition vers les solutions les moins carbonées, notamment dans le secteur de l'énergie. Fixer le prix plafond à 50 € en 2020 avec une croissance annuelle similaire à celle du prix plancher. Proposition 4 : Encourager les États à cibler l'usage des revenus de la mise aux enchères des quotas d'émissions sur l'innovation bas carbone, sur la maîtrise des conséquences sociales et économiques du prix plancher et sur le soutien aux pays en développement dans la lutte contre les changements climatiques.Proposition 5 : Introduire un système de révision régulière (tous les 5 ans) des prix plancher et plafond, par un dialogue informé entre les instances européennes et un comité consultatif indépendant, sur la base des meilleures données disponibles, notamment sur le rythme de rehaussement de l'ambition européenne prévu par l'accord de Paris. Proposition 6 : Dans tous les cas former une coalition ambitieuse auprès des autres États membres et décideurs européens, pour faire prospérer la tarification carbone dans l'Union européenne et en particulier l'idée d'un corridor de prix sur le marché carbone européen en complément de la régulation par les quantités. Proposition 7 : Privilégier la production d'électricité au gaz par rapport à celle au charbon en mettant en place une norme technique sur la base des émissions de gaz à effet de serre des centrales, ou une taxe sur les centrales charbon, en augmentant une taxe existante sur le charbon comme la TICC[2], ou en mettant en place une taxe différenciée dont le niveau tiendrait compte du rendement thermique des centrales.Proposition 8 : Promouvoir un élargissement rapide de la tarification du carbone pour atteindre au plus vite une couverture d'au moins 25 % des émissions mondiales par des prix du carbone.Proposition 9 : Installer une commission de haut niveau (désignée par l'ONU) pour définir la trajectoire indicative d'un corridor de valeurs sociales du carbone, alignées avec l'objectif des 2°C et les objectifs de transferts Nord - Sud. Proposition 10 : Promouvoir la réouverture des discussions sur l'introduction d'une composante CO2 dans la fiscalité énergétique européenne dans le cadre du dialogue qui s'ouvrira en 2018 sur l'ambition de la politique climatique européenne. Le rapport a été remis à la ministre chargée de l'environnement, qui a accueilli favorablement ses conclusions. Plusieurs propositions ont été suivies d'effets. En particulier, suite aux entretiens réalisés par la mission et à la publication du rapport, plusieurs amendements ont été déposés par des députés européens de la commission environnement dans le cadre de la révision du marché carbone européen pour sa phase 4. Ces amendements visent à donner plus de visibilité au prix du carbone en mettant en place un corridor de prix du carbone ou un prix plancher (amendements 261, 293, 297 et 298), ainsi qu'à renforcer le marché carbone en révisant le facteur de réduction du plafond d'émission (suite des propositions 1, 2 et 3). Par ailleurs, les auteurs du rapport soutiennent dans leur proposition 9 la mise en place d'une commission de haut niveau pour définir la trajectoire indicative d'un corridor de valeurs sociales du carbone, alignées avec l'objectif de l'Accord de Paris. Cette recommandation est soutenue activement par la ministre et le Président de la République, et pourrait voir le jour dans le cadre de la CPLC (Carbon pricing leadership coalition). Sur proposition de Ségolène Royal, le Président de la République a en effet proposé lors du G20 en septembre 2016 « une commission d'experts de haut niveau pour fixer des cibles de prix du carbone mondiales ». Enfin, ainsi qu'annoncé par le Président de la République lors de la conférence environnementale 2016, un prix plancher du carbone sera mis en place au 1er janvier 2017 sur le secteur électrique français. Il sera concentré sur les centrales à charbon, comme suggéré par la proposition 7, de telle sorte que le gain environnemental soit significatif tout en préservant la sécurité du système électrique. Pour finaliser les modalités techniques de cette mesure, la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargé des relations internationales avec le climat, a missionné, conjointement avec le ministre des finances et des comptes publics et le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, les inspections générales des ministères concernés. Leurs premières conclusions sont attendues de façon à inscrire la mesure dans le prochain projet de loi de finances. [1] Le rapport est disponible sur http://www.developpement-durable.gouv.fr/La-mise-en-place-d-un-prix-du.html [2] Taxe intérieure de consommation sur les houilles, lignites et cokes.

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