Question de M. GUILLAUME Didier (Drôme - Socialiste et républicain) publiée le 09/11/2016

Question posée en séance publique le 08/11/2016

M. Didier Guillaume. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur et porte sur le fichier des titres électroniques sécurisés.

L'État veut accentuer la généralisation du recours aux téléprocédures dans le cadre du plan Préfectures nouvelle génération. Ce fichier a notamment pour but de moderniser et sécuriser la délivrance ou le renouvellement des titres réglementaires et de lutter contre la fraude documentaire.

Ces évolutions nous semblent indispensables. (M. Michel Raison s'exclame.) Vu leur importance, le débat doit avoir lieu au Parlement. C'est essentiel et je remercie le Premier ministre et le ministre de l'intérieur d'avoir proposé un tel débat. L'exigence démocratique et la transparence totale dans laquelle vous travaillez me semblent être une bonne chose. (Exclamations sur plusieurs travées du groupe Les Républicains. – M. Loïc Hervé s'exclame également.)

Mais il faut rationaliser ce débat et ne pas nous laisser déborder par la suspicion à l'égard de l'État, alors que celui-ci souhaite, justement, mieux protéger nos identités. Des interrogations légitimes, des craintes, justifiées ou non, ont vu le jour. Il faut y répondre.


Plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains. C'est Axelle Lemaire qui va le faire…


M. Didier Guillaume. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous assurer que ce fichier offre toutes les garanties de sécurité (Exclamations et marques d'ironie sur les travées du groupe Les Républicains.) et de protection pour empêcher tout piratage ?

Pouvez-vous nous attester qu'aucune réversibilité du système ne sera possible techniquement et que les données biométriques serviront bien à la seule authentification ?


M. Gaëtan Gorce. Non !


M. Didier Guillaume. Pouvez-vous nous confirmer que toute utilisation frauduleuse sera repérée et potentiellement sanctionnée ?


M. Gaëtan Gorce. Non !


M. Didier Guillaume. Monsieur le ministre, vous venez de mener avec succès une opération humanitaire de grande ampleur, à Calais et à Paris dans le quartier de Stalingrad. De nombreux réfugiés sont accueillis dans beaucoup de villes de France. Nous allons commémorer les terribles attentats du 13 novembre et vos services sont toujours mobilisés pour la sécurité des Français.

Dans ce contexte, nous voulons de nouveau vous témoigner notre confiance (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.), vous apporter notre soutien (Exclamations sur les mêmes travées.) et vous dire notre fierté de partager avec vous le sens de l'État et de la responsabilité, dont je souhaiterais qu'ils soient partagés sur toutes les travées de cet hémicycle. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur plusieurs travées du groupe RDSE.)

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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 09/11/2016

Réponse apportée en séance publique le 08/11/2016

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur. Monsieur le président Guillaume, votre question appelle une réponse très précise. Mettre en place des titres sécurisés est une nécessité. Cette obligation dans laquelle nous nous trouvons pour assurer la qualité du service public avait déjà fait l'objet d'une initiative en 2012 : une carte comportant une puce, permettant l'identification des détenteurs et l'utilisation de données biométriques avait été prévue. Le Conseil constitutionnel a invalidé cette décision législative, parce qu'elle permettait, justement, d'identifier les détenteurs de titres.

Nous avons décidé, dans le cadre du plan Préfectures nouvelle génération, de reprendre ce dossier. Il est destiné, pour le service public préfectoral, à permettre la mise en place de titres sécurisés, en tenant compte rigoureusement de ce qu'a dit le Conseil constitutionnel.

Aujourd'hui, il existe déjà un fichier dénommé fichier national de gestion, qui gère 59 millions de titres, mais qui, datant de 1987, est obsolète. Il en existe aussi un pour la gestion des passeports biométriques, qui a été créé en 2008. Nous avons décidé de fusionner ces deux fichiers.

Est-ce que cela pose un problème pour le respect des données personnelles ? Bien entendu, non, parce qu'il ne sera pas possible, avec ce dispositif, de procéder à l'identification des détenteurs de titres, mais seulement de vérifier, pour ceux qui veulent faire renouveler leur titre, que les données biométriques dans la base correspondent bien à celles du demandeur.

C'est donc un processus de sécurisation et de lutte contre la fraude, qui, en rien, ne remet en cause la protection des données personnelles. Au contraire, celle-ci sera renforcée, puisque certaines manipulations ne faisaient pas l'objet, dans le précédent fichier, d'une traçabilité suffisante. Désormais, tout sera traçable.

Il n'y aura pas de réversibilité, pour la bonne et simple raison que c'est un texte réglementaire, conformément à ce qu'ont dit la CNIL et le Conseil d'État, qui a été pris par le Gouvernement. Il définit les conditions de consultation que je viens d'indiquer et, pour les modifier, il faudrait passer par une loi et, éventuellement, modifier la Constitution. Le dispositif est donc totalement sécurisé sur le plan juridique.

Ainsi, nous présentons un fichier qui permet de moderniser le service public, de protéger davantage les données personnelles et d'assurer avec beaucoup plus d'efficacité la lutte contre la fraude documentaire, qui est un élément déterminant dans la lutte contre le crime organisé. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur plusieurs travées du groupe RDSE.)

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