Question de M. PELLEVAT Cyril (Haute-Savoie - Les Républicains) publiée le 15/12/2016

M. Cyril Pellevat attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès du ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, chargée des collectivités territoriales sur la principale dotation de fonctionnement de l'État aux collectivités territoriales : la dotation globale de fonctionnement (DGF).
Depuis 2015, les communes et intercommunalités peuvent connaître sur internet le montant de leur DGF pour l'année en cours afin de préparer leurs budgets. Cette transparence permet de constater des inégalités importantes entre les communes. Et elle révèle une ponction énorme sur les collectivités qui représentera au total 28 milliards entre 2014 et 2017. Les collectivités territoriales peinent face à cette situation, ainsi que toute l'économie de nos territoires ruraux. Les conséquences sur les finances publiques locales sont lourdes, les collectivités représentant 70 % de l'investissement public.
Il aimerait connaître sa position face à l'aggravation de l'état de santé financière des collectivités et lui demande, en cette fin de quinquennat, de faire un état des lieux de la DGF.

- page 5432


Réponse du Ministère de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales publiée le 25/01/2017

Réponse apportée en séance publique le 24/01/2017

M. Cyril Pellevat. Monsieur le ministre, je souhaite vous interroger sur la principale dotation de fonctionnement de l'État aux collectivités territoriales : la dotation globale de fonctionnement, ou DGF. Je tiens à préciser que cette question a été déposée trois mois avant l'examen de la loi Montagne au Sénat, ce qui explique certains aspects redondants.

Depuis l'an dernier, les communes et intercommunalités peuvent connaître sur internet le montant de leur DGF pour l'année en cours afin de préparer leur budget.

Cette transparence permet de constater des inégalités importantes entre les communes. Les injustices dans la répartition de la DGF sont d'autant plus douloureuses quand les dotations baissent, comme c'est le cas aujourd'hui.

La ponction énorme réalisée sur les collectivités s'élèvera au total à 28 milliards d'euros entre 2014 et 2017.

Les collectivités territoriales peinent à faire face à cette situation, de même que toute l'économie de nos territoires ruraux. Les conséquences sur les finances publiques locales sont lourdes, les collectivités représentant 70 % de l'investissement public.

Je dirai également un mot du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, le FPIC. Le maire de Chamonix, que vous avez rencontré récemment, monsieur le ministre, m'indiquait que sa commune de 9 000 habitants allait débourser cette année – commune et intercommunalité ensemble – 3,1 millions d'euros, soit une augmentation de 46 % en un an, pour un budget de fonctionnement de la commune de 23 millions et de l'intercommunalité de 21 millions d'euros.

Même avec des économies drastiques sur le fonctionnement depuis plusieurs années, l'investissement est en forte rétraction…

Que pouvez-vous nous répondre, monsieur le ministre, devant l'aggravation de la santé financière des collectivités ?

Je souhaite rappeler ici que nous sommes convenus dans cette enceinte, lors de l'examen de la loi Montagne, que le FPIC et la dotation globale de fonctionnement devront tenir compte des surcoûts et des aménités de la montagne, mais aussi des spécificités des zones frontalières, compte tenu des variations de revenus que peut entraîner la présence de travailleurs étrangers. Sur ce sujet, j'aurais aimé que vous me confirmiez, monsieur le ministre, que ce dispositif exclut toute autre interprétation. Avez-vous eu des nouvelles de Bercy sur cette question ?

Cet élément est notamment important pour les communes de mon département, frontalier de la Suisse, comme vous le savez.

Quant à une nécessaire réforme de la DGF, le rapport d'information de nos collègues Charles Guené et Claude Raynal, publié en juin 2016, a mentionné la nécessité de travailler sur la définition de la « population DGF », ou sur le calcul des indicateurs, tels le potentiel fiscal, le potentiel financier, l'effort fiscal, le coefficient d'intégration fiscale. Ce calcul des indicateurs est imparfait et conduit à ce que ces indicateurs ne reflètent pas correctement la situation des collectivités.

La Cour des comptes a publié, en décembre dernier, un intéressant rapport sur le rôle des concours financiers de l'État au secteur communal dans l'explication des disparités de dépenses par habitant entre collectivités territoriales comparables.

Ces disparités varient du simple au triple pour les communes et du simple au double pour les blocs intercommunaux. De même, les montants de dotation par habitant fluctuent, eux aussi, du simple au triple.

Selon la Cour, la dotation forfaitaire des communes expliquerait à elle seule une part importante de ces écarts.

La Cour des comptes recommande une véritable réforme de la DGF pour « réduire la composante figée des dispositifs forfaitaires au profit d'un mode de calcul tenant meilleur compte de la réalité des charges auxquelles sont confrontées les collectivités ». Cette appréhension des charges des collectivités est importante.

L'articulation des dispositifs de péréquation verticale – dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale, ou DSU, dotation de solidarité rurale, ou DSR, dotation nationale de péréquation, ou DNP – et de la péréquation horizontale – FPIC – est également fondamentale.

Que pouvez-vous nous dire à ce sujet, monsieur le ministre ? Vous l'aurez compris, j'aimerais que vous nous fassiez, en cette fin de quinquennat, un « état des lieux » de la DGF.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, votre question est vaste. (M. Cyril Pellevat opine.) Elle recouvre à peu près tous les problèmes de fiscalité locale, et il me sera bien difficile d'y répondre en deux minutes.

Commençons par nous souvenir de l'état déplorable des finances publiques en 2012. Le Premier ministre de l'époque, aujourd'hui candidat à la présidence de la République, parlait d'un État en faillite.

Nous avons décidé, avec courage, de nous atteler au redressement. Ce fut plutôt un succès puisque nous sommes aujourd'hui dans les normes bruxelloises, le déficit public ayant été ramené de 5,5 % à moins de 3 %.

L'État a donné l'exemple à travers un plan d'économies de 50 milliards d'euros entre 2014 et 2019. De même, les collectivités ont été appelées à faire un certain nombre d'efforts, en particulier via la réduction des dotations. Elles l'ont fait avec beaucoup de sérieux et de courage, et je tiens à leur rendre hommage.

Elles en ont d'ailleurs profité pour mettre de l'ordre dans leurs budgets de fonctionnement, ce qui a permis de renflouer puissamment leur capacité d'autofinancement.

Dans le même temps, le Gouvernement, conscient de la baisse de l'investissement public – vous l'avez souligné, les collectivités représentent 70 % dudit investissement –, a décidé d'augmenter la dotation d'équipement des territoires ruraux, la DETR, de 62 % – elle est ainsi passée de 600 millions d'euros à 1 milliard d'euros en trois ans – et de créer le fonds de soutien à l'investissement local, le FSIL, géré par mon ministère et doté de 1 milliard d'euros l'année dernière et de 1,2 milliard cette année – 600 millions d'euros pour la ruralité et 600 millions pour l'investissement.

Ceci s'ajoutant à cela, nous assistons au redémarrage de l'investissement public. Les collectivités ont repris leurs investissements. Cela commence déjà à se sentir. L'objectif est donc atteint. Nous souhaitions en effet que les collectivités mettent de l'ordre dans leurs budgets pour que l'investissement reprenne. Et qui dit investissement, dit croissance, et qui dit croissance, dit emplois.

Nous avons atteint cet objectif en menant une politique contractuelle avec l'ensemble des collectivités : avec les régions, à travers le pacte État-régions, signé par le Premier ministre et le président Richert voilà quelques mois, et financé par l'État de manière significative ; avec les métropoles – vous ne l'ignorez pas, monsieur le président (Sourires.) – à travers le pacte État-métropoles, dans lequel l'État s'engage aux côtés des métropoles.

Il faut encore évoquer le plan « 500 000 actions de formation » mis en œuvre dans le cadre d'une plateforme État-régions

Nous avons donc créé les conditions de la reprise de l'investissement public et nous sommes parvenus ensemble à ce résultat.

Concernant la DGF, il faut la réformer ; elle est inéquitable, illisible, incompréhensible. C'est la raison pour laquelle le Président de la République a annoncé, lors du Congrès des maires, que la part de l'effort du bloc communal dans le redressement des comptes publics serait réduite de moitié pour 2017, soit 1 milliard au lieu de 2 milliards d'euros. C'est donc 1 milliard d'euros supplémentaires pour les caisses des collectivités.

Le Président de la République en a profité pour annoncer un certain nombre de mesures allant aussi, je crois, dans le bon sens pour les collectivités.

Cela fait des années que l'on évoque le caractère injuste de la péréquation en disant qu'il y a des communes riches et des communes pauvres. Quand on a fait la péréquation verticale, de l'État vers les collectivités, tout le monde l'a bien évidemment saluée. Quand on fait la péréquation horizontale entre collectivités, cela fait plus mal aux collectivités bien dotées qu'aux autres. Je comprends que le maire de Chamonix, que nous avons reçu ensemble et pour lequel j'ai la plus grande estime, se plaigne. Rassurez-vous – si tant est que cela doive vous rassurer –, je préside aussi une intercommunalité fortement frappée par la participation au FPIC.

Le Président de la République a annoncé, lors de ce congrès, que la réforme de la DGF était remise à 2018, dans le cadre d'un projet de loi de finances « collectivités », que l'ensemble des associations appellent de leurs vœux et c'est une bonne chose.

Enfin, pour ce qui est des travailleurs saisonniers, c'est-à-dire les Français qui vont travailler en Suisse et qui y paient leurs impôts, nous en avons déjà parlé lors de l'examen de la loi Montagne. Nous pourrons en reparler, mais ce que je vous ai dit alors est bien confirmé : il n'y aura pas de modification.

M. le président. La parole est à M. Cyril Pellevat.

M. Cyril Pellevat. Je vous remercie, monsieur le ministre, de ces éléments de réponse.

En Haute-Savoie, les collectivités nous font savoir que la baisse de la DGF et le prélèvement du FPIC ont des conséquences graves notamment sur l'investissement, en particulier pour les pistes de ski.

S'agissant du FPIC, il importe de tenir compte de la spécificité et de ne pas revenir sur la compensation genevoise. C'est ce qui avait été dit notamment dans le cadre de la commission mixte paritaire avec les écrits d'Annie Genevard.

- page 752

Page mise à jour le