Question de Mme FÉRAT Françoise (Marne - UC) publiée le 14/12/2017

Mme Françoise Férat attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les solutions envisagées pour pallier les désagréments de la nouvelle formule du Lévothyrox.
Personne n'a pu être insensible aux questions soulevées par des patients et des professionnels de santé à propos de la nouvelle formulation du Lévothyrox prescrit dans le traitement de l'hypothyroïdie, dont les effets secondaires semblent induits par cette modification.
La mobilisation de dizaine de milliers de personnes dans la presse et les réseaux sociaux, les débats et témoignages des spécialistes médicaux dans les médias écrits, télévisuels ou radios sur cette question n'ont pu qu'attirer l'attention.
Si le principe actif du médicament, la lévothyroxine, reste identique, de nouvelles substances ont été incorporées. Bien que ce changement, demandé par l'agence nationale de la sécurité du médicament, améliore la stabilité chimique du médicament dans le temps, il semble produire des effets secondaires (vertiges, maux de tête, crampes, fatigue intense…). Ces troubles, inexistants avec l'ancienne formule du Lévothyrox, ne s'atténuent pas dans le temps, à moins qu'on ne parle d'une assimilation sur plusieurs années. De nombreux témoignages concordent en ce sens que les effets secondaires ne se sont pas estompés au bout de plusieurs mois.
Face à la détresse des patients, l'ancienne formule de ce médicament a été réintroduite sur le territoire français de manière transitoire et temporaire. La plupart de ces médicaments viennent de pays européens comme l'Allemagne ou l'Italie. Si le Gouvernement pouvait envisager la coexistence de ces deux formules de manière permanente, les patients auraient le choix de leur formule en fonction de leurs réactions et de l'apparition d'effets indésirables ou non.
Elle lui demande de donner des engagements précis et satisfaisants pour les malades.

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Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 28/12/2017

Les médicaments à base de lévothyroxine sodique sont indiqués pour traiter les hypothyroïdies (insuffisance de sécrétion de la glande thyroïde ou absence de celle-ci) ou les situations où il est nécessaire de freiner la sécrétion d'une hormone stimulant la thyroïde, appelée TSH (Thyroid Stimulating Hormone). Un arrêt de traitement peut engager le pronostic vital de certains patients, notamment ceux ayant subi une ablation de la thyroïde (thyroïdectomie). À la suite d'une enquête de pharmacovigilance et afin de garantir une stabilité plus importante de la teneur en substance active (lévothyroxine) tout le long de la durée de conservation du produit, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a demandé à Merck Santé la modification de la formule de Lévothyrox, comprimé sécable. Précisément, cette modification dans la composition a porté sur les seuls excipients (ajout de mannitol et d'acide citrique), la substance active demeurant identique. La nouvelle formule a été mise sur le marché à partir de mars 2017. Dans ce contexte, les professionnels de santé et les patients ont été informés en amont de la commercialisation de la nouvelle formule de Lévothyrox. Ont notamment été consultés, lors de l'élaboration des documents d'information, les associations de patients « Vivre Sans Thyroïde » et l'Association française des malades de la thyroïde (AFMT), la Société française d'endocrinologie (SFE), la Société française d'endocrinologie et de diabétologie pédiatrique (SFEDP), le Conseil national de l'ordre des pharmaciens (CNOP) ou encore le collège de la médecine générale (CMG). À l'issue de ces échanges, outre la lettre d'information, validée par l'ANSM, adressée par Merck Santé aux médecins généralistes, endocrinologues, pédiatres, chirurgiens ORL, gynécologues obstétriciens, cardiologues, gériatres, pharmaciens officinaux et pharmaciens hospitaliers, également diffusée sur le site internet de l'ANSM (www.ansm.sante.fr), l'agence a publié un point d'information et un document « questions - réponses ». Ces documents ont été adressés aux sociétés savantes concernées et au CNOP. L'information diffusée indique en particulier que les modifications apportées à la formule de Lévothyrox ne changent ni l'efficacité ni le profil de tolérance du médicament. Néanmoins, par précaution et en tenant compte du domaine thérapeutique concerné, et bien que la bioéquivalence entre l'ancienne et la nouvelle formule ait été démontrée, l'ANSM a recommandé, pour certains patients, de réaliser un dosage de TSH quelques semaines après le début de la prise de la nouvelle formule. En effet, la lévothyroxine étant une hormone thyroïdienne de synthèse à marge thérapeutique étroite, l'équilibre thyroïdien du patient peut être sensible à de très faibles variations de dose. Des communiqués de presse, des courriels ciblés destinés aux professionnels de santé ou encore des mailings ont continué à être envoyés par Merck Santé jusque courant avril 2017, alors que la commercialisation de la nouvelle formule de Lévothyrox avait débuté en mars. Au total, des informations récurrentes ont été envoyées aux professionnels de santé entre février et avril 2017. Puis, suite aux informations transmises par les associations de patients et les patients eux-mêmes, faisant état d'effets indésirables ressentis avec la nouvelle formule de Lévothyrox, les associations de patients ont été reçues en juillet 2017 à l'ANSM. En août, a été mis en place un message spécifique sur le portail de déclaration des vigilances, le document « questions - réponses » de l'ANSM a été actualisé et un numéro vert a été ouvert. Deux rencontres ont enfin été organisées, les 6 et 8 septembre 2017, par la ministre des solidarités et de la santé, avec l'association « Vivre sans thyroïde » et l'association « France Asso Santé » puis avec l'Association française des malades de la thyroïde (AFMT), pour les informer des mesures prises pour accompagner les patients touchés par des effets indésirables, pour permettre l'arrivée de médicaments alternatifs sur le marché français, et enfin pour mieux informer à l'avenir les patients et les professionnels de santé sur les médicaments. En effet, des solutions permettant de faire face de manière adéquate à la situation rencontrée par les patients ayant ressenti des effets indésirables avec la nouvelle formule de Lévothyrox ont été mises en place. Sans minimiser ni nier les symptômes ressentis par ces patients, l'agence les a en premier lieu invités à consulter leur médecin traitant ou leur endocrinologue afin que puisse être déterminé le dosage le plus précis et qui leur convient, de la nouvelle formule du médicament. Le seul danger est en effet que les patients arrêtent de prendre leur traitement ; ils ne doivent en aucun cas changer leur traitement eux-mêmes, devant absolument se rapprocher de leur médecin pour toute adaptation. Au vu de la situation, néanmoins, l'ANSM a vérifié la conformité de la nouvelle formule et n'a relevé aucune impureté. Ont en ce sens été mises en ligne sur son site les études de bioéquivalence qui ont été fournies par Merck Santé à l'occasion du changement de formule, les rapports de l'ANSM sur ces études, les analyses confirmant la qualité de la nouvelle formulation, ou encore les données disponibles sur les nouveaux excipients. Une enquête de pharmacovigilance supplémentaire a par ailleurs été initiée, dès la commercialisation de la nouvelle formule, afin d'analyser les signalements d'effets indésirables rapportés. Les premiers résultats de cette enquête ont été présentés lors du comité technique de pharmacovigilance (CTPV), instance siégeant auprès de l'agence, le 10 octobre 2017. Cette analyse intermédiaire de l'enquête porte sur la période allant de fin mars au 15 septembre 2017. À cette date, 14 633 signalements ont été reçus par les centres régionaux de pharmacovigilance (CRPV), représentant 0,6 % des 2,6 millions de patients traités. Sur ce total, les cas rapportés par les patients comme ayant des conséquences sur la vie familiale, professionnelle ou sociale, et les cas les plus documentés, soit 5 062 cas, ont pu être enregistrés prioritairement dans la base nationale de pharmacovigilance (BNPV). Les effets les plus fréquemment rapportés sont la fatigue, les maux de tête, l'insomnie, les vertiges, les douleurs articulaires et musculaires et la chute de cheveux, déjà connus avec l'ancienne formule du médicament. Le recueil des signalements et l'enregistrement dans la BNPV se poursuivent et feront l'objet de publications ultérieures. L'enquête confirme la survenue de déséquilibres thyroïdiens pour certains patients lors du passage de l'ancienne à la nouvelle formule. En effet, tout changement de spécialité ou de formule peut modifier l'équilibre hormonal et nécessiter un réajustement du dosage, ce qui peut prendre un certain délai. Elle conclut que le profil clinique des effets indésirables rapportés avec la nouvelle formule est semblable à celui de des effets indésirables rapportés avec l'ancienne formule. En tout état de cause, l'enquête de pharmacovigilance se poursuit et s'élargit dans le contexte d'arrivée des nouveaux médicaments à base de lévothyroxine. En parallèle, l'ANSM a initié une étude de pharmaco-épidémiologie sur l'ensemble des patients traités. S'agissant ensuite de l'élargissement de l'offre thérapeutique pour les patients, au sujet de laquelle les informations sont régulièrement actualisées sur le site internet de l'agence : des stocks européens de produit strictement équivalent à l'ancienne formulation (Euthyrox, comprimé sécable) ont été mis à disposition depuis début octobre sous forme de conditionnement trimestriel. Ce médicament est accompagné d'une notice traduite en français remise par le pharmacien. Il doit être prescrit exclusivement en dernier recours aux patients, en nombre limité, qui rencontrent des effets indésirables durables. Durant le mois d'octobre 2017, près de 200 000 boîtes ont ainsi été importées, le stock disponible à la mi-novembre étant évalué à 40 000 boîtes environ. Enfin, l'ANSM a demandé à Merck Santé de procéder à une nouvelle importation afin de permettre la continuité des traitements par Euthyrox, comprimé sécable au moment de leur renouvellement. Le médicament L-Thyroxin Henning comprimé, commercialisé en Allemagne par SANOFI, a également été mis à disposition, une notice traduite en français étant remise au patient par le pharmacien. Précisément, la mise à disposition a d'abord porté sur environ 250 000 boîtes (dosages à 25, 50, 100 et 150 microgrammes) ; 50 000 boîtes de dosage à 75 microgrammes sont en outre disponibles progressivement depuis le 30 octobre 2017. Au vu des chiffres de vente, environ 125 000 boîtes étaient encore disponibles le 8 novembre 2017 tous dosages confondus, sachant que de nouveaux approvisionnements sont prévus. Enfin, en accord avec l'ANSM, le laboratoire Serb a augmenté la production du médicament L-Thyroxine Serb, solution buvable en gouttes. Son utilisation doit être réservée prioritairement aux enfants de moins de 8 ans, aux personnes qui présentent des troubles de la déglutition et aux patients ayant déjà eu une prescription de cette spécialité avant le 31 août 2017. Afin d'étendre encore l'offre thérapeutique, d'autres médicaments devraient être commercialisés en France prochainement. Au vu de ce qui précède, il apparaît que des mesures sont effectivement mises en œuvre par l'ANSM afin d'offrir de réelles alternatives thérapeutiques aux patients qui continuent à ressentir des symptômes. Toutefois, la nouvelle formule de Lévothyrox, aujourd'hui largement dispensée, présente une meilleure stabilité tout en ayant strictement la même substance active. Elle apparaît comme étant parfaitement tolérée par une très grande majorité de patients.

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