Question de M. MAUREY Hervé (Eure - UC) publiée le 22/02/2018

M. Hervé Maurey attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur sur les conséquences liées à l'impossibilité pour une régie d'exercer à la fois les compétences eau et assainissement.
De nombreuses régies exerçant la double compétence, eau et assainissement, ont été créées par les collectivités locales. Toutefois, depuis quelques années, il semble qu'une nouvelle interprétation du cadre légal, et notamment de l'article L. 1412-1 du code général des collectivités locales, imposant la création d'une régie pour l'exploitation directe de chaque service public industriel et commercial (SPIC), prévaut.
Cette interprétation juridique a été explicitée dans une réponse du Gouvernement publiée dans le journal officiel du Sénat du 27 juin 2013 (page 1944) à une question écrite. Les collectivités locales se voient désormais opposer cette dernière par les préfets à l'occasion de projets de création ou d'extension d'une régie unique.
Dans sa réponse, le Gouvernement précise également que : « en revanche, il existe certaines possibilités de gestion commune aux services publics d'eau et d'assainissement ». Il ajoute que « l'article L. 2224-6 du code général des collectivités territoriales (CGCT) permet aux communes de moins de 3 000 habitants et aux établissements publics de coopération intercommunale dont aucune commune membre n'a plus de 3 000 habitants d'établir un budget unique des services de distribution d'eau potable et d'assainissement si les deux services sont soumis aux mêmes règles d'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée et si leur mode de gestion est identique ».
Cette exception ne permet toutefois pas aux régies concernées de bénéficier de l'ensemble des avantages tirés du regroupement des deux compétences.
Pour les régies en dehors du champ de l'article L. 2224-6 du CGCT, les coûts induits par cette interdiction de mutualisation sont importants, alors même qu'il est demandé aux collectivités locales une contribution importante à l'effort de réduction des dépenses publiques, et la lisibilité du service public en est réduite.
Aussi, il lui demande s'il compte prendre des mesures pour permettre une plus grande mutualisation des compétences eau et assainissement afin de rationnaliser ces services publics et permettre aux collectivités locales et aux administrés de bénéficier des avantages induits par celle-ci.

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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 12/04/2018

Les articles L. 2224-11 et L. 1412-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) disposent respectivement que les services d'eau et d'assainissement sont financièrement gérés comme des services à caractère industriel et commercial (SPIC) et que les syndicats mixtes, pour l'exploitation directe d'un service public industriel et commercial relevant de leur compétence, constituent une régie. Il résulte ainsi de ces dispositions que, pour chaque SPIC faisant l'objet d'une exploitation directe, il convient de créer une régie distincte. Il est toutefois admis une exception pour les services publics de l'assainissement collectif et non collectif qui, s'ils sont exploités selon des modes de gestion identiques, peuvent être réunis au sein d'une même régie, à condition que la comptabilisation des opérations de ces deux services au sein d'un budget unique soit accompagnée d'un détail analytique permettant de dissocier le coût de chacun des services. La nécessité de procéder à la création d'une régie distincte pour chaque SPIC trouve également sa justification dans les dispositions issues de l'article L. 2224-1 du CGCT, selon lequel les budgets des SPIC exploités en régie doivent être équilibrés en recettes et en dépenses, ainsi que de l'article L. 2224-2 du code précité, qui interdit aux collectivités de rattachement de prendre en charge, dans leur budget propre, des dépenses au titre de ces services. Ainsi, sauf dérogations expressément et limitativement énumérées à l'article L. 2224-2, les SPIC doivent être soumis au principe d'équilibre financier. Enfin, l'existence de régies distinctes pour chaque SPIC permet de s'assurer du respect du principe selon lequel le coût du service doit être répercuté sur ses seuls usagers. Le principe d'équilibre doit ainsi conduire à individualiser par service le coût réel de celui-ci pour le facturer aux usagers proportionnellement au service rendu. Le transfert, dans le cadre d'une régie « multi-services », des éventuels excédents de trésorerie d'un service public à un autre contreviendrait à ce principe, dont le juge administratif assure le respect en appréciant la proportionnalité de la redevance payée par les usagers (Conseil d'État, 30 septembre 1996, société stéphanoise des eaux, n°  156176 et 156509). Les dispositions de l'article L. 2224-6 du CGCT permettent toutefois de déroger à l'obligation de créer une régie distincte par SPIC, pour les communes de moins de 3 000 habitants et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) dont aucune commune membre ne comporte plus de 3 000 habitants. Dans ce cas de figure, il est possible d'établir un budget unique des services de distribution d'eau potable et d'assainissement, à la double condition que ces deux services soient soumis aux mêmes règles d'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée et que leur mode de gestion soit identique. Ce même article précise par ailleurs que le budget et les factures émises doivent faire apparaître la répartition entre les opérations relatives à la distribution d'eau potable et celles relatives à l'assainissement. Compte tenu d'une part de l'augmentation de la taille moyenne des EPCI, liée à la refonte de la carte intercommunale, et d'autre part, du transfert obligatoire des compétences « eau » et « assainissement » aux communautés de communes et aux communautés d'agglomération à compter du 1er janvier 2020, une adaptation des seuils de population permettant d'établir un budget unique des services de distribution d'eau potable et d'assainissement pourrait être étudiée. Pour autant, le Gouvernement n'entend pas généraliser cette possibilité à l'ensemble des EPCI au risque de contrevenir au principe d'équilibre des SPIC qui impose la détermination du coût réel du service afin qu'il puisse être facturé aux usagers, proportionnellement au service rendu.

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