Question de Mme BORIES Pascale (Gard - Les Républicains) publiée le 26/04/2018

Mme Pascale Bories attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur sur les préoccupations des écoles de conduite françaises. Elles subissent en effet l'« uberisation » du secteur et la réglementation qui n'est pas la même que pour les auto-écoles en ligne sur un certain nombre de points : un permis « moins cher », s'affranchissant totalement des charges salariales et de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et employant par ailleurs des formateurs indépendants au statut d'auto-entrepreneurs.
Les professionnels de l'éducation routière constatent un accroissement significatif de l'apprentissage à distance de la conduite proposé par ces sociétés.
Cette concurrence déséquilibrée devient d'autant plus problématique que les auto-écoles rencontrent d'importantes difficultés pour réaliser les inscriptions dématérialisées de leurs élèves au permis de conduire sur le site de l'agence nationale des titres sécurisés (ANTS).
Même si les auto-écoles en ligne proposent à leurs clients d'accomplir ces démarches, huit clients sur dix ne parviennent pas à clôturer leur inscription et se rendent dans une auto-école classique pour leur venir en aide. En raison du temps passé pour effectuer ces démarches une facturation (20€) a été mise en place. Toutefois, elle reste très en-deçà du temps passé par les personnels des auto-écoles -qui n'ont pas été formés à ces démarches spécifiques et complexes- et du taux horaire normalement requis.
Alors que cette téléprocédure était censée réduire les délais d'attente, ces derniers ne cessent d'augmenter, engendrant des reports de l'examen du permis de conduire, faute d'inscription en temps voulu.
Malgré les signes d'amélioration énoncés par le Gouvernement, les difficultés persistent.
Par conséquent, elle souhaiterait connaître les mesures que le Gouvernement compte prendre pour lutter contre les pratiques déloyales des auto-écoles en ligne, ainsi que les mesures mises en place pour faciliter l'enregistrement sur l'ANTS et apporter une assistance locale dans les préfectures.

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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 12/07/2018

L'enseignement, à titre onéreux, de la conduite des véhicules à moteur ne peut être organisé que « dans le cadre d'un établissement agréé », l'école de conduite (article L. 213-1 du code de la route). Cet agrément est délivré par le préfet de département du lieu d'établissement. Au sein de cet établissement, l'enseignement est dispensé par un enseignant titulaire d'une autorisation délivrée également par le préfet de département. L'article R. 212-1 précise que cette autorisation d'enseigner est valable sur l'ensemble du territoire national. L'établissement est défini par l'arrêté du 8 janvier 2001 relatif à l'exploitation des établissements d'enseignement, à titre onéreux, de la conduite des véhicules à moteur et de la sécurité routière comme étant constitué par deux éléments : un exploitant et un local. Jusqu'à l'adoption de la loi n°  2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, l'inscription au permis de conduire ne pouvait se faire que dans le local, ce qui interdisait la conclusion des contrats en ligne. Cette obligation de s'inscrire dans le local, qui était également inscrite dans l'arrêté du 8 janvier 2001, n'existe plus depuis la loi du 6 août 2015 précitée qui a inscrit dans l'article L. 213-2 du code de la route la possibilité de conclure des contrats à distance. Ainsi, sous la seule réserve qu'une évaluation préalable ait été réalisée dans le local ou dans le véhicule, un établissement agréé peut proposer la vente à distance de prestations de formation à la conduite. Par ailleurs, les nouveaux acteurs de l'enseignement de la conduite se distinguent également des établissements traditionnels en ne présentant pas leurs candidats à l'examen. Leurs élèves sont des candidats libres, qui accomplissent eux-mêmes leurs démarches de demande de places d'examen auprès de la préfecture (bureau en charge des examens) de leur lieu de résidence. En outre, les enseignants attachés à l'établissement travaillent en général sous couvert d'un contrat de prestation de services et peuvent donc être basés dans un autre département. Ainsi, en l'état actuel du droit, très récemment précisé par la jurisprudence, rien ne s'oppose à ce qu'un établissement agréé dans un département dispense des cours sur tout ou partie du territoire national. La réglementation du code de la route ne doit pas être un obstacle à l'émergence de nouveaux modèles économiques, dès lors que l'enseignement dispensé permet aux apprentis conducteurs d'apprendre à conduire en toute sécurité et de se présenter avec les meilleures chances de réussite à l'examen. Toutefois, le Gouvernement est très attentif à l'amélioration de la transparence et au respect des autres règles fixées dans le code de la route mais aussi en matière de concurrence et de droit du travail. L'exercice illégal de l'enseignement de la conduite en dehors d'un établissement agréé constitue un délit. À ce titre, deux instructions ont été adressées le 25 mars 2016 et le 6 mai 2017 aux préfets afin que soient diligentées des opérations de contrôles en s'appuyant sur le comité opérationnel départemental anti-fraude (CODAF) présidé conjointement par le préfet et le procureur de la République. Ces dernières rappellent notamment la nature des sanctions administratives et pénales au titre des infractions prévues par le code de la route mais également au regard du droit du travail. Ainsi, les services déconcentrés de l'État ont conduit des opérations de contrôle des moyens utilisés pour l'enseignement de la conduite, notamment les véhicules d'apprentissage qui doivent obligatoirement appartenir à l'établissement agréé, ou être loués par lui ou faire l'objet d'une mise en commun avec un autre établissement agréé. Les contrôles ont également porté sur l'enseignement devant être dispensé par un enseignant de la conduite et de la sécurité routière titulaire d'une autorisation d'enseigner délivrée par le préfet de département. À l'issue de ces campagnes de contrôles, certains préfets ont saisi le procureur de la République conformément aux'dispositions de l'article 40 du code de procédure pénale afin de l'aviser de certaines pratiques frauduleuses. Enfin, la mise en oeuvre du label « qualité des formations au sein des écoles de conduite », qui est entré en vigueur le 2 mars 2018, redonnera notamment toute son importance à un enseignement théorique collectif de qualité, ce qui n'exclut en rien l'utilisation de moyens modernes de simulation et de mise en situation. S'agissant du plan préfectures nouvelle génération, la dématérialisation de la demande d'inscription au permis de conduire est une simplification pour l'usager, qu'il souhaite s'inscrire en candidat libre ou par le biais d'une école de conduite. Cette dernière conserve un rôle important pour accompagner leurs élèves en réalisant ces démarches administratives pour leur compte. Ce rôle est rappelé dans la communication qui accompagne ce plan. En outre, des réunions d'information à l'attention des écoles de conduite ont été organisées dans tous les départements par les services en charge localement de l'organisation des examens du permis de conduire et un guide « pas à pas » leur a été diffusé. D'autres actions ont été entreprises depuis le début des téléprocédures pour aider les écoles de conduite et faciliter l'enregistrement des demandes sur le site de l'Agence nationale des titres sécurisés (ANTS) : numéro d'appel spécifique (coût d'un appel local) ; validation par l'usager de la création de son compte ANTS porté de 24h à 7 jours ; diffusion de supports récapitulant les pièces justificatives par téléprocédure, foire aux questions (FAQ) ; mandat « papier » permettant à l'école de conduite de valider les démarches au nom de leurs clients. À ce jour, la quasi-totalité des écoles de conduite disposent d'un compte professionnel auprès de l'ANTS. Depuis le 6 novembre 2017, date d'entrée en vigueur des téléprocédures, 720 000 inscriptions dématérialisées ont été réalisées. En dehors de cas résiduels, toutes les demandes motivées auprès des services instructeurs ont été traitées. Il est à noter l'absence de remontée particulière indiquant qu'une demande dématérialisée de permis de conduire est plus longue qu'une demande en mode matérialisé qui exigeait un déplacement physique auprès du service chargé des instructions. Les usagers peuvent par ailleurs s'orienter vers les points numériques des préfectures pour faire leurs démarches en ligne. Ils disposent également d'un serveur vocal interactif (34 OO). Enfin, le site service-public.fr est régulièrement mis à jour pour renseigner au mieux les usagers et les écoles de conduite.

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