Question de M. CABANEL Henri (Hérault - SOCR) publiée le 28/06/2018

M. Henri Cabanel appelle l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale sur les procédures de décision de fermeture, de maintien ou d'ouverture de classes en milieu rural. Concernant les fermetures de classes, les informations faites en amont suscitent très souvent une légitime inquiétude. Les conséquences d'une fermeture de classe sont souvent lourdes et, en particulier en milieu rural, peuvent conduire les parents à envisager des temps de parcours beaucoup plus longs pour leurs enfants. Les parents, les élus et les personnels sont rarement sans se mobiliser. Parfois, il s'agirait de faire évoluer les critères. Parfois, il s'agit de contester le fait que les critères s'appliquent bien à la situation en cause. Dans ce cas, il arrive que la décision finale infirme les informations initiales, pour le plus grand bonheur de tous. Pour autant, des angoisses ont été vécues et beaucoup d'énergie a été dépensée qui aurait pu l'être ailleurs. Le soulagement n'efface pas toujours le sentiment d'avoir une épée de Damoclès au-dessus de la classe ou de l'école. Ce sentiment alimente également celui de la défiance contre l'État que les démagogues ne manquent jamais d'attiser. Il serait beaucoup plus productif que les services de l'État sollicitent en amont, c'est-à-dire sur une échéance de plusieurs années, les mairies pour connaître leurs appréciations circonstanciées des évolutions démographiques à venir et discuter de la crédibilité de ces appréciations avec elles avant d'envisager de parler de fermeture de classe. Il lui demande s'il envisage d'aller dans ce sens.

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Réponse du Ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse publiée le 24/10/2018

Réponse apportée en séance publique le 23/10/2018

M. Henri Cabanel. Ma question porte sur les procédures de décision de fermeture, de maintien ou d'ouverture de classes en milieu rural.

Concernant les fermetures de classes, les informations faites en amont suscitent très souvent une légitime inquiétude. Les conséquences de telles fermetures sont souvent lourdes. En milieu rural en particulier, elles peuvent conduire les parents à envisager des temps de parcours beaucoup plus longs pour leurs enfants.

Les parents, les élus et les personnels sont rarement sans se mobiliser lorsqu'une fermeture est envisagée. Parfois, il s'agit de faire évoluer les critères, quelquefois de contester le fait qu'ils s'appliquent bien à la situation en cause. Dans ce dernier cas, il arrive que la décision finale infirme les informations initiales, pour le plus grand bonheur de tous.

Pour autant, des angoisses ont été vécues. Le soulagement n'efface pas toujours le sentiment d'avoir une épée de Damoclès suspendue au-dessus de la classe ou de l'école. Ce sentiment alimente également celui de la défiance contre l'État, que les démagogues ne manquent jamais d'attiser.

J'ai donc une proposition à formuler. Il serait beaucoup plus productif que les services de l'État sollicitent les mairies en amont, c'est-à-dire sur une échéance de plusieurs années, pour connaître leur appréciation, circonstanciée, des évolutions démographiques à venir et discuter de la crédibilité de cette appréciation avec elles avant de parler de fermeture de classe. Envisagez-vous d'aller dans ce sens, monsieur le ministre ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le sénateur Henri Cabanel, je suis en profond accord avec ce que vous venez de dire. La méthode que nous utilisons depuis de nombreuses années, en réalité des décennies, est perfectible, notamment du fait de son annualité et de sa conception même. Elle aboutit à tous les phénomènes que vous avez parfaitement décrits et son processus est parfois totalement inutile, puisque, vous l'avez dit, il arrive que de fausses mauvaises nouvelles soient annoncées avant d'être infirmées, ce qui excite les esprits inutilement.

Pour autant, la méthode actuelle est très sérieuse : elle repose sur les données de l'INSEE, et les inspecteurs d'académie font un travail extrêmement rigoureux, qui aboutit à des décisions à chaque fois très justifiées et rationnelles.

Depuis mon entrée en fonction, j'ai donné comme consigne d'allier esprits de géométrie et de finesse, notamment lorsqu'il s'agit de fermer une école. Je fais d'ailleurs une distinction entre la fermeture d'une classe et celle d'une école : la première obéit à des logiques démographiques assez nettes et transparentes, tandis que la seconde renvoie à des réalités beaucoup plus complexes.

En tout état de cause, nous disposons maintenant d'outils qui nous permettent de faire évoluer les choses.

Je pense notamment aux conventions ruralité, qui ont été enclenchées en deux temps par le sénateur Alain Duran sous le précédent quinquennat. J'ai confirmé sa mission, qui arrive maintenant à son terme et qui va être renouvelée sous une autre forme. Nous avons déjà signé de telles conventions avec cinquante départements et notre objectif est de le faire avec l'ensemble des soixante-six départements ruraux.

Au-delà de cette signature, nous voulons construire une véritable stratégie, en approfondissant les conventions sur le plan qualitatif. C'est dans ce cadre que nous souhaitons développer une vision pluriannuelle, comme vous le réclamez. Il ne s'agit pas seulement de se poser la question de la fermeture ou de l'ouverture de classes ou d'écoles, mais de mettre en marche des méthodes permettant de rendre le territoire attractif. Cela peut passer ou non par des regroupements, mais en tout cas, seules la discussion et l'élaboration d'une vision stratégique partagée peuvent aboutir à ce résultat.

En outre, j'ai lancé, il y a trois semaines, une mission intitulée Inégalités et territoires, qui est placée sous la responsabilité de Mme Azéma et M. Mathiot. Cette mission, qui doit rendre ses conclusions dans quelques mois, nous permettra d'avoir une vision renouvelée de l'éducation prioritaire pour tous les territoires, qu'ils soient urbains ou ruraux. Elle s'attachera à travailler sur les enjeux liés aux écoles rurales, de façon à prendre en compte, là aussi, les particularités du monde rural et à contribuer au renouveau démographique dont nous avons besoin dans ces territoires.

Mme la présidente. La parole est à M. Henri Cabanel, pour répondre à M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, en une minute.

M. Henri Cabanel. Monsieur le ministre, le milieu rural est hétérogène, certaines communes sont très paupérisées – c'est le cas dans mon département, l'Hérault. Dans ces situations, l'école constitue un service public essentiel. Il faudrait donc faire davantage de cas par cas, comme vous l'avez indiqué. Je salue d'ailleurs l'excellent travail réalisé par mon collègue Alain Duran sur ce sujet.

Votre gouvernement a fait voter une loi intitulée pour un État au service d'une société de confiance, qui devait nous permettre de nous appuyer plus sur le dialogue que sur le contrôle. C'est ce que j'avais compris en tout cas… Il faut se servir de cette loi pour discuter davantage avec les maires ruraux et les élus locaux, qui sont parfois démunis face à une population très en colère.

Je discutais récemment avec la maire d'une commune rurale et elle me disait que les élus de ces communes sont un amortisseur social, ce qui est tout à fait juste. Il faut en prendre conscience et, au-delà de critères comptables, il est essentiel de regarder la situation réelle des territoires, afin que l'ensemble des parties prenantes – administration, élus locaux, parents – prenne la bonne décision dans l'intérêt général.

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