Question de M. GROSDIDIER François (Moselle - Les Républicains) publiée le 04/10/2018

M. François Grosdidier attire l'attention de Mme la ministre, auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports au sujet de l'axe Rhône-Saône-Moselle qui semble négligé par l'État du fait d'une multiplication de décisions tendant à contourner cet axe et léser ses riverains. La première est l'abandon de l'écotaxe poids-lourds, en 2013. Cette taxe aurait pourtant permis de faire payer au transit international les infrastructures françaises qu'il use, en même temps que de mettre concrètement en pratique le principe du pollueur-payeur. Cet échec s'est soldé par le versement d'un milliard d'euros indemnités à Ecomouv'. Faute d'écotaxe, ce sont les Lorrains et tous les autres voyageurs qui vont payer un péage sur l'A31 bis, comme l'a décidé l'État le 24 septembre 2018. La deuxième est l'abandon de la liaison fluviale Moselle-Saône pourtant en projet depuis les années 1990. Il était pourtant impératif de relier le Rhin à la Méditerranée par une voie fluviale aux caractéristiques permettant l'accueil des bateaux de transports de marchandises de la classe « Vb ». Ce projet structurant aurait facilité les activités économiques de l'Est au Sud, Metz étant sixième port fluvial français et premier pour les céréales. Bien entendu, un tel projet n'est pas à la portée du seul budget français mais il a toujours été pensé avec des financements européens. Enfin, la liaison ferroviaire Metz-Nice quotidienne va être supprimée par la SNCF dès le mois de décembre. Pour rallier le Sud de la France, les Lorrains devront passer par Strasbourg ou Paris. Cette décision va non seulement pénaliser de nombreux voyageurs par une hausse du prix des billets et des contraintes pratiques, mais aussi les obliger à se reporter sur la voiture, au détriment de considérations écologiques. Il lui demande ce que compte faire le Gouvernement pour évaluer un possible retour de l'écotaxe et renoncer au péage sur l'A31 bis, pour porter le projet de liaison Saône-Moselle à l'échelon européen et pour maintenir cette liaison ferroviaire Metz-Nice.

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Réponse du Ministère auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports publiée le 21/11/2018

Réponse apportée en séance publique le 20/11/2018

M. François Grosdidier. Madame la ministre, l'axe Rhône-Saône-Moselle était déjà le premier axe nord-sud de l'Europe à l'époque romaine. Aujourd'hui, tout y dysfonctionne, en raison d'une série de non-décisions ou de mauvaises décisions ; et le pire est pour demain.

La route de la soie arrive au port de Rotterdam, se prolonge par le chemin de fer jusqu'à Bettembourg, puis se diffuse vers le sud par notre réseau routier et autoroutier, nous engorgeant, nous polluant. Le gouvernement français en répercute le coût sur les usagers français, après avoir renoncé à faire payer le transit international au travers de l'écotaxe poids lourds, alors que celle-ci existe chez nos voisins européens.

La première mauvaise décision a donc été l'abandon de cette taxe, qui aurait pourtant permis de faire payer au transit international ces infrastructures qu'il use, mettant ainsi en pratique le principe du pollueur-payeur.

Ce fiasco s'est soldé par le versement d'un milliard d'euros d'indemnité à Ecomouv', par un manque à gagner, chaque année, d'un milliard d'euros pour financer nos infrastructures de transport et par la perte de centaines d'emplois promis à Metz en compensation des restructurations militaires.

Faute d'écotaxe, ce sont les Lorrains, dont les cent mille travailleurs frontaliers, qui devraient payer un péage sur l'autoroute A31 bis, pour rejoindre le Luxembourg, comme vous l'avez décidé le 24 septembre dernier. Cela représenterait jusqu'à 6,36 euros par automobiliste. Faute d'écotaxe, ce sont tous les automobilistes français qui sont taxés et, acculés, sans autre solution, ils se révoltent en mettant leur gilet jaune.

Première question : pourquoi ne mettez-vous pas en place cette écotaxe ?

Vous avez annoncé ici même, le 5 juin dernier, l'abandon par le Gouvernement du projet de liaison fluviale Saône-Moselle, en m'expliquant que son coût était insoutenable pour la France. Mais il s'agit d'un projet européen. D'où ma deuxième question : allez-vous porter et défendre ce projet au niveau pertinent, l'Europe ?

Cerise sur le gâteau, nous avons appris le 26 septembre dernier la suppression de la liaison ferroviaire Metz-Nice. Pour rallier le sud de la France, les Lorrains doivent passer par Strasbourg ou par Paris…

Cette décision, qui pénalisera les nombreux voyageurs - hausse du prix des billets, multiplication des contraintes pratiques – est en outre une absurdité sur plan écologique. D'où ma troisième question : allez-vous rétablir la liaison ferroviaire directe entre Metz et Nice, et, troisième question bis, allez-vous enfin réduire l'embouteillage ferroviaire à Lyon, qui empêche le développement de l'autoroute ferroviaire Bettembourg-Perpignan ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Monsieur le sénateur Grosdidier, avant toute chose, je souhaite réaffirmer ici que le Gouvernement n'a pas l'intention de restaurer le système de l'écotaxe.

Toutefois, vous le savez, nous sommes confrontés à plusieurs défis ; l'état de nos réseaux de transport s'est fortement dégradé depuis de trop nombreuses années. C'est pourquoi le Gouvernement a décidé d'inscrire dans le projet de loi sur les mobilités une programmation sincère des infrastructures, qui prévoie une augmentation de 40 % de l'investissement dans les systèmes de transport au cours des cinq prochaines années. En 2019, cette augmentation des investissements est assurée par redéploiement au sein du budget de l'État, mais il faudra, à partir de 2020, une ressource nouvelle et durable à hauteur de 500 millions d'euros.

Pour ce qui concerne le secteur septentrional de l'A31 bis, la réalisation d'un contournement de Thionville en tracé neuf est nécessaire. Un débat public sur les différentes options de tracé vient d'être lancé, puis une décision ministérielle fixera les conditions de réalisation, notamment au sujet de la mise en place d'un péage qui permettra de financer et de réaliser les travaux dans un délai raisonnable. Je sais la contrainte financière que représente ce péage pour les usagers de l'A31, mais il est indispensable pour répondre rapidement aux difficultés qu'ils connaissent.

J'en arrive au projet « Saône-Rhin Saône-Moselle » que vous appelez de vos vœux. Ce projet de 350 kilomètres de voies navigables a un coût de l'ordre de 15 milliards d'euros. Malgré l'impact économique de ce projet sur la région, le coût de l'infrastructure paraît hors de portée des financements envisageables, même en intégrant le soutien de l'Union européenne. Il ne peut donc malheureusement pas constituer une réponse avant un horizon de long terme.

Enfin, en ce qui concerne la liaison en train à grande vitesse, ou TGV, entre Metz et Nice, la gare de Lyon Part-Dieu connaît précisément des travaux importants jusqu'en 2023 – un débat aura lieu en 2019 sur le nœud ferroviaire lyonnais –, ce qui limitera la capacité d'accueil et entraînera des modifications de dessertes.

Pour compenser cette situation, SNCF Mobilités a proposé un départ depuis Nancy reliant Strasbourg à Marseille et à Nice, et le prolongement de la liaison TGV entre Montpellier et Strasbourg jusqu'à Metz, pour renforcer le lien avec l'arc méditerranéen. La SNCF a rencontré les élus pour leur présenter ces propositions, en lien avec la région Grand Est.

Par ailleurs, un groupe de travail se réunira autour des sujets de desserte ferroviaire pour aborder en amont les évolutions de dessertes de TGV et de trains express régionaux, les TER.

Enfin, je précise que la loi pour un nouveau pacte ferroviaire impose la création de comités de desserte au sein desquels les élus seront représentés.

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