Question de Mme GUILLEMOT Annie (Rhône - SOCR) publiée le 18/10/2018

Mme Annie Guillemot attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la situation des kinésithérapeutes. Le 5 juillet 2018, plus de 2 000 masseurs-kinésithérapeutes se sont rassemblés au ministère de la santé pour exprimer leurs vives inquiétudes et réclamer une meilleure reconnaissance de leur métier.
Outre que ces professionnels craignent en effet une dérégulation de leur profession du fait des implications de l'arrêté du 13 février 2018 relatif à la formation en chiropraxie, leurs inquiétudes ont aussi pour source l'inégalité de tarification pour un même acte effectué par divers professionnels de santé.
Ces professionnels de santé revendiquent enfin la reconnaissance de leur formation au grade international de master à hauteur de leurs 300 crédits européens (« European credits transfer system ») compte tenu de leur niveau bac + 5. Ils dénoncent enfin l'inégalité des différentes professions de santé au regard des droits liés au congé maternité. En effet, depuis octobre 2017, les femmes médecins libérales conventionnées et éligibles au congé maternité peuvent percevoir de 2 066 à 3 100 euros mensuels, pendant trois mois au maximum auxquels s'ajoute une aide forfaitaire d'environ 3 300 euros. Les masseurs-kinésithérapeutes, comme les autres professionnels para-médicaux, ne bénéficient pas de ce traitement et une pétition réclamant l'« égalité de l'aide financière pour toutes les femmes libérales en congé maternité » a rassemblé plus de 42 000 signataires.
Aussi, face à ces inquiétudes et à ce légitime besoin de reconnaissance, d'équité et de justice, elle lui demande quelles réponses elle compte donner à ces revendications et selon quel échéancier.

- page 5232


Réponse du Secrétariat d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé publiée le 21/11/2018

Réponse apportée en séance publique le 20/11/2018

Mme Annie Guillemot. Le 5 juillet dernier, plus de 2 200 masseurs-kinésithérapeutes se sont rassemblés au ministère de la santé pour exprimer leurs vives inquiétudes et réclamer une meilleure reconnaissance de leur métier.

Ces professionnels de santé, qui revendiquent aussi la reconnaissance de leur formation au grade international de master à hauteur de leurs 300 crédits européens, compte tenu de leur niveau bac+5, dénoncent aussi l'inégalité des différentes professions de santé au regard des droits liés au congé maternité.

En effet, depuis octobre 2017, les femmes médecins libérales conventionnées et éligibles au congé maternité peuvent percevoir de 2 066 à 3 100 euros mensuels, pendant trois mois, auxquels s'ajoute une aide forfaitaire d'environ 3 300 euros. Les masseurs-kinésithérapeutes, comme les autres professionnels paramédicaux, ne bénéficient pas de ce traitement. Une pétition réclamant l'« égalité de l'aide financière pour toutes les femmes qui exercent dans le secteur libéral en congé maternité » a rassemblé plus de 55 000 signataires.

Lors de l'examen du PLFSS pour 2019, j'ai déposé un amendement à l'article 47 visant à ce que cet avantage supplémentaire maternité soit étendu à l'ensemble de ces professionnelles de santé. Malheureusement, il a été, comme de très nombreux autres amendements, frappé par l'article 40, car « dépourvu d'impact sur les comptes sociaux ».

Aussi, face à ces inquiétudes et à ce légitime besoin de reconnaissance, d'équité et de justice, pourriez-vous nous dire, madame la secrétaire d'État, quelles réponses vous comptez donner à ces revendications et selon quel échéancier ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Madame la sénatrice, vous m'interrogez sur les demandes formulées au mois de juillet dernier par la profession des masseurs-kinésithérapeutes.

Je souhaite porter à votre connaissance, et à celle de vos collègues présents, plusieurs éléments d'analyse pour répondre à vos interrogations.

Tout d'abord, et j'aimerais insister sur ce point, la profession de chiropracteur, reconnue par la loi depuis mars 2002, ne constitue pas une profession concurrente de la masso-kinésithérapie.

Ses missions et conditions d'exercice diffèrent sur de nombreux points : il ne s'agit pas d'une profession de santé telle que prévue par le code de la santé publique et les actes délivrés ne sont, en conséquence, pas pris en charge par l'assurance maladie, ce qui constitue deux points de différenciation majeurs.

L'arrêté du 13 février 2018 relatif à la formation en chiropraxie vise à encadrer un usage professionnel déjà existant, mais qui ne disposait pas de référentiel d'activité et de compétences permettant de définir le contenu de la formation nécessaire à l'exercice professionnel.

Cet arrêté consolide sur le plan réglementaire l'exercice et la formation des chiropracteurs et renforce la sécurité des personnes prises en charge par ces professionnels.

Ensuite, s'agissant du désavantage présumé dont pâtiraient les masseurs-kinésithérapeutes au regard de la tarification d'actes réalisés par d'autres professionnels, je tiens à rappeler que les actes des masseurs-kinésithérapeutes, en tant que profession conventionnée, sont pris en charge par la sécurité sociale. Ce n'est pas le cas des actes de chiropraxie, dont je viens de parler et qui peuvent être parfois remboursés par les organismes complémentaires, mais qui ne sont pas inclus dans le panier des soins pris en charge par la sécurité sociale.

En ce qui concerne l'avantage supplémentaire maternité, cette aide, prévue pour les médecins dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017, a été mise en place pour renforcer l'attractivité de l'activité libérale des jeunes médecins. L'enjeu de sa création est bien propre à la démographie médicale et aux difficultés d'accès aux soins médicaux qui ne se posent pas dans les mêmes termes pour les autres professions libérales conventionnées.

Par ailleurs, les masseurs-kinésithérapeutes conventionnés bénéficient déjà d'un régime d'indemnités comprenant une allocation forfaitaire de 3 311 euros et d'indemnités journalières forfaitaires à hauteur de 54,43 euros.

Enfin, permettez-moi de vous rappeler que l'assurance maladie a signé, en novembre 2017, l'avenant 5 à la convention médicale qui prévoit des revalorisations substantielles sur la période 2018 à 2022. Vous conviendrez que ce geste témoigne, s'il fallait, des attentes fortes des pouvoirs publics à l'égard d'une profession qui joue un rôle majeur dans notre système de santé et dans sa transformation.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Guillemot pour répondre à Mme la secrétaire d'État, en une minute et neuf secondes.

Mme Annie Guillemot. Je prends note de votre réponse, madame la secrétaire d'État. Toutefois, ma question ne portait pas sur la chiropraxie, mais bien sur les congés maternité !

Comment ne pas observer que l'article 47 du PLFSS pour 2019, dont le vote interviendra cet après-midi, aligne les droits au congé maternité des travailleuses indépendantes et octroie aux exploitantes agricoles l'allocation de remplacement, visant à rémunérer l'emploi d'une personne les remplaçant dans leurs travaux pendant la durée du congé maternité renforcé ou, à défaut, une indemnité journalière forfaitaire, ce dont je me félicite.

Mais alors, pourquoi ne pas accorder aux professionnelles de santé conventionnées l'avantage supplémentaire maternité qui a pour objet de garantir la viabilité des cabinets ? Une absence d'environ trois mois représente une perte de 10 000 à 12 000 euros par cabinet.

Il ne s'agit certainement pas d'une raison budgétaire, puisque l'étude dont il est fait état pour l'article 47 du PLFSS pour 2019 précise que l'impact pour les travailleuses indépendantes et agricultrices sur le budget et l'emploi des caisses de sécurité sociale sera géré « dans le cadre des moyens existants »…

Bref, tout cela n'est ni sérieux ni surtout équitable pour les femmes exerçant en libéral – infirmières, chirurgiennes-dentistes, orthophonistes, orthoptistes, sages-femmes et, bien évidemment, kinésithérapeutes – à qui vous refusez d'être gérées « dans le cadre des moyens existants ».

- page 15804

Page mise à jour le