Question de Mme PEROL-DUMONT Marie-Françoise (Haute-Vienne - SOCR) publiée le 29/11/2018

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont interroge M. le ministre de l'action et des comptes publics sur l'impact de la suppression du taux réduit sur le gazole non routier (GNR) pour les professionnels des travaux publics.
Cette disposition entraînera une augmentation d'impôts de 700 millions d'euros pour la seule filière du bâtiment et des travaux publics (BTP) sur les 900 millions d'euros attendus par le Gouvernement.
Ainsi, à titre d'exemple, les 122 entreprises de travaux publics des trois départements de Haute-Vienne, de la Creuse et de la Corrèze verront de fait leurs marges baisser de l'ordre de 40 à 60 % selon la spécificité de l'entreprise.
Les conséquences seront extrêmement lourdes et de nombreuses entreprises risquent de ne pas y survivre.
Il est à craindre une casse sociale au sein des entreprises, tant au niveau des rémunérations des salariés (soit 2 800 personnes dans l'ex-région Limousin) mais il est aussi à craindre une mise à mal de la formation du fait de la réduction des budgets dédiés.
Une application brutale de ce changement fiscal n'est donc pas acceptable, et il convient a minima d'établir un échéancier afin que ces professionnels puissent intégrer ce surcoût dans leurs appels d'offres.

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Transmise au Ministère de la transition écologique et solidaire


Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire publiée le 05/12/2018

Réponse apportée en séance publique le 04/12/2018

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont. La décision du Gouvernement de supprimer le taux réduit de TICPE pour le gazole non routier, le GNR, aura des conséquences majeures pour les professionnels des travaux publics.

Sur les 900 millions à 1 milliard d'euros de recettes attendus par le Gouvernement, la mise en œuvre de cette disposition entraînera une hausse d'impôts de 700 millions d'euros pour la seule filière du bâtiment et des travaux publics !

À titre d'exemple, les 122 entreprises de travaux publics des trois départements de la Haute-Vienne, de la Creuse et de la Corrèze verront, de fait, leurs marges baisser de l'ordre de 40 % à 60 %, selon la spécificité de l'entreprise.

Les conséquences seront extrêmement lourdes et nombre d'entreprises risquent de ne pas y survivre. Il est à craindre une casse sociale en termes de rémunérations des salariés, soit près de 3 000 personnes pour les trois départements que j'ai cités, voire des licenciements. Par ailleurs, l'effort de formation sera amoindri, du fait de la réduction des budgets dédiés.

Une application brutale de ce changement fiscal est d'autant plus inacceptable que tous les marchés en cours de réalisation ou signés n'ont évidemment pas intégré cette nouvelle donne financière. En outre, les professionnels n'ont pas de solution alternative en termes d'engins, tous les matériels disponibles sur le marché fonctionnant au gazole !

Dans ce contexte, madame la secrétaire d'État, quelle réponse le Gouvernement entend-il apporter à la légitime inquiétude que m'ont exprimée encore tout récemment ces professionnels ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Brune Poirson, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la sénatrice Perol-Dumont, le Gouvernement a souhaité que la fiscalité pour le gazole non routier à destination des entreprises industrielles, des travaux publics et du bâtiment soit la même que celle des particuliers dès 2019. C'est un effort important pour ces entreprises, nous en avons conscience, maïs nous avons relevé la taxation du gazole pour des raisons écologiques : l'objectif est de limiter sa consommation, qui conduit au réchauffement climatique et à la pollution de l'air.

Cette mesure s'inscrit dans le cadre de notre politique écologique, qui a plusieurs objectifs : orienter les investissements et les pratiques vers des solutions moins polluantes ; se substituer à d'autres impôts et taxes sur le travail et les entreprises, d'où la baisse des cotisations salariales et la suppression de la taxe d'habitation ; procurer les moyens de financer les investissements pour la transition écologique ; assurer une redistribution sociale et un accompagnement des acteurs les plus vulnérables, par exemple avec la généralisation du chèque-énergie ou la prime à la conversion des véhicules.

Le Gouvernement, conscient des difficultés d'adaptation et de l'impact fort que peut avoir cette hausse de taxe pour certaines entreprises, a décidé de mettre en place un dispositif de transition. Il a ainsi proposé au Sénat d'assurer que la variation du prix puisse être répercutée dans les contrats en cours – cela répond, madame la sénatrice, à votre question précise –, de permettre la distribution et la consommation de GNR au tarif du gazole pendant les premiers mois de l'année pour fluidifier la logistique du produit, d'exonérer le secteur du transport frigorifique de la hausse de fiscalité pendant un an.

Le Gouvernement étudie également la possibilité de mettre en place des dispositifs de suramortissement pour faciliter les investissements des entreprises de distribution de GNR et le renouvellement des équipements.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, pour la réplique. Vous disposez d'une minute, ma chère collègue.

Mme Marie-Françoise Perol-Dumont. Madame la secrétaire d'État, ces professionnels ne sont pas sourds à la question écologique ! Ils sont prêts à prendre leur juste part. Simplement, ils ne peuvent pas faire face aux conséquences d'une mesure appliquée avec tant de brutalité.

Le Gouvernement ne se rend pas compte que ces mesures vont nécessairement conduire les entreprises à répercuter le surcoût induit sur les marchés, notamment sur ceux passés avec les collectivités locales, qui sont de gros donneurs d'ordres. C'est extrêmement inquiétant !

Quid des travaux d'entretien routier, des travaux d'entretien des réseaux d'assainissement, des réseaux d'eau, ô combien importants pour la politique environnementale ? Madame la secrétaire d'État, au-delà des légères avancées proposées, je crois que le Gouvernement, sur cette question comme sur beaucoup d'autres, devrait prendre la peine d'entendre, d'écouter, et revoir fondamentalement sa copie !

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