Question de M. MASSON Jean Louis (Moselle - NI) publiée le 22/11/2018

M. Jean Louis Masson rappelle à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice les termes de sa question n°06842 posée le 20/09/2018 sous le titre : " Valeur de dispositions du droit local d'Alsace-Moselle non traduites en français ", qui n'a pas obtenu de réponse à ce jour. Il s'étonne tout particulièrement de ce retard important et il souhaiterait qu'elle lui indique les raisons d'une telle carence.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 20/12/2018

Le Conseil constitutionnel a reconnu la conformité à la Constitution de l'existence d'un droit local propre au Bas-Rhin, au Haut-Rhin et à la Moselle en consacrant les dispositions particulières applicables dans ces trois départements en tant que principe fondamental reconnu par les lois de la République (décision n° 2011-157 QPC du 5 août 2011). En application de la loi du 17 octobre 1919 relative au régime transitoire de l'Alsace et de la Lorraine, les dispositions législatives et réglementaires applicables au moment du retour à la France des territoires alsacien-mosellans ont été maintenues en vigueur jusqu'à l'introduction dans ces territoires des lois et règlements applicables dans le reste de la France. Du fait de leur confirmation par le législateur français de 1919, le Conseil d'État a jugé que la législation spéciale aux départements d'Alsace et de Moselle est applicable comme du droit français, sans qu'il soit besoin de la publier au Journal officiel de la République française (CE, 6 avril 2001, Syndicat national des enseignements du second degré, n° 219379). Le Conseil constitutionnel a examiné le grief relatif à l'absence de traduction officielle d'une disposition de droit alsacien-mosellan dans une décision n° 2012-285 QPC du 30 novembre 2012 à propos des dispositions du « code des professions », adopté par une loi d'Empire du 26 juillet 1900, et maintenu en vigueur en Alsace et en Moselle par les lois du 1er juin 1924 en matière civile et commerciale. À cette occasion, il a précisé que si l'atteinte à l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi qui résulte de l'absence de traduction officielle d'une disposition législative ne peut, en elle-même, être invoquée à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité, cette exigence constitutionnelle, peut toutefois l'être lorsqu'elle est fondée sur la méconnaissance des « droits et libertés que la Constitution garantit » au sens de l'article 61-1 de cette dernière, telle que la règle fixée à l'article 2 de la Constitution selon laquelle « la langue de la République est le français ». Pour autant, le Conseil constitutionnel n'en a pas tiré de conséquence à l'égard des dispositions contestées en l'espèce, estimant qu'il n'y avait pas lieu d'examiner le grief tiré de la violation de cette exigence constitutionnelle compte tenu de la déclaration d'inconstitutionnalité qu'il avait prononcée dans sa décision sur le fondement de l'atteinte à la liberté d'entreprendre. Par conséquent, les dispositions réglementaires ou législatives du droit local qui n'auraient toujours pas de traduction officielle en français ne cessent d'être applicables en droit français qu'en présence d'une décision de déclaration d'inconstitutionnalité prononcée par le Conseil constitutionnel ou d'une annulation par le Conseil d'État. En l'absence de telles décisions juridictionnelles, les dispositions réglementaires ou législatives du droit local restent pleinement applicables. En tout état de cause,  à la lumière de la réponse de principe apportée par le Conseil constitutionnel dans la décision n° 2012-285 QPC précitée, le Gouvernement a assuré la publication de la traduction des lois et règlements locaux maintenus en vigueur par les lois du 1er juin 1924 dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle par deux décrets n° 2013-395 du 14 mai 2013 et n° 2013-776 du 27 août 2013. Les textes qui sont annexés à ces décrets peuvent être consultés dans les recueils des actes administratifs des préfectures de ces trois départements et sont également accessibles sur le site de ces préfectures. La version retenue est celle qui a été maintenue en vigueur par les lois du 1er juin 1924.

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