Question de M. BIGOT Jacques (Bas-Rhin - SOCR) publiée le 14/12/2018

Question posée en séance publique le 13/12/2018

M. Jacques Bigot. Monsieur le Premier ministre, monsieur le ministre de l'intérieur, quand les nuits s'allongent jusqu'au solstice d'hiver, quand les brouillards de décembre nous privent de soleil dans ces jours trop courts, les lumières et les décors de Noël nous libèrent de la déprime.

Cette tradition des pays du Nord est forte en Alsace. Elle fut païenne, puis chrétienne et donne à tous un esprit de fête, de chaleur et de fraternité. Cette ambiance vient d'être brisée à Strasbourg en ce 11 décembre.

Un jeune homme né à Strasbourg, issu des quartiers de la ville, a donné la mort et blessé grièvement des touristes et des habitants, y compris un Afghan membre d'une communauté musulmane.

Mes premières pensées comme celles de tout le monde, et je vous remercie tous de votre solidarité, vont d'abord, bien entendu, aux innocentes victimes et à leurs proches, à ces vies brisées au cœur de la fête.

Notre gratitude va aux forces de l'ordre, si fortement sollicitées durant ces semaines de troubles, et elles le seront encore. Notre gratitude va aussi aux services de secours et de soins.

Notre espoir, monsieur le ministre, est que les forces de l'ordre arrivent à arrêter cet assassin, car, aujourd'hui, l'angoisse persiste au cœur de la ville. Je crois toutefois comprendre, à travers les informations que nous recevons sur nos smartphones, qu'une opération du RAID est en cours, ce qui serait une bonne nouvelle.

Dans ces circonstances, pouvez-vous me confirmer que l'État partage le souhait du maire de Strasbourg de maintenir le marché de Noël ? Car la République ne doit pas céder face à la menace.

À la suite de ces faits graves, vous avez pris la décision de renforcer le plan Vigipirate.

Considérez-vous l'acte de cet individu comme le fait d'un « loup solitaire » ou estimez-vous qu'il révèle un accroissement de la menace qui pèse sur notre pays ?

Sans vouloir polémiquer, mais parce que je suis convaincu qu'il nous faut tirer de chaque événement les enseignements utiles pour renforcer la sérénité et la sécurité de nos concitoyens, ne pensez-vous pas que nos systèmes d'analyses informatisés des 19 000 « fichés S »…


M. Jean Bizet. Vingt mille !


M. Jacques Bigot. … devraient être plus performants pour aider les services de renseignement à mieux distinguer les personnes présentant le plus de risque ? Dans d'autres pays européens, et notamment en Belgique, on est en train de revoir les systèmes, et en particulier les algorithmes ; c'est peut-être une piste. Je le dis sans vouloir polémiquer parce que notre intérêt à tous c'est que la sécurité puisse être renforcée. (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 14/12/2018

Réponse apportée en séance publique le 13/12/2018

M. Christophe Castaner, ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur Jacques Bigot, vous avez rappelé, au fond, ce qu'est le marché de Noël de Strasbourg, notre marché de Noël. Comme les autres marchés de Noël, il appartient à l'histoire et à l'identité de notre pays et c'est cela qui a été frappé si violemment il y a un peu moins de quarante-huit heures.

En ce qui concerne ce que vous avez pu lire à l'instant sur certains sites de presse, je souhaite vous informer qu'il s'agit d'une levée de doute, pour reprendre un terme utilisé dans ce type de circonstances. Il y en a eu plusieurs dans les trente-six dernières heures. Cela n'est pas un signalement et n'annonce rien de particulier. Laissons l'enquête se poursuivre !

Je souhaite aussi vous indiquer, monsieur le sénateur, que 720 policiers, gendarmes et autres membres des forces de l'ordre sont actuellement mobilisés sur le territoire de Strasbourg et que 280 des personnes mobilisées sur cette enquête le sont au titre de la police judiciaire.

Hier soir, j'étais avec le secrétaire d'État Laurent Nunez à la direction générale de la sécurité intérieure, DGSI, et auprès de la section antiterroriste. Je peux vous dire que la mobilisation est extrêmement forte partout en France. Elle l'est également à l'international, les services étrangers nous accompagnant dans les recherches afin d'arrêter ce terroriste au plus vite.

Je me rendrai tout à l'heure à Strasbourg pour rencontrer à la fois M. le préfet et M. le maire afin de prendre la décision la plus adaptée en ce qui concerne la réouverture ou non du marché de Noël. Si nous devions prendre la décision de rouvrir le marché, les forces de l'ordre seraient bien évidemment mobilisées pour que celles et ceux qui décident de s'y rendre s'y sentent parfaitement en sécurité.

Le risque terroriste existe à Strasbourg, mais il existe en fait partout sur le territoire et à tout moment. C'est pourquoi nous devons, nous le savons tous, changer notre regard sur ce sujet, accroître notre vigilance et nous engager résolument.

Monsieur le sénateur Bigot, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux vous dire qu'en ce moment même tout est mis en œuvre pour que ce terroriste soit arrêté au plus vite et que nous puissions faire toute la lumière sur cette affaire. Nous devons aussi travailler sur la meilleure façon de suivre celles et ceux qui se sont engagés sur le chemin de la radicalisation, ce qui était le cas de cette personne.

Pour conclure, je voudrais préciser que cet individu avait été identifié et inscrit au fichier S et qu'il était particulièrement suivi par la DGSI. D'ailleurs, celle-ci a été associée à l'interpellation qui avait été programmée, alors qu'il s'agissait d'un crime de droit commun. C'est vous dire que les services, qui travaillent main dans la main, ont fait en sorte d'interpeller l'individu dès sa dangerosité avérée, mais cette opération portait, je le rappelle, sur un fait de droit commun et n'était pas liée à sa radicalisation. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – Mme Michèle Vullien et M. Jacques Mézard applaudissent également.)

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