Question de M. SEGOUIN Vincent (Orne - Les Républicains) publiée le 11/07/2019

M. Vincent Segouin attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès du ministre d'État ministre de la transition écologique et solidaire, sur la nécessité de trouver une meilleure alternative à la continuité écologique.

Même si le Gouvernement semble avoir à cœur de s'engager pour la sauvegarde de notre patrimoine, il apparaît néanmoins qu'il reste des domaines dans lesquels les actes ne sont pas à la hauteur des attentes relatives à la préservation des monuments qui représentent les héritages historiques et culturels de nos territoires.

Ce manque de considération à l'égard de notre patrimoine le conduit tout droit à sa stricte disparition. Pire que cela, cette politique, notamment en matière environnementale, engendre la destruction volontaire de bons nombre de monuments historiques qui font la fierté, l'honneur et l'histoire de nos territoires. Il pense notamment à la politique de continuité écologique, véritable fossoyeuse d'édifices historiques, comme l'illustre le cas du département de l'Orne, particulièrement au travers de la destruction de moulins à eau qui datent parfois du Moyen-Âge.

Mais outre que cette politique de continuité écologique sur la libre circulation des sédiments conduit à la démolition pure et simple de notre patrimoine, sa mise en œuvre, sous ses aspects « écolos », est en réalité désastreuse pour la sauvegarde et la protection des zones humides, souvent mal inventoriées, mais véritables viviers de la faune et de la flore dans nos territoires. Ce sont en effet des milliers d'écosystèmes à l'équilibre trouvé depuis plus de deux siècles qui se retrouvent menacés par ces destructions indirectes de milieux sauvages qui entraînent des ruptures d'équilibres naturels.

Au-delà du coût environnemental, la continuité écologique c'est aussi un coût financier ; le conseil général de l'environnement et du développement durable estime la somme annuelle à la charge de l'État, des collectivités et des exploitants à près de 2 milliards d'euros. Une France championne de la dépense publique, composée de collectivités locales dépouillées de leur autonomie budgétaire, n'a pas les moyens de se le permettre.

Enfin, cette politique de continuité écologique met un frein considérable à la transition écologique ; en effet, la destruction d'anciens édifices au profit de la reconstruction de nouveaux, au-delà son impact financier, patrimonial et environnemental, entrave le développement de la micro-électricité, engendrant l'absence de production d'électricité par les différents sites déjà destinés à cet effet pour une durée qui peut aller jusqu'à huit ans.

La continuité écologique apparaît ainsi plus que contre-productive sur le plan écologique et environnemental, outrancière sur le plan économique, et désastreuse sur le plan patrimonial. Il est donc grand temps d'arrêter cette écologie de façade en repensant plus en profondeur le principe de continuité écologique, notamment au travers d'études d'impact et de consultations citoyennes. Ainsi, il lui demande de mettre fin à ce principe aveugle et coûteux de continuité écologique, et de lui présenter les alternatives plus respectueuses du patrimoine et de la biodiversité qu'elle envisage de mettre en œuvre.

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Transmise au Secrétariat d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire


Réponse du Secrétariat d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire publiée le 16/10/2019

Réponse apportée en séance publique le 15/10/2019

M. Vincent Segouin. Madame la secrétaire d'État, même si le Gouvernement semble avoir à cœur de s'engager pour la sauvegarde de notre patrimoine, il apparaît néanmoins qu'il reste des domaines dans lesquels les actes ne sont pas à la hauteur des attentes.

Ce manque de considération à l'égard de notre patrimoine le conduit tout droit à sa stricte disparition. Pire, cette politique engendre la destruction volontaire de bon nombre de monuments historiques qui font la fierté, l'honneur et l'histoire de nos territoires. Je pense particulièrement à la destruction de moulins à eau qui datent parfois du Moyen Âge, comme c'est le cas dans mon département de l'Orne.

Outre que cette politique de continuité écologique sur la libre circulation des sédiments conduit à la démolition pure et simple de notre patrimoine, sa mise en œuvre, sous ses aspects « écologiques », est en réalité désastreuse pour la sauvegarde et la protection des zones humides, souvent mal inventoriées, mais véritables viviers de la faune et de la flore dans nos territoires. Ce sont en effet des milliers d'écosystèmes à l'équilibre trouvé depuis plus de deux siècles qui se retrouvent menacés par ces destructions indirectes de milieux sauvages qui entraînent des ruptures d'équilibres naturels.

Au-delà du coût environnemental, la continuité écologique a aussi un coût financier. Le Conseil général de l'environnement et du développement durable estime la somme annuelle à la charge de l'État, des collectivités et des exploitants à près de 2 milliards d'euros. Une France championne de la dépense publique, composée de collectivités locales dépouillées de leur autonomie financière, n'a pas les moyens de se le permettre.

Enfin, cette politique met un frein considérable à la transition écologique. En effet, la destruction d'anciens édifices, au-delà de son impact financier, patrimonial et environnemental, entrave le développement de la microélectricité, engendrant l'absence de production d'électricité par les différents sites déjà destinés à cet effet pour une durée qui peut aller jusqu'à huit ans.

La continuité écologique apparaît ainsi plus que contre-productive sur le plan écologique et environnemental, outrancière sur le plan économique et désastreuse sur le plan patrimonial. Quelle alternative à cette politique de continuité écologique plus respectueuse du patrimoine et de la biodiversité entendez-vous mettre en œuvre ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Brune Poirson, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur Segouin, c'est à l'aune de la situation actuelle qu'il faut regarder les choses. Malheureusement, depuis les périodes historiques que vous évoquez, il s'est produit un effondrement de la biodiversité, en particulier de la biodiversité d'eau douce.

La restauration de la continuité écologique est une mesure importante pour respecter nos engagements en faveur de la préservation de la biodiversité. Nous n'atteindrons pas nos objectifs en matière de lutte contre le réchauffement climatique, de capture du CO2, si nous ne protégeons pas la nature et la biodiversité. Cette importance a d'ailleurs été réaffirmée par les Assises de l'eau et a été inscrite dans le plan Biodiversité, qui prévoit de restaurer la continuité sur 50 000 kilomètres de cours d'eau d'ici à 2030.

La dimension patrimoniale reste néanmoins cruciale. Elle fait aussi partie, vous l'avez souligné, monsieur le sénateur, de l'identité de la France et j'y suis particulièrement sensible, tout comme mon ministère. La tâche difficile qui nous incombe est d'essayer de trouver un équilibre entre la préservation de la biodiversité et celle du patrimoine culturel et architectural de la France. C'est la raison pour laquelle nous travaillons de façon très étroite avec le ministère de la culture, sur ce sujet en particulier.

Une analyse de la dimension patrimoniale des ouvrages hydrauliques a été élaborée. Elle a été transmise aux services déconcentrés comme élément à compléter pour éclairer les décisions à prendre sur cet enjeu. Un groupe de travail issu du Comité national de l'eau et associant les défenseurs des moulins s'est réuni neuf fois en un an et demi. Il a abouti à la rédaction d'un plan d'action pour la mise en œuvre apaisée de la restauration de la continuité. Dans ce cadre, une instruction du 30 avril 2019 demande aux services déconcentrés de mieux tenir compte de cette dimension dans les choix d'intervention sur les ouvrages.

En aucun cas cette politique n'est menée dans le but de supprimer tous les ouvrages sans réflexion. Ce n'est pas le but. Il nous faut d'ailleurs trouver cet équilibre difficile entre la préservation du patrimoine culturel et celle de la biodiversité si nous voulons obtenir l'adhésion de la population. Toutefois, il sera parfois nécessaire de supprimer certains seuils de moulins, mais toujours au cas par cas.

En ce qui concerne la petite hydroélectricité, monsieur le sénateur,…

Mme la présidente. Il va falloir conclure, madame la secrétaire d'État.

Mme Brune Poirson, secrétaire d'État. … le soutien à cette filière fait partie des objectifs de la politique énergétique révisés par la récente loi Énergie-climat.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Segouin, pour la réplique.

M. Vincent Segouin. Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, de votre réponse. Concertation, acceptation et traitement au cas par cas : j'espère simplement que les administrations suivront vos paroles et que je n'aurai plus jamais à intervenir sur le sujet.

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