Question de M. GROSPERRIN Jacques (Doubs - Les Républicains) publiée le 19/09/2019

M. Jacques Grosperrin interroge Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales à propos des modalités d'institution, de renonciation et de suppression de la taxe d'aménagement par les communes ou EPCI (établissements publics de coopération intercommunale).
L'article L. 331-2 du code de l'urbanisme dispose dans son 3° que la taxe d'aménagement est instituée « de plein droit dans les communautés urbaines [...] sauf renonciation expresse décidée par délibération ». Or, il est difficile de déterminer si ce 3° s'applique de manière exclusive ou non du 2° du même article (possibilité pour une commune de prendre une délibération pour instituer la taxe).
L'exposé des motifs de l'article 14 du projet de loi de finances rectificative pour 2010 (loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010), qui a institué la taxe d'aménagement, indique que « La taxe d'aménagement est instituée de plein droit dans les communes dotées d'un PLU (plan local d'urbanisme) ou d'un POS (plan d'occupation des sols) et les communautés urbaines, par délibération dans les autres communes ». Ceci semblerait indiquer que la délibération n'est pas possible dans les communes où la taxe d'aménagement est instituée de plein droit, mais la formulation n'est pas dépourvue d'ambigüité sur les conséquences d'une renonciation par la communauté urbaine à l'institution de la taxe. L'intention du législateur n'apparaît pas clairement.
Par ailleurs, la taxe d'aménagement vise à financer des actions ou opérations relatives à l'urbanisme figurant à l'article L. 101-2 du code de l'urbanisme, mais cet article définit un grand nombre d'opérations qui ne relèvent pas nécessairement toutes de la compétence exclusive de la communauté urbaine.
Ainsi, dans le cas où la communauté urbaine renoncerait expressément à instituer une part intercommunale, il lui demande si la possibilité d'instituer une part communale reviendrait de fait aux conseils municipaux. La situation décrite ne figurant pas non plus dans la circulaire du 18 juin 2013 ni dans une jurisprudence, il souhaite que le Gouvernement donne sur cette question un avis circonstancié permettant de fixer la doctrine administrative.

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Réponse du Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales publiée le 16/10/2019

Réponse apportée en séance publique le 15/10/2019

M. Jacques Grosperrin. Madame la ministre, ma question porte sur les modalités d'institution, de renonciation et de suppression de la taxe d'aménagement par les communes ou EPCI.

La communauté d'agglomération du Grand Besançon est passée en communauté urbaine le 1er juillet dernier. Ce changement de statut implique notamment que la taxe d'aménagement est instituée de plein droit dans la nouvelle collectivité. En effet, le 3° de l'article L. 331-2 du code de l'urbanisme dispose que la taxe d'aménagement est instituée de plein droit dans les communautés urbaines sauf renonciation expresse décidée par délibération. Or il est difficile de déterminer si le troisième alinéa s'applique de manière exclusive ou non du deuxième du même article, qui est la possibilité pour une commune de prendre une délibération pour restituer cette taxe. Que se passe-t-il en cas de renonciation ?

Nombre de communes membres de la nouvelle communauté urbaine viennent de revisiter leur plan local d'urbanisme (PLU). Elles seront très directement concernées. À titre d'exemple, si la commune de Miserey-Salines, qui est membre de Grand Besançon Métropole, prévoit un lotissement d'une vingtaine de maisons, la taxe d'aménagement représente un apport de 100 000 euros, ce qui est important.

La communauté urbaine délibérera ce jeudi sur cette question. Elle s'est engagée à restituer ce que rapporterait la taxe aux communes. Or les maires sont inquiets et craignent que la part restituée ne s'amenuise d'année en année.

C'est pourquoi plusieurs maires souhaiteraient que la communauté urbaine renonce à percevoir la taxe d'aménagement. Mais l'inconnue réside dans les conséquences de cette renonciation.

Dans l'exposé de l'article 14 du projet de loi de finances rectificative pour 2010, qui a créé la taxe d'aménagement, il est indiqué que la taxe d'aménagement est instituée de plein droit dans les communes urbaines et par délibération dans les autres communes. Cette formulation n'est pas dépourvue d'ambiguïté quant aux conséquences d'une renonciation par la communauté urbaine à l'institution de la taxe. L'intention du législateur n'apparaît pas clairement.

Madame la ministre, pour ce qui est de la taxe d'aménagement, dans le cas où la communauté urbaine renoncerait expressément à instituer une part intercommunale, est-il possible pour les conseils municipaux d'instituer une part communale ? Je souhaiterais avoir un avis circonstancié permettant de fixer cette doctrine administrative.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, la taxe d'aménagement est composée de trois parts : la part communale ou intercommunale, selon l'autorité compétente pour l'instituer, la part départementale et, pour la seule région Île-de-France, la part régionale.

L'article L. 331-2 du code de l'urbanisme fixe les conditions d'institution de la part communale ou intercommunale de la taxe d'aménagement. Cette dernière est instituée de plein droit dans les communes dotées d'un plan local d'urbanisme. Dans les autres communes, elle peut être instituée par délibération du conseil municipal, et pour une période minimale de trois ans.

Lorsque la commune est membre d'un établissement public de coopération intercommunale, ce dernier peut percevoir en lieu et place de la commune la part de la taxe d'aménagement qui lui revient ; la part communale devient alors intercommunale. Ainsi, les communautés urbaines et les métropoles en dehors de la métropole du Grand Paris sont compétentes de plein droit pour percevoir la part intercommunale.

Dans les autres EPCI compétents en matière de plan local d'urbanisme, elle pourra être instituée pour une durée minimale de trois ans par délibération du conseil communautaire avec l'accord des communes membres exprimé à la majorité qualifiée. À titre d'exemple, à la date d'intégration d'une commune à une communauté urbaine, la compétence en matière de taxe d'aménagement ne relève plus que de la communauté urbaine. Ainsi, la commune perd sa compétence en matière de taxe d'aménagement.

Si une commune ou un EPCI compétents de plein droit pour percevoir la part communale ou intercommunale ne souhaitent pas percevoir le produit de cette part, ils peuvent y renoncer par délibération. Cette délibération devra être prise avant le 30 novembre pour entrer en vigueur chaque année le 1er janvier. Elle est valable, selon les termes du dixième alinéa de l'article L. 331-2 du code de l'urbanisme, pour une durée minimale de trois ans à compter de son entrée en vigueur.

Dans ce cas, il ne sera plus perçu de part communale ou intercommunale pendant la durée de la validité de la délibération de renonciation. La renonciation à percevoir le produit de la taxe par un EPCI n'a pas pour effet de transférer la possibilité d'instituer une part communale aux communes. En effet, le code de l'urbanisme ne prévoit pas le transfert de cette compétence de plein droit, acquise par la loi, par la communauté urbaine ou la métropole à ses communes membres, qu'il y ait renonciation ou non par cette collectivité.

En revanche, les communes membres des EPCI non compétents de plein droit en matière de taxe d'aménagement et devenus compétents par délibération des communes peuvent décider à la majorité qualifiée et à l'issue de la période minimale d'instauration de trois ans de récupérer cette compétence.

Enfin, afin de tenir compte de la charge que le coût des équipements publics fait peser sur les budgets des collectivités, lesquelles ne sont pas nécessairement celles qui perçoivent la taxe d'aménagement, il y a un alinéa qui prévoit un mécanisme de reversement de la part intercommunale aux communes. Dans ce cas, l'EPCI pourra prendre à tout moment une délibération fixant les conditions de reversement de tout ou partie de la part intercommunale à ses communes membres.

Mme la présidente. Il faut conclure, madame la ministre.

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Le sujet est particulièrement technique.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Grosperrin, pour la réplique.

M. Jacques Grosperrin. Madame la présidente, je vous remercie d'avoir laissé le temps à Mme la ministre de pouvoir répondre. Nous avons ainsi la démonstration de la complexité du sujet ; certains juristes s'y engouffreront certainement. Je regarderai attentivement ce qu'il en sera pour la communauté urbaine du Grand Besançon.

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