Question de Mme BERTHET Martine (Savoie - Les Républicains) publiée le 09/01/2020

Question posée en séance publique le 08/01/2020

Mme Martine Berthet. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, vous ne m'en voudrez pas, monsieur le secrétaire d'État, mais ma question sur le sujet des retraites, qui agite et inquiète notre pays tout entier, s'adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, je n'irai pas par quatre chemins : votre réforme des retraites est une mauvaise réforme !

Mauvaise, parce que vous avez mis la charrue avant les bœufs. La priorité aurait dû être de régler la question du déficit !

Mauvaise, parce que les régimes spéciaux en sortent renforcés, alors même qu'Emmanuel Macron, le 4 octobre dernier à Rodez, affirmait : « Il n'y aura plus de régimes spéciaux. »

Mauvaise, parce que votre système, au-delà des discours, dont on voit la faible durée de vie, appauvrira les retraités. Le point est volatil, les femmes et les familles y perdront parfois beaucoup, et les pensions de réversion ne seront versées qu'à 62 ans.

Mauvaise, parce que, à des régimes différents, vous substituez une inégalité entre les générations.

Mauvaise, parce que les travailleurs indépendants devront cotiser plus.

Mauvaise, parce qu'il est indispensable de maintenir nos régimes complémentaires, comme partout en Europe. Nous serions les seuls à avoir un régime étatisé et unique !

Enfin, et ce n'est pas la moindre raison, votre réforme est mauvaise, parce que vous sortez les plus hauts revenus d'un système par répartition qui contribuait à assurer notre ciment national.

N'avez-vous pas le sentiment, monsieur le Premier ministre, qu'il y a un fossé entre l'engagement d'Emmanuel Macron de ne pas modifier l'âge légal, les objectifs affichés d'universalité et de justice et la réalité des conséquences de votre projet pour les Français ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)


Réponse du Premier ministre publiée le 09/01/2020

Réponse apportée en séance publique le 08/01/2020

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Madame la sénatrice, vous avez votre avis sur ce projet de réforme, et il est tout à fait respectable, sans doute.

Toutefois, je voudrais vous indiquer que, si le Parlement vote le projet que nous portons, il n'y aura plus de régimes spéciaux de retraite. (Exclamations sur les travées des groupes SOCR et CRCE.)

Vous le savez sans doute, depuis le 1er janvier 2020, il n'y a plus, à la SNCF, d'embauches au statut. Sans doute vous en souvenez-vous, madame la sénatrice, quand nous avons engagé cette réforme, certains nous reprochaient de réaliser une petite réforme ne touchant pas les régimes spéciaux ! Pourtant, nous l'avons menée à terme, ce qui n'avait pas été fait auparavant.

De la même façon, nous allons régler le problème récurrent de l'équilibre du régime des retraites. Selon nous, nous l'avons dit, un problème d'équilibre est un problème sérieux dans un régime de retraite, quel qu'il soit. Nous voulons faire en sorte que le régime soit équilibré.

Nous sommes donc attachés à la question de l'équilibre. Nous voulons que le système universel remplace la diversité des systèmes existants, ce qui implique la suppression des régimes spéciaux.

Croyez-moi, madame la sénatrice, en dépit de ce que vous dites, un certain nombre de ceux qui sont soumis à ces régimes spéciaux ou qui en bénéficient ont bien compris le message. C'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles ils protestent. On ne peut pas dire, d'un côté, qu'il ne se passe rien et, d'un autre côté, qu'on change tout ! Cette contradiction même prouve que nous avançons.

Par ailleurs, vous dites, madame la sénatrice, que c'est une mauvaise réforme. J'espère que vous lutterez de façon résolue contre le minimum contributif à 1 000 euros, y compris pour les agriculteurs, les artisans et les indépendants… (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM – Protestations sur les travées des groupes CRCE, SOCR et Les Républicains.)

M. Jérôme Bascher. C'est vous qui ne l'avez pas voté ici !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. J'espère que vous direz combien cette mesure est scandaleuse, à quel point elle représente un déni de justice sociale par rapport à ce qui prévalait jusqu'à présent !

J'espère également, madame la sénatrice, que vous expliquerez clairement à toutes celles et tous ceux qui doivent attendre 67 ans pour liquider leur retraite sans décote, souvent des femmes et des hommes ayant mené des carrières hachées et difficiles, que la réforme que nous proposons n'est pas une réforme de justice sociale, dans la mesure où ils pourront partir à 64 ans.

Le débat qui nous réunira à l'Assemblée nationale puis au Sénat sera passionnant. Mais avant d'examiner précisément les dispositions qui seront soumises aux parlementaires, pouvons-nous ne pas nous envoyer à la figure des affirmations qui sont bien souvent des affirmations de posture ? (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM. – Protestations sur les travées des groupes Les Républicains, SOCR et CRCE.) Je le dis très tranquillement ! On me fait trop souvent ce reproche pour que je m'interdise de le dire.

Je le répète, le projet que nous présenterons au Parlement est en tout point conforme aux engagements pris par le Président de la République et par les parlementaires de la majorité : universalité, équité, âge légal de départ à 62 ans. Nous verrons comment inciter les Français à travailler plus longtemps, pour faire en sorte que les retraites soient assurées. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM.)

M. le président. La parole est à Mme Martine Berthet, pour la réplique.

Mme Martine Berthet. Monsieur le Premier ministre, votre réforme coûtera plusieurs dizaines de milliards d'euros et se traduira par une baisse du niveau de vie des retraités. Ce n'est pas une affirmation de posture ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

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