Question de M. MARSEILLE Hervé (Hauts-de-Seine - UC) publiée le 30/01/2020

Question posée en séance publique le 29/01/2020

M. Hervé Marseille. Monsieur le Premier ministre, dès son élection, M. le Président de la République a engagé la concertation concernant la réforme du système des retraites.

Cette concertation s'est ouverte avec M. Delevoye et a duré deux années. À l'automne 2019, vous avez été amené, monsieur le Premier ministre, à reprendre en main le dossier. Sur ce chantier, beaucoup de questions étaient encore en suspens.

Au début de cette année, après les arbitrages, le projet de loi a été présenté au Conseil d'État, qui a émis, comme on le dirait au Quai d'Orsay, un avis « mesuré et réservé ». (Sourires sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Philippe Dallier. C'est un euphémisme !

M. Hervé Marseille. Ce texte va évidemment être débattu devant le Parlement, d'abord à l'Assemblée nationale, puis au Sénat.

Monsieur le Premier ministre, ma question est simple.

Maintenez-vous le calendrier tel qu'il a été prévu ou reprenez-vous à nouveau la main pour compléter le dossier à la suite des observations formulées par le Conseil d'État ?

Hier, au Sénat, la conférence des présidents a souhaité, à la quasi-unanimité, que soit abandonnée la procédure d'urgence, pour laisser un peu de temps au travail parlementaire et faire en sorte qu'un débat au fond puisse avoir lieu sur ce sujet déterminant.

Monsieur le Premier ministre, êtes-vous déterminé à maintenir la procédure d'urgence ou l'abandonnez-vous ? (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe SOCR.)


Réponse du Premier ministre publiée le 30/01/2020

Réponse apportée en séance publique le 29/01/2020

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le président Marseille, comme vous l'avez rappelé, le Président de la République s'est engagé, au moment de son élection, à mettre en œuvre une réforme majeure consistant à refonder notre pacte social, afin d'installer un système universel de retraite.

Le Gouvernement et la majorité dans son ensemble sont déterminés à respecter les engagements qui ont été pris par les candidats qui se sont présentés aux élections législatives dans les semaines qui ont suivi l'élection présidentielle, aussi bien l'engagement, sur le fond, de mettre en place un système universel de retraite qui permettra des avancées sociales, une plus grande mobilité professionnelle et le renforcement de la solidité et de la durabilité de notre système de pensions, que les engagements de calendrier.

À cet égard, vous savez que, dès mes déclarations de politique générale – je l'ai rappelé à l'occasion de la dernière d'entre elles –, j'ai indiqué que nous souhaitions faire aboutir cette réforme majeure, difficile, débattue et délicate. D'expérience, vous savez comme moi que toutes les réformes qui portent sur notre système de retraite, qu'elles soient marginales – j'utilise ce terme sans aucune intention dénigrante – ou fondamentales, suscitent des oppositions, des contradictions, des débats, des questionnements. Pour connaître comme moi la vie politique française et le débat public, vous savez que toucher aux retraites, c'est faire naître ces questionnements, ces critiques, ces oppositions et, parfois, il est vrai, des manifestations ou des blocages.

Nous allons tenir le calendrier que nous nous sommes fixé, monsieur le président Marseille, à savoir la présentation d'un projet de loi en conseil des ministres – nous l'avons fait vendredi dernier – et son examen par l'Assemblée nationale, puis par le Sénat, au cours du premier semestre, de façon que nous puissions espérer une adoption du texte avant l'interruption estivale. Je ne veux pas préjuger de l'issue du débat parlementaire, mais c'est l'objectif que nous nous fixons. Il impose, si nous voulons le tenir, que nous respections le calendrier que nous avons décidé.

Autrement dit, monsieur Marseille, pour répondre à votre question, oui, nous allons rester sur le calendrier que nous avons proposé. Je ne m'en excuse pas,… (Protestations sur les travées du groupe SOCR.)

M. Martial Bourquin. Quelle ouverture !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. … car je pense que le débat sera intense et passionné. (Exclamations sur les travées des groupes SOCR, CRCE et Les Républicains.)

M. Rachid Temal. C'est pour ça qu'on en veut deux !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Nous avons soumis au Conseil d'État un projet de loi accompagné d'une étude d'impact, qui, vous le savez, comptait près d'un millier de pages. Je suis certain que tout le monde s'est engagé dans cette lecture assez roborative… (Marques d'ironie sur les mêmes travées.)

Il est vrai que l'étude d'impact est beaucoup plus longue et, à bien des égards, beaucoup plus dense que celles qui accompagnaient les précédentes réformes des retraites. (Applaudissements sur les travées du groupe LaREM. – Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains et SOCR.) Je peux vous le garantir ! En outre, les projections financières figurant dans cette étude d'impact sont plus complexes à réaliser, parce qu'elles portent sur trente ans.

Nous sommes bien d'accord : elles appellent des discussions, mais, monsieur le président Marseille, je n'ai pas peur du débat parlementaire à l'Assemblée nationale et au Sénat. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Catherine Troendlé. Alors ?

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Je ne crois pas ceux qui disent que ce débat devrait se transformer en champ de braises.

Le texte comporte un peu moins de 70 articles,…

Mme Sophie Primas. Et 29 ordonnances !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. … qui feront l'objet d'un long débat à l'Assemblée nationale et au Sénat. Il est vrai que la procédure accélérée a été engagée, mais vous savez parfaitement, monsieur Marseille, qu'elle l'a été pour toutes les réformes des retraites !

M. Rachid Temal. Il fallait changer !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. En effet, aussi intense que puisse être le débat, il faut bien, à un moment, adopter la loi.

Nous proposons donc un débat complet. Il sera passionné, et je crois même qu'il sera passionnant.

Mme Catherine Troendlé. Ce n'est pas suffisant !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Je n'ai aucun doute sur le fait qu'il permettra d'élaborer un texte encore meilleur que celui que nous soumettons au Parlement, car c'est à cela que sert l'examen parlementaire. (Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains, SOCR et CRCE.)

Cependant, je veux être clair, monsieur Marseille : nous allons créer ce système universel de retraite et nous allons soumettre ce texte au Parlement français dans le calendrier qui est imparti, pour une adoption avant l'été. (Applaudissements sur les travées des groupes LaREM et Les Indépendants. – Huées sur les travées du groupe Les Républicains.)

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