Question de Mme MICOULEAU Brigitte (Haute-Garonne - Les Républicains) publiée le 05/03/2020

Mme Brigitte Micouleau attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation de la ville de Toulouse et de sa métropole face à la propagation de l'intolérance religieuse prônée par le séparatisme islamiste.
Elle souhaite lui rappeler le lourd tribut payé par la ville rose et sa région en mars 2012, avec les assassinats perpétrés sur trois militaires, ainsi qu'un enseignant et trois enfants de l'école Ozar Hatorah.
Dans sa volonté affirmée de ne stigmatiser ni les musulmans, ni l'islam, elle a écouté avec beaucoup d'intérêt les mesures préconisées par le président de la République et la présentation de quatre axes de lutte contre le séparatisme islamiste.
À l'issue de ces annonces, elle souhaite savoir comment se concrétisera le premier axe : la reconquête républicaine promise, et comment les lois de la République seront formellement appliquées à tous ceux qui, notamment, incitent à la haine raciale et dont les dossiers restent sans nouvelle de la justice.
Également, elle souhaite savoir comment pourra être mis en place concrètement un meilleur contrôle du financement étranger des lieux de culte, des influences étrangères en général, et quelles mesures seront prise en cas de manquements.
Sa question porte aussi sur les moyens mis en place pour lutter contre toutes les manifestations du séparatisme et du repli communautariste.
Elle lui demande donc comment, dans ce contexte, seront enfin respectés l'État de droit, l'ordre public et les lois de la République.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 09/07/2020

Le 18 février 2020, le Président de la République a exposé la stratégie du gouvernement en matière de lutte contre le séparatisme islamiste. Le ministère de la Justice est pleinement engagé dans l'action entreprise par le gouvernement à cette fin, à travers la mise en œuvre de plusieurs outils, et le déploiement de divers dispositifs.  Ainsi, pour lutter contre les discours haineux, la loi n° 2014-1353 du 13 novembre 2014 a créé l'article 421-2-5 du code pénal et a ainsi introduit dans ce code les délits de provocation aux actes de terrorisme et d'apologie de ces actes, qui relevaient auparavant de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. L'article 421-2-5 du code pénal punit de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende le fait de provoquer directement à des actes de terrorisme ou de faire publiquement l'apologie de ces actes. Les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende lorsque les faits ont été commis en utilisant un service de communication au public en ligne. L'autorité judiciaire est particulièrement mobilisée dans la lutte contre ces infractions.  Particulièrement sensible à l'efficacité de la lutte contre tous les discours de haine, le ministère de la Justice s'efforce de travailler dans le sens d'une répression plus systématique. A ce titre, il diffuse de façon régulière, à l'attention de l'ensemble des procureurs et procureurs généraux, des directives de politique pénale les invitant à la plus grande vigilance dans la conduite de l'action publique en cette matière.   Ainsi, le 4 avril 2019 était diffusée une nouvelle circulaire de lutte contre les discriminations, les discours et comportements haineux rappelant aux parquets la nécessité de porter une attention particulière à ces faits ainsi qu'une réponse pénale ferme et adaptée tandis que la très récente circulaire du 10 janvier 2020 relative à la protection de la laïcité et à la lutte contre la radicalisation et le communautarisme les invite à veiller à la mise en œuvre systématique des incriminations visant à sanctionner les abus et les dérives commis au nom des religions ou en raison des religions. Par ailleurs, afin de favoriser les échanges d'informations entre les acteurs de la lutte contre le séparatisme islamiste et la radicalisation et de mettre en place une coordination efficace de l'action judiciaire et de l'action administrative, des instances partenariales associant le procureur de la République et le préfet ont été créées. Ainsi, l'autorité judiciaire participe aux groupes d'évaluation départementaux (GED), créés en 2014. Présidés par le préfet de département, ils rassemblent les services de renseignement du ministère de l'intérieur et les échelons déconcentrés d'autres services (renseignement pénitentiaire, douanes, police aux frontières…). Ils ont pour objet d'organiser le décloisonnement de l'information au niveau du département et de s'assurer que chaque individu signalé pour radicalisation fait l'objet d'une évaluation puis, si nécessaire, d'un suivi ou d'une mesure administrative d'entrave. Le procureur de la République en est membre permanent. L'autorité judiciaire participe également aux cellules de suivi pour la prévention de la radicalisation et pour l'accompagnement des familles (CPRAF), mises en place en 2014, qui visent à accompagner les familles qui signalent un proche au titre de la radicalisation et à prendre en charge les intéressés, dans une perspective préventive et pluridisciplinaire. Les CPRAF sont présidées par le préfet. Le procureur de la République en est membre. Elles rassemblent également les services de l'Etat concernés par la prévention de la délinquance, l'éducation, la jeunesse, la santé ou la politique de la ville, les collectivités territoriales disposant de compétences en matière d'accompagnement social et le réseau associatif. Par ailleurs, les cellules départementales de lutte contre l'islamisme et le repli communautaire (CLIR) ont été mises en place à partir de novembre 2019. Sous l'autorité du préfet de département, les cellules de lutte contre l'islamisme et le repli communautaire rassemblent les services déconcentrés de l'Etat, les forces de sécurité intérieures et, le cas échéant, les élus locaux. Le procureur de la République ou son représentant en est membre permanent. Les cellules départementales de lutte contre l'islamisme et le repli communautaire ont pour mission d'établir un diagnostic de l'état de l'islamisme et du repli communautaire dans le département, d'assurer la centralisation et le partage d'informations confidentielles en la matière et de définir une stratégie de lutte contre les actes qui constituent des infractions pénales ou troublent l'ordre public.  Parallèlement à la création de ces instances, 47 quartiers de reconquête républicaine ont été institués à partir de l'année 2018. Dans ce cadre, les territoires concernés bénéficient notamment de l'attribution d'effectifs de police supplémentaires. En outre, au sein de ces quartiers, 15 zones particulièrement exposées ont été définies, notamment à Toulouse, pour faire l'objet de plans de lutte contre la radicalisation. Dans ces territoires, les moyens sont renforcés et une stratégie de lutte contre la radicalisation et le repli communautaire est appliquée. Sous l'autorité du préfet, ces plans d'action ont vocation à mobiliser tous les services de l'Etat, les collectivités territoriales et l'ensemble des acteurs de la prévention, dans le cadre d'une stratégie fondée à la fois sur l'entrave des individus et des réseaux les plus dangereux mais également sur le développement de la prévention et du contre-discours. Concrètement, ces plans d'action se traduisent par des fermetures de débits de boissons, de lieux de culte, d'établissements culturels et sportifs et d'écoles, des contrôles anti-fraude et des mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance. Afin de poursuivre cette stratégie, cette méthode est en train d'être déployée sur l'ensemble du territoire. Il s'agit ainsi d'intensifier les moyens, en différenciant selon les quartiers, et de systématiser le travail interministériel avec les élus.  Enfin, s'agissant du contrôle des financements étrangers des lieux de culte et garantir leur transparence, un projet de loi est actuellement en cours d'élaboration afin de renforcer les dispositifs existants.

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