Question de M. TEMAL Rachid (Val-d'Oise - SOCR) publiée le 05/03/2020

M. Rachid Temal interroge M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur les conditions de mise en œuvre du vote électronique pour les Français de l'étranger.

Les interventions et tentatives d'intervention dans le processus électoral, d'où qu'elles émanent, sont malheureusement aujourd'hui une réalité. Ces interventions prennent place à différents moments dudit processus. Durant la campagne tout d'abord, en tentant d'influencer son cours. Puis lorsque certaines technologies, notamment numériques et en ligne, sont utilisées afin de procéder au vote, lors du scrutin lui-même.

C'est cette réalité, ainsi que les risques évalués, qui ont conduit le Gouvernement à prendre la décision d'abandonner le vote par internet pour les élections législatives de 2017. Cette décision, dont le bien-fondé n'est pas remis en question au regard de l'impératif démocratique, avait cependant été mal vécue par les Français établis hors de France, dont certains habitent à plusieurs centaines de kilomètres des bureaux de vote « physiques ». Réaction d'autant plus compréhensible que l'assemblée des Français de l'étranger (AFE) n'avait pas été prévenue en amont et s'était retrouvée mise devant le fait accompli. À ce titre, il rappelle que lors de l'examen en janvier 2019 des propositions de loi organique et ordinaire relatives aux élections organisées à l'étranger et aux instances représentatives des Français établis hors de France, le Sénat avait adopté le principe de consultation obligatoire de l'AFE lorsque le Gouvernement envisage de ne pas autoriser le vote par Internet pour les élections consulaires.

En 2017, le Président de la République avait précisé devant l'AFE avoir demandé « à l'administration et au ministre qu'une solution parfaitement sécurisée puisse être utilisée lors des prochaines élections consulaires de 2020 et que sur cette base, toutes les améliorations qui seraient indispensables puissent être conduites pour que lors des législatives de 2022, il n'y ait plus aucun débat ».

Le Gouvernement a donc pris la décision de permettre à nouveau le vote électronique pour les élections des conseillers des Français de l'étranger et des délégués consulaires des 16 et 17 mai prochains. Au regard des propos du Président de la République, il y a tout lieu de penser que si cette décision a été prise, c'est bien que les garanties suffisantes ont été trouvées, et que par conséquent, la même décision sera prise pour les élections législatives de 2022.

Aussi, il demande que lesdites garanties assurant la fiabilité desdits scrutins soient portées à la connaissance du Parlement.

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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 14/05/2020

Afin que l'engagement du Président de la République de développer une solution sécurisée de vote électronique pour les prochaines élections consulaires et les législatives 2022 soit tenu, les moyens consacrés à ce projet ont été significativement renforcés au ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE). Une cellule totalement dédiée à ce projet a été mise en place en 2018 au sein de la Direction des Français de l'étranger et de l'administration consulaire (DFAE). La mission de cette cellule « vote par internet » est double. La première consiste à mettre au point avec la société Scytl, titulaire du marché en cours, une nouvelle plateforme de vote pour les élections consulaires de 2020 qui soit ergonomique, sécurisée et robuste dans un contexte de menaces cyber élevées. La conduite du projet, plus agile, a permis de réaliser plusieurs tests et audits avant de lancer en juillet, puis en novembre 2019, deux tests grandeurs nature (TGN) auprès d'un panel de quelques 12 000 électeurs testeurs. Ces TGN se sont déroulés en présence des membres du bureau du vote électronique (BVE), de l'agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI) et d'experts indépendants. Des tests d'intrusions ont également été réalisés par le cabinet Ernst & Young lors du TGN de novembre qui était axé sur les questions de sécurité de la plateforme. La décision d'homologuer la plateforme de vote a été prise le 15 janvier 2020 par le MEAE après avoir recueilli l'avis favorable de l'ANSSI et au vu des résultats des audits, des TGN et de l'étude de risques « ebios-risk management » qui a été confiée au cabinet Wavestone. Enfin, la plateforme qui sera utilisée pour les élections consulaires permettra de mettre en œuvre la « vérifiabilité universelle » et la « vérifiabilité individuelle » afin de renforcer la sincérité du scrutin et la confiance des électeurs dans les résultats. Ces mécanismes sont notamment préconisés par la CNIL dans sa dernière recommandation n° 2019-053 du 25 avril 2019 relative à la sécurité des systèmes de vote par correspondance électronique. La première, la vérifiabilité universelle, permet au BVE et aux experts indépendants de vérifier a posteriori avec un outil tiers à la plateforme que l'urne et les différents composants n'ont pas été modifiés durant le scrutin. La seconde, la vérifiabilité individuelle consiste quant à elle à permettre à l'électeur de vérifier lui-même, en ligne et après la clôture du scrutin, que son vote a bien été pris en compte dans le dépouillement. La cellule « vote par internet » a également pour mission de préparer un nouveau marché de fourniture d'une solution de vote par internet pour les élections législatives de 2022. L'avis d'appel à la concurrence a été lancé en mars 2019 à l'issue de plusieurs séances de « sourcing » organisées par le MEAE et l'ANSSI auprès de sociétés spécialisées dans le vote par internet. S'agissant d'une solution innovante comportant des prestations de conception, le MEAE a décidé d'utiliser la procédure concurrentielle avec négociation pour ce marché qui sera attribué en 2020. La nouvelle plateforme de vote par internet qui sera développée pour les élections législatives de 2022 sera auditée et testée avant d'être homologuée. L'ergonomie et la robustesse du nouveau système de vote seront adaptées dans un contexte évolutif de la menace cyber.

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