Question de M. GONTARD Guillaume (Isère - CRCE-R) publiée le 16/04/2020

M. Guillaume Gontard interroge M. le ministre de l'économie et des finances sur la participation des compagnies d'assurance au fonds d'indemnisation des entreprises.
La crise sanitaire est également une crise économique et sociale et touche de plein fouet plusieurs secteurs d'activité mettant en grande difficulté de nombreuses entreprises, indépendants, associations employeuses ou encore agriculteurs. Le Gouvernement a mis en place des mesures de soutien immédiates aux entreprises : création d'un fonds de solidarité, report de charges, remise d'impôt… Ces mesures d'une ampleur exceptionnelle permettent de répondre à l'arrêt brutal pour les entreprises de leur activité ou aux conséquences de l'effondrement de leur chiffre d'affaire. Plus de 400 000 entreprises bénéficient de ces mesures et 4 millions de salariés en France sont aujourd'hui au chômage partiel. Ce plan d'aide implique un effort budgétaire considérable et pèse sur les contribuables français. Déjà 45 milliards d'euros ont été déployés et malgré l'ampleur des moyens mobilisés, ils resteront insuffisants pour compenser les pertes d'exploitation des entreprises. Chaque année les entreprises cotisent à des assurances pour être indemnisées en cas de catastrophe naturelle. En 2016, selon la fédération française des assurances, le montant des cotisations émises au titre des catastrophes naturelles s'établissait à 1,6 milliard d'euros. Or, aujourd'hui les compagnies d'assurance refusent d'indemniser les pertes d'exploitation de leur sociétaire au motif que les épidémies ne sont pas considérées comme des catastrophes naturelles. Elles se sont montrées prêtes à travailler à un régime qui couvrirait les pertes et dommages causés en cas d'épidémie. Toutefois ce régime ne pourra s'appliquer qu'aux catastrophes sanitaires à venir et non à celles déjà passées. Les compagnies d'assurance ont aujourd'hui contribué à hauteur de 200 M€ au fonds de solidarité en faveur des très petites entreprises (TPE) et des indépendants et des secteurs les plus touchés par l'épidémie. Mais au regard des pertes subies pour les commerçants, les agriculteurs, les TPE, PME dans le domaine du tourisme, de l'hôtellerie, de l'évènementiel… plusieurs entreprises sont en grande difficulté et les aides apportées par l'État permettent seulement de pallier l'urgence. Le fonds de solidarité aux petites et moyennes entreprises doit être renforcé par des contributions privées et en particulier par les compagnies d'assurance dont les efforts peuvent être accrus.
En effet, la baisse considérable des sinistres (accidents de la route, accidents corporels, dommages causés par des tiers…) enregistrés depuis le début du confinement a fait réaliser des économies importantes aux compagnies d'assurance. Le seul nombre de sinistres automobiles aurait chuté de 80 %. Or, 50 % du chiffre d'affaires des compagnies d'assurance est réalisé sur cette activité. Le président de la MAIF a d'ores et déjà fait savoir que le groupe allait reverser les 100 millions d'euros d'économie réalisée depuis le début du confinement à ses sociétaires titulaires d'un contrat automobile ; et il ne s'agit ici que du dix-neuvième groupe d'assurance en France classé par le chiffre d'affaires. Par conséquent, le montant des économies réalisées par les plus grands groupes depuis le début du confinement est certainement colossal. Dans ce contexte, un audit pour connaître précisément les économies générées par les compagnies d'assurance depuis le début du confinement serait justifié.
Il lui demande d'intervenir auprès des compagnies d'assurance pour obtenir un audit des économies réalisées depuis le début du confinement et revoir leur participation au fonds d'indemnisation des entreprises à hauteur des économies générées par la baisse des sinistres.

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Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 25/06/2020

Le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles n'est pas adapté pour couvrir le risque lié à une menace sanitaire grave telle que celle à laquelle nous faisons face aujourd'hui. Sur le plan financier d'abord, le régime n'a pas été conçu pour couvrir les risques d'épidémie. Ce régime ne couvre que les dommages matériels directs résultant d'une catastrophe naturelle et les pertes d'exploitation résultant de ces dommages si l'assuré est couvert contre ces pertes. En l'espèce, les pertes d'exploitation dues au Covid-19 n'ont pas été provoquées, dans l'immense majorité des cas, par des dommages matériels. Comme tout mécanisme assurantiel, le niveau de provisions du régime et de primes collectées sont calculés au préalable en fonction des aléas préalablement identifiés. Prendre en charge les pertes d'exploitation liées à la pandémie du Covid-19, hors de toute possibilité d'en avoir organisé au préalable la couverture financière, pourrait mettre en péril l'équilibre économique du régime déjà fortement mobilisé ces dernières années par les sinistres naturels extrêmes. Par ailleurs, en tout état de cause, une modification par la loi des contrats d'assurance déjà en cours pour imposer la couverture du risque de pandémie s'avèrerait inconstitutionnelle en ce qu'elle porterait atteinte de manière disproportionnée à l'équilibre économique de conventions légalement conclues. Pour autant, le Gouvernement a pleinement conscience des attentes légitimes exprimées à l'égard des assurances et de la couverture du risque que font peser les menaces sanitaires graves. Une réflexion autour de l'idée de création d'un régime de type assurantiel destiné à intervenir en cas d'une future catastrophe sanitaire majeure vient d'être engagée. Un tel mécanisme ne pourra nécessairement porter que sur l'avenir. Un groupe de travail a été mis en place par le ministère de l'économie et des finances, associant les principales parties prenantes. Il a pour objectif de déterminer l'opportunité, la faisabilité technique d'un tel régime ainsi que les avantages et les inconvénients pour tous les acteurs économiques. Les élus seront pleinement associés à ces travaux. Des premières recommandations doivent être rendues dès le mois de juin. Elles feront l'objet de concertations les plus larges possibles.

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