Question de M. GAY Fabien (Seine-Saint-Denis - CRCE) publiée le 14/05/2020

M. Fabien Gay attire l'attention de Mme la ministre du travail sur la menace d'un vaste plan social annoncé au sein de l'entreprise Derichebourg Aéronautics Services, mal nommé « plan de sauvegarde de l'emploi ».
Alors que la crise sanitaire n'est pas encore finie, et le matin même du premier jour de déconfinement et de reprise du travail, l'entreprise Derichebourg Aéronautics Services a convoqué un comité social d'entreprise (CSE) extraordinaire.
La direction a proposé un accord d'entreprise avec deux options : soit « accepter un accord sur la performance collective » avec la suppression du treizième mois, la perte de prime du travail de nuit, de transport ou de restauration avec à la clef un plan de licenciement en septembre, dont les salariés ne connaissent pas l'ampleur, faute de projections et d'étude ; soit « valider » un plan de licenciement de 750 personnes pour une entreprise comptant 1 600 salariés, et ce dès le début du mois de juin. Ceci est un chantage inacceptable à l'emploi.
Se pose la question de combien d'autres mal nommés « plans de sauvegarde de l'emploi » qui sont en réalité des plans de chômage de masse, se préparent dans les prochaines semaines, dans le secteur de l'aéronautique, et notamment à Hop Air France, comme dans d'autres secteurs industriels. Il convient de rappeler que les entreprises ont bénéficié ou peuvent bénéficier du prêt garanti par l'État, et ont activé le chômage partiel, qui est un droit ouvert par les cotisations sociales, pour près de 11 millions de salariés.
Afin d'éviter que les prochaines semaines voient se jouer un drame social d'une ampleur inédite, faisant payer aux salariés cette crise sanitaire dont ils ne sont pas responsables, il est nécessaire d'agir rapidement. Pour l'instant, la seule proposition concerne les salariés, qui devront faire des efforts et sacrifier leurs jours fériés et congés payés, jours liés à la réduction du temps de travail (RTT), primes, ou encore repos dominical et temps de travail, sans quoi ils courent le risque d'être licenciés.
Une autre voie est possible. Ainsi, par exemple, en Espagne, les licenciements ont été interdits dans la période, et en premier lieu dans les entreprises qui ont activé le chômage partiel ou bénéficié des prêts garantis par l'État. Il est également possible d'interdire le versement de dividendes pour l'année 2020 par la force de la loi, et enfin, de mettre en débat un plan de relance économique qui s'appuie sur deux piliers : un volet social avec la priorité de réindustrialisation et de souveraineté coopérante dans un certain nombres de domaines, et un volet écologique pour amorcer la nécessaire transition écologique et de lutte efficace contre le réchauffement climatique.
Concernant l'aéronautique, ce vaste plan doit inclure les stratégies pour Air France qui vient de bénéficier de 7 milliards d'euros, Airbus, ainsi que l'ensemble de ces sous-traitants avec l'ambition de construire le transport aérien du 21ème siècle, respectueux de l'humain et de la planète, en commençant par un plan ambitieux de réduction de ses émissions de CO2.
Il souhaite savoir si ce plan de relance peut être envisagé, et si le Gouvernement va prendre ses responsabilités en interdisant les licenciements dans la période, ainsi que le versement de dividendes.

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Transmise au Ministère de l'économie, des finances et de la relance


Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la relance publiée le 24/12/2020

En réponse à la crise sanitaire et économique sans précédent, le Gouvernement a, dans un premier temps, mis en place des mesures massives afin de préserver les emplois et les compétences et soutenir les entreprises, dans l'objectif d'éviter les licenciements et les défaillances d'entreprises. C'est notamment l'objet du dispositif d'activité partielle, qui a concerné plus de douze millions de salariés, et du dispositif d'activité partielle de longue durée mis en place au 1er juillet, qui permet à une entreprise, dans la limite de deux ans et dans le cadre de la négociation collective, de bénéficier d'aides publiques pour les salariés placés en activité partielle sur une partie de leur temps de travail. C'est également l'objet des mesures de soutien en trésorerie (prêt garanti par l'État, report des échéances fiscales et sociales). En contrepartie de ces mesures, un comportement exemplaire a été exigé des entreprises. En particulier, les grandes entreprises bénéficiant d'un soutien en trésorerie de l'État ont dû prendre l'engagement de ne pas verser de dividendes et de ne pas procéder à des rachats d'actions en 2020. En outre, les banques et les compagnies d'assurance doivent naturellement se conformer aux recommandations des régulateurs européens et nationaux et s'abstenir, à ce stade, de tout versement de dividende ainsi que de tout rachat d'actions. En dehors de ces cas particuliers, une mesure générale d'interdiction ou de limitation des dividendes ne paraît pas adaptée car elle négligerait la grande diversité des situations. En particulier, elle risquerait d'être défavorable aux salariés qui détiennent des titres de la société qui les emploie, aux chefs d'entreprise de PME et d'ETI qui se rémunèrent par ce biais, ainsi qu'à l'ensemble des épargnants qui détiennent, directement ou indirectement, des titres de sociétés. (De même, une mesure générale d'interdiction des licenciements ne paraît pas adaptée : elle négligerait la grande diversité des situations, et les mesures rappelées ci-dessus ont déjà pour objet de préserver les emplois et les compétences.) Dans un deuxième temps, le Gouvernement est également intervenu en annonçant plusieurs plans de soutien sectoriels. En particulier, un plan de soutien au secteur aéronautique de quinze milliards d'euros a été annoncé le 9 juin, avec un objectif, à la fois industriel et écologique : produire en France les avions et les hélicoptères propres de demain pour rester une nation leader de l'aéronautique dans le monde. Il est organisé autour de trois axes : répondre à l'urgence en soutenant les entreprises en difficulté et protéger leurs salariés ; investir dans les PME et les ETI pour accompagner la transformation de la filière ; et investir pour concevoir et produire en France les appareils de demain afin d'accélérer la décarbonation de notre industrie aéronautique, avec l'objectif de parvenir à un avion neutre en carbone en 2035 au lieu de 2050, notamment grâce au moteur à très haut taux de dilution et au recours à l'hydrogène. Ce soutien massif de l'État s'accompagne d'engagements des entreprises de la filière et notamment des grands donneurs d'ordre relatifs à leurs relations avec leurs sous-traitants et à la transition écologique. La préservation de l'emploi et des compétences, la transition écologique et la réindustrialisation sont également au cœur du plan de soutien au secteur automobile annoncé le 26 mai. Enfin, troisième temps de la réponse, un plan de relance sera annoncé d'ici à l'automne.

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