Question de Mme ARTIGALAS Viviane (Hautes-Pyrénées - SOCR) publiée le 04/06/2020

Question posée en séance publique le 03/06/2020

M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour le groupe socialiste et républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.)

Mme Viviane Artigalas. Ma question s'adresse à Mme la ministre des outre-mer.

Membre de la délégation sénatoriale aux outre-mer, je me fais ici la porte-parole de mes collègues de Guadeloupe et de Martinique, qui s'inquiètent pour l'avenir budgétaire des collectivités des outre-mer.

C'est dans un contexte de chute brutale des rentrées fiscales que le Premier ministre a annoncé ce vendredi une garantie des recettes pour les outre-mer : 110 millions d'euros pour les communes ; 40 millions d'euros pour les régions et collectivités uniques. Ce sont des mesures que nous avions très tôt proposées et que nous sommes aujourd'hui satisfaits de voir actées.

Toutefois, vous nous proposez une enveloppe de 150 millions d'euros, alors que notre collègue sénateur Georges Patient, auteur d'un rapport sur le sujet, parle pour sa part de 200 millions d'euros, d'autres experts avançant même la somme de 240 millions d'euros. Nous sommes donc encore manifestement très loin du compte !

Outre ces premières mesures, des experts, mandatés par Bercy, ont également commis un rapport qui vous propose de remplacer l'octroi de mer par des points de TVA supplémentaires.

Madame la ministre, évitons-nous ce débat déstabilisant et anxiogène. Nos collègues vous demandent d'écarter cette option mortifère, qui n'a fait l'objet d'aucune consultation. Au lieu de réformer l'octroi de mer, ils vous proposent de rattraper le niveau des dotations de péréquations : versez, dès cette année, les 85 millions d'euros qui font défaut aux outre-mer.

Ils vous suggèrent également de préfinancer le Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) pour toutes les collectivités ultramarines, et pas seulement pour Mayotte.

Ils souhaitent que soient versées de manière anticipée certaines ressources aux collectivités, comme la dotation globale de fonctionnement (DGF), et que soient intégralement compensés les allégements de taxe de séjour et de cotisation foncière, que vous encouragez par ailleurs.

Ils vous demandent enfin d'anticiper la crise sociale à laquelle feront face les départements et de supprimer les contrats du pacte de Cahors.

Madame la ministre, quelle réponse pouvez-vous faire à ces légitimes demandes ? (Applaudissements sur les travées des groupes SOCR et CRCE.)


Réponse du Ministère des outre-mer publiée le 04/06/2020

Réponse apportée en séance publique le 03/06/2020

M. le président. La parole est à Mme la ministre des outre-mer.

Mme Annick Girardin, ministre des outre-mer. Les mesures annoncées par le Premier ministre vendredi, et que vous avez évoquées, madame la sénatrice, sont des mesures exceptionnelles, historiques. Vous comme moi, nous sommes investies dans la vie politique depuis de nombreuses années. Pour ma part, je suis engagée depuis 2000, et je n'en ai jamais vu de telles, y compris après la crise de 2008. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.) C'est exceptionnel, c'est historique !

Pour les territoires ultramarins, l'effort est à la hauteur des besoins. Vous avez évoqué un certain nombre d'évaluations : ce ne sont que des évaluations. Nous nous sommes effectivement mis d'accord avec l'ensemble des collectivités pour les réaliser, mais nous avons aussi décidé que le rendez-vous serait fixé à la fin de l'année.

Qu'est-ce qui a été annoncé par le Premier ministre vendredi ? Il est important de rappeler que les communes des départements d'outre-mer (DROM) obtiendront une compensation des pertes, notamment sur l'octroi de mer et sur le carburant, qui sera totale.

Il en sera exactement de même pour les régions ultramarines, qui bénéficieront de cette garantie spécifique de prise en charge par l'État. Bien sûr, il faut une évaluation ; celle-ci a été chiffrée : le rapport du député Cazeneuve nous a servi de base, mais les débats continuent, et nous aurons l'occasion d'en reparler.

J'y insiste : aucune collectivité n'est oubliée. Je vous rappelle que la Nouvelle-Calédonie, comme la Polynésie française, a fait une demande de prêt garanti par l'État. Nous avons accordé 240 millions d'euros à la Nouvelle-Calédonie dans le PLFR 2. Nous sommes en train de négocier pour inscrire le cas de la Polynésie française dans le PLFR 3.

Par ailleurs, les petites collectivités régies par l'article 74 de la Constitution sont également prises en compte dans leurs spécificités, notamment quand elles ont des ressources qui proviennent d'une forme d'octroi de mer ou de taxes sur les carburants.

Par conséquent, c'est la première fois que l'on embrasse la totalité des territoires ultramarins et que l'on est aux côtés de tous les territoires. Il faut, je crois, s'en féliciter.

Néanmoins, je n'ai pas oublié vos autres demandes, madame la sénatrice. Bien sûr, nous sommes aux côtés des collectivités depuis le début. J'ai d'ailleurs fait en sorte que le fonds exceptionnel d'investissement (FEI) de 110 millions d'euros, soit attribué en totalité aux différentes collectivités dès le mois de février, soit dès le début de la crise, pour que ces dernières puissent agir, dès le déconfinement, afin de relancer les marchés publics et l'économie de leur territoire.

Avec l'Agence française de développement, nous avons annoncé un milliard d'euros de soutien aux collectivités et aux entreprises, somme disponible à partir de cette semaine. Nous avons mis en place d'autres formes d'accompagnement, et le Gouvernement n'a pas terminé l'ensemble de ses annonces en la matière, puisque le Premier ministre reprendra la parole sur ce sujet.

M. le président. Il faut conclure !

Mme Annick Girardin, ministre. Pour l'outre-mer, notre réflexe est le suivant : nous sommes aux côtés des collectivités, comme cela n'était jamais arrivé dans l'Histoire !

M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour la réplique.

Mme Viviane Artigalas. Je vous remercie de vos réponses, madame la ministre. Nous comptons sur vous pour continuer en ce sens.

Je tiens tout de même à souligner que l'urgence est de prévenir tous les risques d'incapacité budgétaire, en permettant aux collectivités d'outre-mer de sortir de l'ornière et de retrouver des marges de manœuvre.

En effet, vous n'êtes pas sans savoir que l'investissement et l'économie des outre-mer dépendent essentiellement de la commande publique. Nous comptons sur vous pour aller plus loin. Et surtout, ne rouvrez pas le débat sur l'octroi de mer ! (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.)

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