Question de M. BONNE Bernard (Loire - Les Républicains) publiée le 18/06/2020

M. Bernard Bonne attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique et solidaire sur la nécessaire valorisation du patrimoine hydraulique des rivières dans notre pays.
Malgré 2 milliards d'euros dépensés chaque année par les agences de l'eau, les résultats ne sont pas au rendez-vous et la fracture entre les politiques nationales et les réalités de terrain s'accentue. Or, durant la crise du Covid-19, les petites centrales hydro-électriques ont continué à produire de l'énergie bas carbone, les moulins ont repris ou augmenté leur production d'huile ou de farine afin de faire face aux difficultés d'approvisionnement.
Plus généralement, face aux risques majeurs que notre pays affronte, manque d'indépendance énergétique, retard dans la production bas carbone, sécheresses et canicules, mais aussi grandes crues, déclin de la biodiversité, les ouvrages hydrauliques sont une réponse pertinente.
Or, contrairement à l'esprit de la loi de 2006 qui prévoit explicitement de « gérer, entretenir et équiper » les ouvrages hydrauliques et d'indemniser les charges exorbitantes résultant de travaux de continuité écologique là où ils sont indispensables, l'État dépense l'argent public pour détruire et assécher les seuils de moulins dont 90 % d'entre eux ne constituent pas des obstacles à la continuité écologique.
Aussi, alors que près de 50 000 sites sont ainsi disponibles pour mener une politique locale et active pour l'eau, le climat et les paysages, la biodiversité mais aussi l'économie locale, il souhaite savoir si le Gouvernement entend préserver nos moulins et étangs et non les détruire, et mener une réelle politique de co-construction avec les acteurs de terrain.

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Transmise au Secrétariat d'État auprès de la ministre de la transition écologique, chargé de la biodiversité


Réponse du Secrétariat d'État auprès de la ministre de la transition écologique, chargé de la biodiversité publiée le 05/08/2021

La biodiversité aquatique est particulièrement fragilisée en France : d'après les données 2019 de l'UICN (Union internationale pour la conservation de la nature), 28 % des crustacés et 39 % des poissons sont menacés, quand 19 % des poissons présentent un risque de disparition. Dans ce contexte, l'importance de la politique de restauration de la continuité écologique des cours d'eau a été réaffirmée lors des Assises de l'eau en juin 2019 et par le plan biodiversité de juillet 2018, qui prévoit de restaurer la continuité sur 50 000 km de cours d'eau d'ici à 2030. La stratégie biodiversité 2020 de la Commission européenne en fait également un enjeu majeur. La mise en œuvre de cette politique sur le terrain est toutefois délicate car elle doit être conciliée avec le déploiement des énergies renouvelables dont fait partie l'hydroélectricité, la préservation du patrimoine culturel et historique, ou encore les activités sportives en eaux vives. À ce jour, la politique de priorisation mise en oeuvre par le Gouvernement a permis d'identifier les cours d'eau sur lesquels il était important d'intervenir (11 % des cours d'eau), et sur ces cours d'eau, de procéder à des interventions sur environ 5 000 ouvrages. Dans la grande majorité des cas, la solution technique retenue a consisté à aménager l'ouvrage (mise en place d'une passe à poisson, d'une rivière de contournement, abaissement du seuil…), sans qu'il n'y ait suppression du barrage ou du seuil. Un article de la loi Climat et résilience, voté de manière conforme par les deux chambres du Parlement, édicte que, s'agissant des moulins à eau, l'effacement des seuils ne peut désormais constituer une solution dans le cadre de l'accomplissement des obligations relatives au franchissement par les poissons migrateurs et au transport suffisant des sédiments. Comme indiqué à l'Assemblée nationale et au Sénat, le Gouvernement regrette le choix des parlementaires d'avoir adopté cette disposition. En effet, l'effacement permet notamment de limiter la concentration des sédiments et des pollutions, et la disparition d'habitats diversifiés liés à la variation des niveaux d'eau d'une rivière courante et dynamique. En outre, il limite les dégâts lors de crues ou d'inondations. L'effacement total ou partiel d'un ouvrage permet donc de redonner vie aux cours d'eau. Par ailleurs, l'interdiction d'effacer ou de consacrer des aides publiques à l'effacement va contraindre tous les propriétaires d'ouvrages à assumer les dépenses d'entretien liés à leurs seuils même lorsqu'ils souhaiteraient les effacer. Or, cet entretien est jugé par certains propriétaires comme chronophage, coûteux et techniquement délicat : tous ne sont pas en mesure de l'assurer, notamment lorsque l'ouvrage est vétuste. Conformément à un amendement gouvernemental adopté dans la loi Climat et résilience, le ministère de la Transition écologique mettra en place un dispositif de conciliation et de médiation dédié aux questions de restauration de la continuité écologique et de développement de la petite hydroélectricité pour rechercher les solutions les plus pragmatiques aux situations de blocage qui ont été remontées à l'Assemblée nationale comme au Sénat. Il s'agira d'un dispositif à deux niveaux : un dispositif de conciliation au niveau local et, pour les cas ne trouvant pas de solution satisfaisante à ce niveau, l'intervention d'un médiateur national de l'hydroélectricité. Un bilan de ce dispositif sera présenté au Parlement conformément aux dispositions de la loi dans 3 ans. Enfin, le Gouvernement souhaite préciser que les agences de l'eau ne dépensent pas chaque année 2MdE à la restauration des rivières, mais de l'ordre de 200 M€, dont seulement une petite partie pour l'effacement de seuils. L'essentiel des aides des agences de l'eau est consacré aux projets d'assainissement des eaux usées portées par les collectivités locales, aux projets de production et de transport d'eau potable et s'agissant de la restauration de la continuité écologique, aux projet d'aménagement d'ouvrages commes les passes à poissons.

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