Question de Mme CABARET Muriel (Sarthe - SOCR) publiée le 17/07/2020

Question posée en séance publique le 16/07/2020

Mme Muriel Cabaret. En votre « âme et conscience », monsieur le Premier ministre, vous avez nommé Gérald Darmanin ministre de l'intérieur. Pourtant, celui-ci fait de nouveau l'objet d'une enquête pour viol, harcèlement et abus de confiance concernant une sombre affaire d'échange de faveurs sexuelles contre une intervention à la Chancellerie. (Murmures sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)


M. Julien Bargeton. Ce que vous dites est scandaleux !


Mme Muriel Cabaret. Depuis 2017, nous avons vu nombre de ministres démissionner à la suite d'affaires fiscales ou financières, ou encore pour consommation intempestive de homards…

Mais dans ce cas précis, rien : « circulez, il n'y a rien à voir ! » et rien à comprendre. Il n'y a pas de problème non plus. Avec le Président de la République, vous affichez votre soutien sans faille au ministre de l'intérieur sans même attendre la fin de la procédure judiciaire.


M. Julien Bargeton. C'est vous qui ne l'attendez pas !


Mme Muriel Cabaret. C'est une erreur éthique et politique d'une violence symbolique inouïe.

Que nous dites-vous en réalité ? Que M. Darmanin est innocent, que la victime ment, au mépris des principes d'équité, du contradictoire et d'équilibre entre les parties. Pis, vous ignorez le conflit d'intérêts en puissance que représente cette nomination : que se passera-t-il en cas de mise en examen d'un ministre qui sera l'autorité hiérarchique des policiers chargés d'enquêter sur ses agissements ?

Que les députés LaREM se rassurent, il s'agit non pas de nier la présomption d'innocence (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.), nous y sommes très attachés (M. le garde des sceaux lève les yeux au ciel.),…


M. François Bonhomme. Vous faites bien de le dire !


Mme Muriel Cabaret. … mais de vous interroger sur le signal délétère envoyé à toutes les victimes.

Vous qui en appelez à l'exemplarité de la politique et à la lutte contre les violences faites aux femmes, quel message envoyez-vous aux Françaises et aux Français lorsque vous faites fi de la parole des victimes ? Mesurez-vous bien les conséquences de cette nomination ? (Applaudissements sur les travées des groupes SOCR et CRCE.)


Réponse du Premier ministre publiée le 17/07/2020

Réponse apportée en séance publique le 16/07/2020

M. Jean Castex, Premier ministre. Madame la sénatrice, je comprends que c'est votre première intervention.

M. Julien Bargeton. Ce n'est pas la meilleure ! (Exclamations sur les travées du groupe SOCR.)

M. Jean Castex, Premier ministre. Vous dites que je défends M. Darmanin. Mais ce n'est pas lui que je défends, ce sont les principes fondamentaux de l'État de droit. (Applaudissements sur les travées des groupes LaREM et Les Indépendants. – MM. Olivier Cadic et Max Brisson applaudissent également. – Protestations sur des travées des groupes SOCR et CRCE.)

Je suis ici en tant que chef du Gouvernement dans une assemblée parlementaire. M. Darmanin n'est pas mis en examen. M. Darmanin n'a fait l'objet d'aucune condamnation et, à ce que je sache, chaque fois que l'autorité judiciaire a eu à se prononcer dans cette affaire, elle a rendu des actes consacrant son innocence. M. Darmanin a droit au respect des principes de la République comme tous les citoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC, LaREM, Les Indépendants et RDSE. – Exclamations sur les travées du groupe SOCR.)

Nous assistons à des dérives inadmissibles. Je le dis ici avec solennité et gravité.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. Après les cas Bayrou, Ferrand, et autres…

M. Jean Castex, Premier ministre. Comme vous le savez, il m'appartient, aux termes de la Constitution, de proposer au Président de la République la nomination des membres de mon gouvernement. C'est en mon âme et conscience, madame, au-delà du respect des principes fondamentaux de la République, que j'ai fait cette proposition.

Votre intervention suppose donc que j'aurais biaisé avec ma conscience, ce que je ne vous autorise pas à dire. (Vifs applaudissements sur les travées des groupes LaREM, Les Indépendants et RDSE, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)

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